Description
de maroquin vert ; en italien.
Très intéressante correspondance amicale, principalement relative à ses opéras.
[Carlo CLAUSETTI (1869-1943), compositeur napolitain, librettiste, poète et traducteur, directeur de la filiale de l’éditeur musical Ricordi à Naples, se lia avec Puccini à l’occasion de la création à Naples de Manon Lescaut (21 janvier 1894) ; une amitié fraternelle unit les deux hommes, et se développa dans une collaboration artistique confiante, Puccini considérant Clausetti comme un autre lui-même.]
→ 28 mars 1894, chaleureuse protestation d’amitié au poète aimable, au musicien inspiré, à l’artiste polychrome (« amabile poeto musico inspirato artista policolore – T’adoro »… Il rappelle le baiser qui a scellé leur amitié…
→ Pise 27 octobre : il sera à Torre del Lago jusqu’au 15 novembre.
→ Milan 10 janvier 1895. Il est peu enthousiaste pour Le Villi à Molfetta, et veut savoir si l’orchestre et le chef valent quelque chose, et si on soignera la mise en scène, car il est inutile de monter Le Villi sans garantie de succès. Et pour le San Carlo, c’est NON, opinion partagée par Giulio Ricordi : on ne peut forcer l’opinion ; l’opéra est tombé à Naples, et on croirait qu’on veut profiter du succès de Manon pour réhabiliter Le Villi : « Non conviene sforzare l’opinione publica. A Napoli cadde l’opera et parrebbe che si volesse approfittare del successo di Manon per far riabilitare Le Villi »…
→ Milan 11 février. Il salue l’organisateur théâtral, auteur de Manon Lescaut dans l’Italie du Sud (« celebre organisatore teatrale immenso animatore di publici, autore dell’opera Manon Lescaut nel meridionale d’Italia ! »). Il ne peut dire combien il lui doit. Il est frappé par l’idée de la nouvelle mise en scène du 3e acte de La Bohème, mais demande des détails pour mieux comprendre comment disposer le chœur (« il coro a semicerchio o su due ale ? e i soldati come ? e dove ? »)…
→ Milan 18 février, longue lettre sur l’opéra Guglielmo Ratcliff de MASCAGNI, qui a été un succès ; Mascagni a fait de grands progrès dans la technique et l’instrumentation, et dans l’enchaînement des morceaux ; mais Puccini critique le livret, et ne croit pas que l’opéra intéressera beaucoup ; de plus il faut un ténor avec des poumons d’acier (« ci bisogno un Tenore con pumoni di ghisa ») ; et Mascagni a tout pris dans Le Villi (« Le Villi ci sono a piene mani »)… Il avance bien dans La Bohème, mais il devra travailler comme un chien pour la terminer l’année prochaine (« Bohème proceda bene ma sono molto indiétro e devo lavorare come un cane se voglio finirla per l’anno venturo »). Mascagni va diriger Manon à Livorno…
→ Pescia 7 juin. Il est à la campagne, Villa Castellaccio à Pescia, et il travaille.
→ Pescia 29 septembre. Il a beaucoup vanté l’Hymne de Clausetti à Ricordi, qui en fera toutes les éditions possibles, même turques (ottomanes), mais il a trop de travail pour en faire l’orchestration (« Ho tanto da fare che non posso proporre strumentari, come vorrei, l’inno »)…
→ Palerme 9 avril 1896. Il explique son départ précipité pour Palerme afin de préparer la création sicilienne de La Bohème (dont il a remanié le 2e acte après les représentations de Rome et Naples) [9 mai]. Ils sont en pleines répétitions, et il en attend une excellente exécution (« deduco, predico, confido, spero un’ottima, intonata esecuzione »), avec de très bons chanteurs, dont la Stehle et la Giacchetti pour Musette, et le Schaunard qu’il désirait. Samedi on reprend Manon avec Mugnone. La Bohème viendra probablement le samedi suivant. Puccini demande des détails sur les représentations au San Carlo…
→ 26 mai 1897. Il regrette de quitter son ami, mais la soif de verdure (« la sete di verde ») est trop forte…
→ Levico 2 juillet. Il revient de sa conquête de Berlin ; il sera le 15 à Torre del Lago, et se remettra à Tosca trop longtemps abandonnée (« riprendero Tosca de tanto tempo abbandonata »)…
→ Naples 12 octobre 1898. Il reproche plaisamment à son lascif ami de ne pas lui écrire… Il travaille lentement à Tosca, comme un castor à sa maison (« Io lavoro a Tosca lentamente come il castoro alla sua casa »). Il a acheté une propriété [à Chiatri] et construit une villa ; il a des cheveux blancs et s’approche du repos éternel calmement, en espérant que la fin viendra le plus tard possible (« Ho comprato un podere e fabbrico una villa. Ho dei capelli bianchi e m’avvicino al riposo eterno con calma e sperando che la fine sia distanto più possibile »…
→ Torre del Lago 5 novembre 1899. Il attend des projets. Pour sa maison, il demande à Clausetti de lui trouver une devise qu’il aimerait faire peindre pour éloigner les casse-pieds (« indicante : lasciatemi tranquillo – non voglio importuni seccatori »)…
→ Torre del Lago 10 novembre. Longue lettre réagissant à un sujet proposé par Clausetti (après l’achèvement de Tosca, et une brouille avec Ricordi qui critiquait l’opéra) et à l’opéra Don Pietro Caruso de Roberto BRACCO. Puccini voulait autre chose de bien différent, pour naviguer dans d’autres eaux, loin du cercle des vulgarités humaines où règne le vice. Il veut planer dans la poésie, voire une chorégraphie idéale, et parmi des sensations fortes et puissantes, dramatiques et sensationnelles, où les sentiments s’élèvent pour produire des contrastes dramatiques et presque épiques. Il ne veut rien de terre à terre ; il faut frapper le public ! [en français dans le texte]. Le public a soif de nouveauté. On a besoin de nouveautés musicales, essentiellement musicales… Etc. « Io volevo qualcosa di molto differente, non saprei cose, ma volovo navigare in altre acque. Tanto l’uno che l’altro non escano dall cerchio delle brutture umane, dove il vizio regna. Desiderano spaziare fra la poesia e magari la coregrafia ideale, oppure fra sensazione forti e grandi, drammatiche senszionali dove il sentimento si eleve […] produce attriti dramatici quasi epici ; insomma non desidero esser terra terra […] il faut frapper le public ! ci vuole qualcosa di insolito, sempre, in teatro il publico ha sete di novo – ci vogliano trovate musicali essentialmente musicali »…
→ Torre del Lago 9 avril 1903. Tosca ne touche pas Naples, mais elle a touché Pise. Puccini évoque sa jambe plâtrée [après son accident d’automobile] (« Tosca non attosca Napoli ma attoscò i Pisan ! […] il povero omo colla gamba paracarro »)…
→ Torre del Lago 12 mai. Longue lettre humoristique en vers (8 pages), sur la vie heureuse et fortunée de son ami, alors que lui se morfond dans sa convalescence (après son accident)… « Tu d’Efeso le rive / conosci a menadito […] Piangendo all’ora mia / giacendo in faccia al lago / son pien di leggiadria / ho riposato il mago / e il viso mio da Assiro / riprese il color buono / ma sol gamba stiro / m’è proibito il suono. / La trippa s’è involata / ho il corpo rassettato / ho la cappella alata / pronta a volar sul fato. […] Son triste e pensoloni ! / in letto bianco e nero / ho il veto sui coglioni / non suono più il salero ! »…
→ Milan 30 janvier 1904 (avant la création de Madama Butterfly à la Scala, le 17 février). Il remercie Clausetti de son télégramme, première annonce de succès, et espère que Butterfly y fera honneur devant le public souverain de mille oreilles plus ou moins longues (« Sperianno che Butterfly si faccia onore anche davanti al sovrano dalle mille orecchie (più o meno lunghe) »... Il aurait bien volontiers donné l’opéra à Naples ; ce sera pour une autre année…
→ Torre del Lago 19 mars 1907. Il est toujours à la recherche d’un livret, ayant décidé de ne pas faire La Femme et le Pantin. Il a songé à 3 sujets différents (3 actes) d’après GORKI pris dans Les Vagabonds et Dans la Steppe ; il en a trouvé deux, mais en cherche un troisième, dramatique et fort pour le final. Mais il craint maintenant que trois sujets différents joués par les mêmes artistes ruinent l’illusion de vérité. Mais il songe encore à Gorki qui doit se trouver à Capri, et aimerait que Matilde SERAO, qui a toujours été bonne pour lui, arrange un entretien avec Gorki…
→ Torre del Lago 7 avril, au sujet d’un projet d’opéra d’après GORKI. Il ne se soucie ni de Russie ni de Pologne (à éviter même, s’il ne traite pas avec Gorki). Il croit que du cerveau de ce grand artiste peut sortir la chose qu’il cherche : âme, vie, vibration, poésie, drame déchirant (la foule dans un tableau ou 2) : « Credo che dal cervello di questo artista posse uscire le cose che io domando e che cerco – anima vita vibrazione poesia dramma dechirante (Folla in un quadro o 2) »… Toutes les époques sont bonnes, sauf l’Orient et ses alentours qui nécessiteraient une musique à caractère local… Gênes 1er juillet. Annonce du prochain mariage de Fosca (fille de sa femme Elvira).
→ Milan 1er mars 1908. Envoi de 4 adresses d’éditeurs et marchands de musique à Buenos Aires pour l’opuscule de Clausetti sur Tristan.
→ Rome 16 mars, après avoir reçu le livret de Carlo Zangarini de La Fanciulla del West : il y a peu à en dire, mais il voit qu’il va y avoir beaucoup à retoucher et travailler ! (« molto ritocco e lavoro ! »)…
→ Chiatri 23 juin. Il est livré à l’ennui et au travail ; il a l’intestin perturbé depuis plus d’un mois. La Girl avance à petits pas (« La Girl fa piccoli passi ma avanzicchia »)…
Milan 25 décembre 1909. Vœux à l’ami très cher et fidèle, et à sa famille.
→ Sur l’Océan 1er janvier 1911 [après la création de La Fanciulla del West à New York le 10 décembre 1910]. Il est de retour, arrive le lendemain à Londres où il restera deux jours, puis rentrera à Milan. Le succès a été grand, et a continué en grandissant. Tout l’opéra a été très bien, fort, vigoureux et tendre. Le 1er acte est un peu long mais intéressant, peut-être un peu périlleux pour une première nerveuse, mais pas moyen de l’interrompre pour un applaudissement car il dure une heure cinq. Le 2e et le 3e filaient comme des autos à 80 à l’heure. « Tutto l’opera per me risulte benissimo, forte, gagliardo e dolce. Il I° atto è un po lungo ma interessante forse è pericoloso per un premiere nervosa non c’è mezzo di interromperelo con un applauso è dure un’ora e 5. Il II° e terzo filano come autos a 80 all’ora »... L’exécution musicale était magnifique et la mise en scène surprenante. CARUSO grand, DESTINN très bonne, Amato excellent. TOSCANINI immense et bon, un vrai ange. À la 3e on a dû refuser plus de mille personnes. En 4 représentations (dont la 3e à Philadelphie) 340.000 de recettes...
→ Torre del Lago 31 octobre. Il recommande d’envoyer un exemplaire de la Fanciulla aux journalistes…