Lot n° 44

LEDOUX (Claude-Nicolas) — Apostille autographe signée (Paris, 2 août 1787, 2/3 p.) sur une pièce à lui adressée par le notaire parisien Amable-Toussaint Delarue (Paris, 2 août 1787, 1 p. 1/2), sur un f. in-folio.

Estimation : 600 - 800 €
Description
Document ayant trait à l'acquisition de terrains, dans le cadre de la construction de la barrière d'octroi de Paris dont il était chargé. Le notaire lui écrit : « Les héritiers du s[ieu]r Lamarre, m[aîtr]e plâtrier propriétaire d'un terrain de l'étendue de cinquante perches en deux parties, situé terroir de Clichy, lieudit "Les Grands-Champs", divisé par le chemin de Paris à Clichy et clos en grande partie d'un mur de moelons de plâtre, tenant d'un côté dudit chemin à M. Boutin, à la d[emois]elle Coupée et au s[ieu]r Grosbois, de l'autre aux s[ieu]rs Bergeret, Le Jeune, Le Foulon et aud[it] Grosbois, et sur lequel se construit partie des deux bureaux de cette entrée de Paris et doit passer la ligne circulaire, consentent de le céder et vendre au roi à raison de 27000 [livres] l'arpent, ce qui élèveroit cette vente à 13500 [livres] et sous la condition que le prix leur en seroit payé le jour de la signature du contract. Comme cette proposition est extravagante et d'autant plus exagérée que M. Boutin, dont le terrein a les mêmes faces, le cède sur le prix de 4000 [livres] l'arpent, le contrôleur général des entrées de Paris ne pouvant espérer de ces propriétaires obstinés des conditions raisonnables, a cru devoir leur proposer la voie de l'estimation par experts et ils y ont accédé. Au moyen de quoi le soussigné a l'honneur d'observer à l'administration que comme on construit déjà depuis quelques tems sur le terrein des héritiers Lamarre, il est instant, pour éviter toutes plaintes de leur part, de prendre la décision du ministre à cet égard... » Claude-Nicolas Ledoux tient Amable-Toussaint Delarue informé des suites de l'affaire : « J'ay fait dire au s[eu]r Lamare que je désiroit traiter avec luy définitivement pour le prix de son terrain, et que je le priois de passer chez moy. Il a répondu que c'étoit peine inutile et qu'il ne changeroit rien. Il demande des experts. L'administration ne gagnera point au débat. Le terrain du s[ieu]r Lamare est situé sur les deux faces du chemin de Clichy : il a d'autant plus de valeur qu'il présente peu de profondeur. Quoique sa demande paroisse exagérée, il est indispensable de finir avec luy. On gagnera du tems, et ce calcul doit être compté pour quelque chose. Il faudra estimer le terrain douze mille livres l'arpent et lui donner le surplus pour les constructions et indamnités, afin d'établir des ba[s]es qui asseujétissent la ténacité des voisins... » Architecte, dessinateur, philosophe et poète visionnaire, Claude-Nicolas Ledoux (1736-1806) fut architecte ingénieur des Eaux et Forêts (1764), inspecteur des Salines de Lorraine et de Franche-Comté (1771), architecte du roi, membre de l'Académie royale d'architecture et architecte de la Ferme générale (1773). Tout au long de sa carrière, il partagea son activité entre les commandes privées ou publiques, les œuvres modestes ou prestigieuses, destinées à toutes sortes de fonctions : églises de village, hôtels et châteaux particuliers pour l'aristocratie, prison, théâtre, grenier à sel, Saline royale d'Arc-et-Senans dans l'actuel Doubs, urbanisme paysager des quartiers nord-ouest de Paris, mur d'enceinte de Paris dit des fermiers généraux avec ses pavillons ou « barrières »... Protégé de madame Du Barry, Trudaine, Angiviller, Necker, Calonne, il acquit une aura internationale, suscitant l'admiration de l'empereur d'Autriche comme du futur tsar Paul Ier, mais tomba en disgrâce auprès de Louis XVI en 1789. Il connut la prison sous la Terreur, cependant cette période d'inactivité professionnelle lui permit d'avancer la composition de son grand traité L'Architecture considérée sous le rapport de l'art, des mœurs et de la législation, publié en 1804. Son réformisme utopique novateur et son rationalisme lyrique et social marquèrent durablement l'histoire de l'architecture et plus généralement celle des idées.
Partager