Lot n° 138

COCTEAU JEAN

Estimation : 1 500 - 2 000 EUR
Adjudication : 1 500 €
Description
11 L.A.S., 2 MANUSCRITS autographes et un tapuscrit corrigé, 1957-1962; 19 pages formats divers, et 113 pages in-4, sous chemise cartonnée décorée par Cocteau aux crayons de couleurs.
Intéressant dossier concernant l'oratorio
Patmos.
Cocteau avait écrit le livret L'Apocalypse ou Patmos en 1952 pour le compositeur allemand Paul HINDEMITH, qui renonça finalement à le mettre en musique; Cocteau le confia ensuite au compositeur Yves
CLAOUÉ (1927-2001); Patmos fut créé le 3 mai 1962 dans la chapelle royale du château de Versailles, mais la partition semble avoir disparu. Le texte ne fut jamais imprimé; il a été reconstitué par David Gullentops.
* 11 L.A.S., 1957-1962, à Yves CLAOUÉ; 12 pages in-4 et in-8, en-têtes de Santo
Sospir, une lettre est écrite aux crayons de couleur; plus un télégramme. «Voilà pour Noël 1957 et le jour de l'an 1958 une soupe aux anges, fouillez, rangez, tâchez d'en faire q.q. chose. Une seule condition - ne jamais enchaîner un texte masculin sur un masculin
- féminin sur un féminin (rimes). À part cela faites à votre guise. C'est une expérience que je tente»... 9 avril 1958: «J'ai dû changer complètement le détail des textes de notre oratorio. À la relecture c'était une ébauche et ni pour moi ni pour toi Patmos ne pouvait rester aussi vague, aussi informe. Tu auras une bonne surprise - mais je te conseille de chercher tes thèmes et tes timbres sans écrire la moindre ligne mélodique définitive.
Actuellement le texte est fort embrouillé à lire»... 23 avril 1958: «Naturellement les musiques intermédiaires doivent jouer le premier rôle - et même un solo d'instrument peut alterner avec un solo vocal. Mettez sous forme de choeurs - de femmes et d'hommes
- ce qui vous semble légitime pour l'équilibre de votre oeuvre. Je vous laisse libre»... Mais la création est un échec, et l'oeuvre ne sera jamais publiée. 6 mai 1962: «Ne crois pas une minute que je t'en veuille pour notre
Titanic. C'était à moi de te dire ce qu'il fallait faire pour empêcher notre navire de couler.
Un oratorio n'est pas une symphonie. Un oratorio est un oratorio et l'orchestre doit souligner le texte par une suite de trouvailles et d'économies violentes. Tu l'es laissé tenter par une technique instrumentale où l'auditeur s'embrouille et ne cesse d'attendre un effet (par exemple le terrible coup de trompette de Bach où les murmures qui font que soudain la voix éclate comme un cri). En outre notre époque préfère les circonstances aux oeuvres [...] Bref, il te faudra beaucoup réfléchir avant de fixer cette oeuvre sur disque. Maurice [André Maurice, le récitant], que je croyais dur, implacable et noble a été mou. Je ne puis juger la cantatrice ni les choeurs n'ayant rien entendu de leurs chuchotements sages et contraires aux éclats de l'apocalypse.
Nous avons eu la même déception lors de la première d'OEdipus Rex. Seulement cela venait du latin et de choristes devant une salle qui attendait de la danse. Peu à peu les trouvailles multiples et bouclées ont fini par sortir et par atteindre les oreilles et les âmes [...] Il m'est souvent arrivé de craindre la même chose avec Arthur Honegger».
* Manuscrit autographe signé, Patmos; 3 pages in-8. Texte de présentation de Patmos.
«Comme l'impromptu l'oratorio est un genre.
Il exige la plus grande rigueur et un manque total de pittoresque. Comment cet oratorio de Patmos s'est-il fait ? Sans doute la plus large preuve de confiance dans le mystère de la jeunesse est-il à l'origine de cette considérable aventure. Patmos c'est l'île où Saint Jean mange “le livre” et ce livre lui donne des visions d'où nous viennent les énigmes de l'Apocalypse»...
* Tapuscrit de Patmos; 113 pages in-4 (pagination discontinue). Il porte de nombreuses corrections par Cocteau, certains passages étant entièrement récrits.
Il est abondamment annoté par Claoué pour l'écriture de sa partition.
* Manuscrit autographe; 4 pages in-4 (paginé 1-3 et 12). Partie du livret récrite par Cocteau.
* Divers documents concernant la création de l'oeuvre, dont une lettre de Claoué à Cocteau sur l'avancement du projet, et le programme de la création.
Bibliographie: David Gullentops, «Patmos, un oratorio inédit de Jean Cocteau et Yves
Claoué», in Jean Cocteau, textes et musique (Mardaga,2005).
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