Description
3 lettres autographes signées [à l'éditeur musical Antoine de Choudens]. S.d. — « Il est bien entendu... que quoi que vous décidiez, nos bonnes relations n'en seront pas atteintes ; je voudrais être en position de ne jamais élever ces débats d'argent qui me font horreur... Un jour viendra, certainement et prochainement, où mon courage et mon talent auront leur salaire, et alors vous pourrez compter sur un artiste consciencieux et un excellent ami pour votre petite cuisine d'édition. En attendant, je suis plongé dans un guano extrême, et je vous serai fort obligé de m'aider à en sortir. La somme que vous m'offrez est insuffisante, mon minimum est 1800 f... Si nous voulions répertorier nos comptes, rigoureusement, nous arriverions à un total un peu plus fort que je ne le croyais moi-même. Par exemple : ... la symphonie à 4 mains, 15 jours de travail, c'est-à-dire ce qu'aucun de vos amis ne vous ferait p[ou]r 200, id. à 2 mains 100, quant aux raccords, arrangements de Faust italien, de Philémon [les opéras Faust et Philémon et Baucis de Charles Gounod], correction d'épreuves à 2 f. par heure, cela monterait à beaucoup plus de 100, et je ne vous parle pas des Joyeuses commères [l'opéra d'Otto Nicolai, Les Joyeuses commères de Windsor] pour lesquelles j'ai écrit au moins 60 pages d'orchestre, ce qui semblerait peu payé au prix de 100... Je m'engage à tout, polkas, redowas, quadrilles, corrections d'épreuves, transcriptions signées, non signées, arrangements, dérangements, transpositions, et partitions pour flûtes, deux trombones, deux pistons, voire même deux pianos, je vous en donne ma parole – nous ferions une bonne affaire tous les deux... Je crois que vous accepterez, il n'est pas possible que je ne puisse pas vous être bon à 1800 f. par an... » (3 pp. 1/2 in-8).
— « Ci-joints 1° l'épreuve de Philémon, 2° la transcription de la Chanson de printemps... Mettez-moi de côté l'orchestre d'Ulysse, n° 6 chœur des porchers, n° 8 chœur des suivantes infidèles, n° 9 chœur des suivantes fidèles. Je choisirai 2 parmi les 3 chœurs. » (1 p. 1/4 in-16). Ces trois œuvres sont de Charles Gounod.
— « 1° Prologue : il vaudrait peut-être mieux attendre les répétitions. Car Gounod supprimera le chœur, en tout cas, sa coupure marquée [deux symboles tracés au crayon rouge] est excellente. C'est probablement celle que Gounod fera. 2° Dans la nuit. Chœur des amis, de qui ? Pourquoi ne mettez-vous pas chœur des amis de Roméo ? [Il s'agit de l'opéra de Charles Gounod Romeo et Juliette]... Je suis parfaitement découragé. Je laisse mes collaborateurs refaire leur traité – on aime mieux Déborah, Sardanapale, et Les Bleuets de l'usurier J[ules] Cohen que ma musique. Soit... La France est déplorable. On dirait, en vérité, que tout le monde s'entend pour me perdre. On s'apercevra peut-être, mais trop tard, que les admirations de convention et d'intérêt ne valent pas un examen attentif et intelligent... Si je crève d'ennui, de découragement, de rage et de faim un de ces matins, on aura peut-être l'idée de faire quelque-chose de La Jolie fille de Perth et d'Ivan. Si ces ouvrages ont jamais quelque succès, ce sera un enseignement inutile pour l'avenir, et on continuera comme par le passé, les admirations de coteries, etc., les les bénisseurs ont encore de beaux jours, les usuriers aussi... » (2 pp. in-8).