Lot n° 1227
Lot Suivant

TROTSKI Léon (1879-1940) Théoricien révolutionnaire et homme politique russe. L.S. «Leon Trotsky» avec 2 CORRECTIONS autographes, Coyoacán 6 mars 1938, [à la journaliste Henriette CELARIÉ] ; 4 pages in 4 dactylographiées et agrafées...

Estimation : 2 500 - 3 000 €
Adjudication : 15 600 €
Description
(petite fente au dernier feuillet).


Importante analyse politique de la situation en U.R.S.S. sous Staline et des procès de Moscou. Trotski donne une brève analyse de la situation et des méthodes de STALINE, se référant à son livre La Révolution trahie (Grasset 1936) :

«Il est bien difficile, Madame, d’exprimer en une brève formule les divergences irréconciliables qui existent entre la politique de STALINE et la mienne. […] Ma politique représente les intérêts des masses laborieuses, celles qui ont fait la révolution d’Octobre. La politique de Staline représente les intérêts de la bureaucratie, de cette nouvelle caste de parvenus qui domine et opprime le peuple». Les masses populaires haïssent autant qu’elles craignent cette bureaucratie, qui pour conserver son pouvoir illimité et ses privilèges étouffe «toute opposition, toute critique, toute expression de mécontentement. Mais comme elle ne peut pas dire au peuple que le crime de l’opposition consiste à demander plus de liberté, plus de bien-être pour les travailleurs […], elle doit attribuer aux opposants des crimes qui puissent apporter aux yeux du peuple une justification à la répression. Telle est l’origine des sensationnels procès de Moscou».
Ces procès sont l’aboutissement d’un travail de répression de l’opposition : «dès 1923-1924 la couche dirigeante a commencé à diffamer et à calomnier l’opposition en lui attribuant des buts contraires à ses fins réelles. Cette falsification systématique fut possible grâce au régime totalitaire qui permet la concentration du contrôle de la presse» par la classe dirigeante.
Peu à peu, «Staline arriva à empoisonner l’opinion publique et à imputer à l’opposition des visées et des méthodes inimaginables dans leur abomination, leur cruauté et leur absurdité. Après cette préparation, qui prit au moins dix ans, on est passé à la mise en scène des procès préparés dans les caves de la G.P.Ou.».
Et il renvoie la journaliste à son livre Les Crimes de Staline (Grasset 1938), qui donne une explication, «aussi bien politique que psychologique, des dérisions de justice, théâtrales, perfides et terribles à la fois, qui se succèdent à Moscou, surtout depuis 1934»… Il explique «l’unanimité avec laquelle les accusés se reconnaissent coupables», comparant les services socialistes à l’Inquisition, et il dénonce les tortures physiques et psychologiques :
« Les nerfs humains n’ont pas beaucoup changé depuis le Moyen-Age. Ils ne peuvent supporter une pression qui dépasse une certaine limite. S’agit-il de tortures physiques ? Pas dans le sens brutal du mot.
La technique de l’Inquisition s’est modernisé, mais en restant au fond la même» : isolement complet, interrogatoires ininterrompus de 24 heures «sous la lumière hypnotisante de puissants projecteurs. On arrête leur femme, leur mère, leurs enfants et on exige la confession comme rançon de la libération des otages», exécutions des plus résistants à reconnaître des crimes qu’ils n’ont pas commis, à titre d’exemple, etc. Ces procédés sont efficaces…
Quant à l’avenir de l’URSS : «Je peux dire ici seulement que le régime de Staline ne peut pas durer. Il se trouve dans une impasse historique. Les procès de Moscou ne sont que les convulsions de ce régime agonisant». Trotski évoque deux alternatives. Soit le renversement de Staline par des forces capitalistes, extérieures ou intérieures, ce qui serait la fin de la propriété nationalisée et de l’économie planifiée, pour laisser place au capitalisme : «Le régime politique serait le fascisme le plus brutal, pour dompter les masses passées par l’école de la Révolution». Soit le renversement de la bureaucratie par les masses populaires, pour établir une vraie démocratie «sur la base de la propriété socialisée et de l’économie planifiée». C’est pour cela que Trotski continue de se battre : «tous mes efforts sont orientés dans cette direction»
Partager