Cette collection sur l’Académie française, dont voici la deuxième partie,a été constituée par six générations des marquis de Flers. Commencée vers 1830 par Hyacinthe Pellevé de La Motte-Ango, marquis de Flers (1803-1866), elle fut considérablement et systématiquement développée par son fils Camille (1836-1893), historien de Louis-Philippe. À la mort de Camille, elle passa à son frère Raoul (1846-1907) ; celui-ci la transmit à son fils Robert de Flers (1872-1927), le célèbre auteur dramatique et rédacteur en chef du Figaro, qui entra lui-même à l’Académie Française en 1920. Elle fut poursuivie par son fils François (1902-1986), et parachevée par son petit-fils, le regretté Philippe de Flers (1927-2012), qui a presque doublé le nombre de pièces ; non content d’en combler les manques, ou de la compléter par des documents intéressants, il a élargi la collection aux non-académiciens, candidats malchanceux ou adversaires de l’institution. Cette collection, acquise en 2009 par Aristophil, avait fait l’objet en 2010 d’une publication anthologique richement illustrée chez Gallimard, sous la direction de Philippe de Flers et Thierry Bodin, avec la participation de plusieurs académiciens et spécialistes, L’Académie française au fil des lettres
LIEU et date de la vente Drouot-Richelieu Salle 9. Jeudi 21 novembre 2019 à 14h00. David NORDMANN, Commissaire-Priseur. Renseignements et contact : Marc GUYOT - Tél. : + 33 (0)1 78 91 10 Responsables de la vente : Marc GUYOT - Tél. : + 33 (0)1 78 91 10 11 - E-Mail : marc.guyot@ader-paris.fr - Assisté de Clémentine DUBOIS - E-Mail : clementine.dubois@ader-paris.fr & Lucie Faivre d'Arcier - lucie.faivre@ader-paris.fr - Tél. : + 33 (0) 1 78 91 10 14
Exposition Drouot salle 9 : Mardi 19 novembre de 11h à 18h - Mercredi 20 novembre de 11h à 18h - jeudi 21 novembre de 11h à 12h– Téléphone pendant l’exposition et la vente :+ 33 (0) 1 48 00 20 09
Expert : (Manuscrits et autographes) Monsieur Thierry BODIN, Syndicat français des des experts professionnels en œuvres d'arts - Tél :+ 33 (0)1 45 48 25 31 - E-Mail : lesautographes@wanadoo.fr
FLAUBERT Gustave (1821-1880). — L.A.S. « ton G. », Nuit de vendredi 2 h. [23 décembre 1853], à Louise COLET à Paris ; 4 pages in-4, enveloppe avec cachet de cire rouge (Louise Colet a noté deux vers au dos de l’enveloppe).
Estimation :12 000 - 15 000 €
Adjudication :932 €
Description
Très belle lettre sur l’écriture de Madame Bovary et le gueuloir, et évoquant vertement les amours de Louis Bouilhet.
« Il faut t’aimer pour t’écrire ce soir car je suis épuisé. J’ai un casque de fer sur le crane. Depuis 2 h de l’après-midi (sauf 25 minutes à peu près pour dîner) j’écris de la Bovary. Je suis à leur Baisade – en plein – au milieu. On sue et on a la gorge serrée. Voilà une des rares journées de ma vie que j’aie passés dans l’Illusion, complètement, & depuis un bout jusqu’à l’autre. Tantôt à six heures au moment où j’écrivais le mot attaque de nerfs j’étais si emporté, je gueulais si fort, et sentais si profondément ce que ma petite femme éprouvait, que j’ai eu peur moi-même d’en avoir une. Je me suis levé de ma table et j’ai ouvert la fenêtre pour me calmer. La tête me tournait. J’ai à présent de grandes douleurs dans les genoux, dans le dos et à la tête. Je suis comme un homme qui a trop foutu (pardon de l’expression) c’est-à-dire en une sorte de lassitude pleine d’enivrement. – Et puisque je suis dans l’amour il est bien juste que je ne m’endorme pas sans t’envoyer une caresse, un baiser, et toutes les pensées qui me restent.
Cela sera-t-il bon ? Je n’en sais rien. (Je me hâte un peu pour montrer à B. [Bouilhet] un ensemble quand il va venir.) Ce qu’il y a de sûr c’est que ça marche vivement depuis une huitaine. Que cela continue ! Car je suis fatigué de mes lenteurs ! Mais je redoute le réveil, les désillusions des pages recopiées ! N’importe, bien ou mal, c’est une délicieuse chose que d’écrire ! que de ne plus être soi mais de circuler dans toute la création dont on parle. Aujourd’hui par exemple homme et femme tout ensemble, amant et maîtresse à la fois, je me suis promené à cheval dans une forêt, par un après-midi d’automne, sous des feuilles jaunes, & j’étais les chevaux, les feuilles, le vent, les paroles qu’ils se disaient et le soleil rouge qui faisait s’entrefermer leurs paupières noyées d’amour.
Est-ce orgueil ? ou piété ? est-ce le débordement niais d’une satisfaction de soi-même exagérée, ou bien un vague et noble instinct de Religion, mais quand je rumine après les avoir subies, ces jouissances là, je serais tenté de faire une prière de remerciement au Bon Dieu si je savais qu’il pût m’entendre. – Qu’il soit donc béni pour ne pas m’avoir fait naître marchand de coton, vaudevilliste, homme d’esprit, etc. Chantons Apollon comme aux premiers jours ! aspirons à pleins poumons le grand air froid du Parnasse, frappons sur nos guitares & nos cymbales – & tournons comme des derviches dans l’éternel brouhaha des Formes et des Idées »…
Il attend avec impatience La Servante de Louise Colet : « Pour faire de la littérature étant femme, il faut avoir été passée dans l’eau du Styx »... Quant à Maxime DU CAMP, « il y a entre les hommes une sorte de pacte fraternel & tacite qui les oblige à être maquereaux les uns des autres » ; mais Flaubert ne veut pas renouer avec lui : « c’est un homme à ne pas voir, je crois. Cette locution que j’emploie ouvre la porte à toutes les hypothèses. Ce malheureux garçon est un de ces sujets auxquels je ne veux pas penser. Je l’aime encore au fond, mais il m’a tellement irrité, repoussé, nié, et fait de si odieuses crasses que c’est pour moi “comme s’il était déjà mort” ainsi que dit le duc Alphonse à Me Lucrezzia ».
Puis il évoque les amours de Louis BOUILHET avec « la Sylphide » [Edma Roger des Genettes] « qui, à ce qu’il paraît, a été fortement touchée (& branlée, peut-être ?). […] J’avais toujours jugé ladite une gaillarde chaude, – et je ne me suis pas trompé. Mais elle a l’air de mener ça bien, rondement, cavalièrement. Tant mieux. Cette femme est rouée. Elle connaît le monde, elle pourra ouvrir à B. des horizons nouveaux. Piètres horizons ! il est vrai, mais enfin ne faut-il pas connaître tous les appartemens du cœur et du corps social, depuis la cave jusqu’au grenier, – et même ne pas oublier les latrines – & surtout ne pas oublier les latrines ! il s’y élabore une chimie merveilleuse, il s’y fait des décompositions fécondantes. […] A-t-on compté tout ce qu’il faut de bassesses contemplées pour constituer une grandeur d’âme ? tout ce qu’il faut avoir avalé de miasmes écœurants, subi de chagrins, enduré de supplices pour écrire une bonne page. – Nous sommes cela nous autres, des vidangeurs et des jardiniers – nous tirons des putréfactions de l’humanité des délectations pour elle-même. Nous faisons pousser des bannettes de fleurs sur ses misères étalées. Le Fait se distille dans la Forme et monte en haut, comme un pur encens de l’Esprit vers l’Éternel, l’immuable, l’absolu, l’idéal »...
Correspondance (Pléiade), t. II, p. 483.
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