Lot n° 279

GIONO JEAN (1895-1970) — Sur Bernard BUFFET, manuscrit autographe signé — S.d., 2 pages in-4 à l'encre sur papier, écriture extrêmement serrée, titre en rouge biffé.

Estimation : 1 500 - 2 000 EUR
Adjudication : 1 600 €
Description
« [...] J'avoue que je suis quelquefois comme un personnage de Bernard Buffet. Il a surpris l'instant où l'esprit ne se fait plus chair, où la passion dévore tout, où il n'y a plus d'attitude; l'instant où le personnage n'est plus en représentation. Ce que d'aucuns appellent: triste, mais qui est l'expression d'une vérité pure et simple d'un fait, d'un état d'âme [...] J'ai du monde une vision qu'on pourrait dire sobre et élégante (ce qu'ont très bien compris les Japonais). Bernard Buffet respecte cette sobriété et cette élégance [...] Dans un de ses paysages de banlieue, avec un canal et un pont, c'est sous le pont qu'il place la petite tache de verdure que font les peupliers et les bouleaux dans la perspective du canal. Là, cette couleur évoque toute la profondeur du paysage, le calme des eaux avec une légèreté de touche comparable à la légèreté de touche de certains Corot [...] Elle est seule, et je crie au miracle car l'ardoise du toit de la maison style Exposition Universelle qui est à gauche, je n'ai besoin de personne (et surtout pas du peintre) pour en voir la couleur. Je n'ai besoin que de sa forme [...] J'en vois assez. Je jouis sans mélange de rapports où il m'est laissé la liberté de mettre moi-même la dose [...] J'ai eu cent fois envie de voler des tableaux de
Bernard Buffet. Il y a un port de La Rochelle où tout est exprimé par cette faculté de suggestion, par cet art élégant et sobre et qui sollicite le plus secret de mes sensations avec la plus extrême courtoisie [...] ».

Giono élargit son sujet au rapport de la création littéraire et artistique, évoquant également Chateaubriand, Hugo, Stendhal, Picasso, Renoir, Millet, les arts africains, précolombiens, etc.

Cet essai critique sur Bernard Buffet parut en préface du catalogue de l'exposition du peintre tenue à la galerie Lucien Blanc à Aix-en-Provence du 13 juillet au 13 août 1955, et réédité séparément en 1956 sous le titre Bernard Buffet chez Fernand Hazan dans sa collection «
Bibliothèque aldine des arts ».
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