Lot n° 203

GUILBERT (Yvette) — 4 lettres autographes signées. 1897-1899 et s.d.

Estimation : 200 - 300 €
Description

Au chansonnier Aristide Bruant. 1899, d'après le cachet de la poste. « Voulez-vous être le plus chouette de Montmartre ? Eh bien faites-moi une chanson, gaie, blagueuse, soit sur les chanteuses, les actrices, ou sur les journalistes... Je crois qu'une dizaine de petits conflits sur la presse amuseraient fort nos amis [Francisque] Sarcey, [Henry] Bauër et Cie.... »
— À l'écrivain Louis de Robert. 1897. Belle lettre sur son bonheur conjugal, alors qu'elle venait d'épouser en août Maxime Schiller : « ... Merci de ta gentille lettre. Tu sais que mon Max et moi t'attendons dimanche à déjeuner ? Notre voyage s'effectue très bien, le froid n'est pas intense, et le temps est fait pour nous ! Je ne sais si c'est la joie très douce de la présence de l'être que j'aime, mais les trains, les compartiments sales, les hôtels plus ou moins confortables, les fatigues, tout l'embêtement des voyages disparaît et j'ai une sensation exquise de vivre dans ce brouhaha de chanteuse en ballade d'amour. Mais j'ai la première fois de ma vie la très étonnante sécurité de mon bonheur – d'un bonheur qui me suit – qui va où je vais. Je l'emporte avec moi... Je m'en habille, je le sens en moi, sur moi et c'est un délice exquis ! – Je voyage, sans que rien ne me manque !! Je sais mère hors de danger et mon cher aimé avec moi, donc plus rien à désirer – mais un souci journalier de consolider notre amour, de nous aimer davantage et mieux. Ah, mon bon petit vieil ami, que je te souhaite de trouver l'être qui te complétera ! Le pendant de toi-même – c'est, sais-tu, inappréciablement bon ! et rare donc !! Par ce temps de cœurs infidèles et saphiques, c'est bigrement consolant de voir qu'on a su échapper à la gangrène universelle, et qu'on a désiré, trouvé une âme douce, saine et guérissante... avec le but unique de vous aimer, et de n'aimer que vous... Je suis heureuse. Parfaitement heureuse et je me demande avec peur si rien d'inattendu ne va pas démolir nos deux vies si noblement réunies. J'aime mon mari de toute mon âme, lui aussi m'aime, alors quoi ? On peut bien payer d'une grosse peine la joie de s'aimer, le tout c'est qu'il n'arrive rien d'irrémédiable qui nous sépare !... » Comédienne et chanteuse de cabaret, Yvette Guilbert (1867-1944) fut immortalisée par Toulouse-Lautrec. Journaliste et romancier, ami de Daudet, Loti, Proust et Zola, Louis de Robert (1871-1937) s'était aussi lié d'amitié avec Yvette Guilbert.
— À un « cher Maître ». S.d. « ... Votre prospectus est très bien – et il faut arriver à ce que le peuple paie l'art et l'artiste, comme il paie le troquet, le chemin de fer quand il voyage, et le cinéma. Les artistes sont tous des gens du peuple et les leurs doivent comprendre leur devoir vis-à-vis de ceux qui les illustrent. N'est-ce pas ? Quel est l'artiste qui demanderait à l'ouvrier son travail gratuit ? L'ouvrier doit payer l'artiste, il ne le respectera qu'à ce prix... » (une coupure de presse jointe annonçant entre autres un spectacle d'Yvette Guilbert).
— À Albert Willemetz. « 22 février ». Elle propose ses services pour la revue en préparation au théâtre des Bouffes du Nord que dirigeait Albert Willemetz. La grande chanteuse et comédienne égérie de Toulouse-Lautrec : « Entre toutes les divas du café-concert, Yvette Guilbert est celle que Toulouse-Lautrec a le plus fréquemment représentée, aussi bien en tableaux qu'en dessins et lithographies [... Elle] passionna le peintre et l'œuvre graphique de Toulouse-Lautrec serait incomplète sans cette approche si forte et si subtile qui s'avéra moins comme une série d'observations amusées ou irrévérencieuses, que comme un véritable hommage au talent et à la vivacité protéiforme d'une grande vedette » (Les Lautrec de Lautrec, Paris, BnF, 1991, pp. 76 et 78).

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