Lot n° 134

GAUTIER (Théophile) — Lettre autographe signée à son « cher Jujube » [le peintre émailleur genevois Jules Crosnier]. [28 mai 1869]. 2 pp. in-16.

Estimation : 300 - 400 €
Description
Sur l'exemplaire de son recueil Un Douzain de sonnets, dédié et offert la veille à la princesse Mathilde pour son anniversaire, orné d’un portrait sur émail par Jules Crosnier. Ce recueil fut tiré en 1869 à seulement 4 exemplaires hors commerce, et intégré en 1876 dans le tome II des Poésies complètes. « Vous devez avoir déjà des nouvelles de votre triomphe par Mdme Carlotta Grisi [célèbre ballerine, sœur de la compagne de Théophile Gautier]. Votre portrait a eu le plus grand succès, tout le monde s'est récrié sur l'exactitude merveilleuse de la ressemblance et l'extrême délicatesse de l'exécution. Il était enchâssé comme un camée dans la couverture d'un de mes volumes dédié à la princesse. En qualité de son bibliothécaire, j'avais bien le droit d lui offrir un livre et c'était la seule forme de cadeau possible de moi à une Altesse Impériale. Le livre était relié en vert à l'extérieur et en violet à l'intérieur. [Le peintre émailleur] Claudius Popelin qui s'entend à ces choses mieux que personne, avait bien voulu se charger du soin d'encadrer votre émail. Il était placé en dedans du livre en regard de la dédicace dans un ovale taillé en bizeau pris sur l'épaisseur de la reliure et entouré d'une légère dentelle d'or sur un fond violet semé de "M" couronnées. Ce fond très habilement choisi atténuait quelques tons un peu trop laqueux et violacés de l'émail et le ramenait à la nuance juste. C'était parfait et vous ne pouviez être présenté sous de meilleures conditions à cette Altesse qui se connaît très bien en peinture puisqu'elle en fait elle-même de charmante. Elle a été enchantée de la surprise, ravie du portrait, et si charmée du cadeau qu'elle l'a montré et fait admirer à tous ceux qui venaient fêter son anniversaire... Vous voudrez bien accepter ce petit dédommagement de ma part. Je vous suis encore très redevable car j'ai pu, grâce à vous, procurer un moment de joie presque enfantine dans sa vivacité à une princesse pour qui j'ai la plus profonde et la plus respectueuse affection... » Fille du roi Jérôme et grande figure de la vie littéraire et artistique, la princesse Mathilde (1820-1904) avait failli épouser son cousin le futur Napoléon III, et fut un temps mariée au riche prince russe Anatoli Demidov. Femme de caractère, indépendante, affranchie des conventions mondaines et religieuses, elle tint un salon littéraire et mondain très couru où se croisaient des personnalités de tous bords, le comte de Nieuwerkerke (un de ses amants), les Bonaparte, Théophile Gautier, Edmond de Goncourt, Gustave Flaubert, ou encore Marcel Proust qui y fit des apparitions après la chute de l'Empire. Joint : Benjamin (Benjamin Roubaud dit). Portrait lithographié de Théophile Gautier. Extrait du journal Le Charivari, 1838. In-folio.
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