MANUSCRIT autographe, « Tu règnes dans l’estat »…, [vers 1645 ?] ; 1 page in-fol. (portrait gravé joint).
Très rare sonnet contre MAZARIN.
[« Le sonnet contre Mazarin, présenté ici, illustre bien les fluctuations et les déceptions politiques de Maynard. En 1646, en tête de ses Œuvres, il avait placé une dédicace au chancelier Séguier, qu’il remplaça au cours de l’impression par une très flatteuse dédicace à Mazarin, nouveau maître de l’heure. Pellisson rapporte que le cardinal, qui ne se souciait guère de plaire aux gens de lettres, accorda néanmoins au poète une gratification de mille livres ; sans doute celui-ci espérait-il davantage : une charge d’État. Dix ans auparavant, étant à Rome, il avait décoché contre Richelieu un sonnet blessant : Par vos humeurs le monde est gouverné..., que celui-ci ne lui pardonna jamais. On connaît par ailleurs deux rondeaux de Maynard, tout à la louange de Mazarin. Peine perdue, et le poète se sera vengé par ce sonnet au parfum de chantage, qui fustige moins le cardinal, qu’il ne cherche à en soutirer une faveur promise et restée sans effet. Le sonnet satirique a été publié, avec un bref commentaire, par Jean-Pierre Lassalle dans le n° 18 (1992-1993) des Cahiers Maynard. Sans doute date-t-il de la dernière période de la vie du poète (1644-1645). Maynard, nous dit un de ses contemporains, était d’humeur caustique et se plaignait souvent des injustices de la fortune : il aura ainsi trouvé en Mazarin une de ses dernières cibles ». (Jean-Paul Goujon)]
« Tu regnes dans lestat du plus riche des Princes
Et ce poste est commode à ton avidité
Tes coffres sont remplis du sang de nos provinces
Et tes montagnes d’or font nostre pauvreté
L’on a veu par deux fois renaistre la France
Depuis que mon esprit ne regarde que toy,
Tu mas promis du cuer, accomplis ta promesse
Et las de me tromper agis de bonne foy
Haste ma recompence, ou la France va dire
Que tu ne cognois pas en ma façon descrire
Ce que nos Apollons y treuvent de charmant
Je vay guerir ta gloire avec mon esperance
Tes ingrates longueurs sont louvrage infamant
Et de ton avarice et de ton ignorance ».
Variante alternative au début du 8e vers, écrite dans l’interligne : « comme ta personne ».
Au verso, un sonnet d’une autre main : « Que tes soings diligens font souvent des couronnes »…
L’Académie française au fil des lettres, p. 26-27.