Description
♦ LE PREMIER LIVRE DE DOLET IMPRIMÉ PAR DOLET LUI MÊME.
► RARE BEL EXEMPLAIRE RELIÉ EN MAROQUIN VERT AU XVIIIe SIÈCLE AVEC UN TITRE EN LONG ÉDITION ORIGINALE In-8 (156 x 99mm).
Imprimé en italiques.
Très nombreuses et très belles initiales gravées
─ COLLATION : *4 a-p8 q4
─ CONTENU : *1r titre, *1v Symon finetius [Simon Finet]..., a2r Stephani Doleti in Tholosam oratio prima..., b4r I... oratio secunda, e6r Stephani doleti epistolarum liber primus, h4v liber secundus, k2v Amicorum epistolarum liber, m1r Stephani doleti carminum liber primus, o6v liber secundus.., q3r errata de deux pages, q4v devise de Dolet : Doletus. Durior est spectatae virtutis, quam incognitae conditio.
─ RELIURE DU XVIIIe SIÈCLE.
Maroquin vert, décor doré, filets en encadrement, dos long orné avec titraison verticale, tranches dorées
─ PROVENANCE :
Ex-libris humanistique sur le dernier feuillet : Johannes Hospes me habet- relié pour un amateur du XVIIIe siècle.
─ RARETÉ:
Relativement fréquent en bibliothèque ; rare sur le marché des ventes aux enchères : rien sur ABPC, un exemplaire en vélin moderne sur RBH en 1981 ; fichier Berès : un exemplaire en veau blond en 1980 (librairie Jammes)
Quelques très pâles rousseurs, infimes trous de vers dans la marge inférieure de quelques cahiers principalement p et q
En 1526, Étienne Dolet âgé de dix-sept ans se rend à Padoue. La mort de son maître et ami Simon de Villanova le conduit à accepter en 1530 le poste de secrétaire de Jean de Langeac, Évêque de Limoges et Ambassadeur de France à Venise, personnalité dont il sera question dans ce premier livre.
À son retour en France, vers 1531, Dolet étudie le droit et la jurisprudence à l'université de Toulouse en 1532. Mais il est impliqué, par son humeur turbulente, dans de violentes disputes à connotations religieuses entre groupes d'étudiants. Il est emprisonné et, malgré la protection de Jean de Pins, Ambassadeur de François Ier à Rome puis à Venise, évêque de Pamiers puis de Rieux, Dolet est finalement banni par un décret du parlement en 1534.
Dans ce premier livre rare sur le marché, Dolet publie d'abord deux discours contre la Toulouse superstitieuse, puis sa correspondance, divisée en trois parties, à différents grands personnages proches de lui (à Jean de Langeac, à Jean de Pins, à Guillaume Budé, au professeur de droit Jean de Boyssoné, au jeune helléniste et professeur de droit Arnoul Le Ferron, etc.). Il ajoute enfin deux livres de ses premières poésies latines intitulées Carmina.
Ce premier livre, Dolet le publie pour contrer les événements survenus à Toulouse. Car sur fond d'intenses développements de la Réforme en France, il s'était risqué dans les concours d'éloquence de l'Université à apparaître comme un défenseur de théories dites "hérétiques".
Le 31 mars 1532, l'ambiance avait été mauvaise à Toulouse. Jean de Boyssoné et plusieurs de ses élèves comme Jean de Caturce sont traduits devant les tribunaux. Caturce, qui refuse de se rétracter, est brûlé place du Salin.
En juin 1534, Dolet quitte Toulouse et retourne à Lyon. Il s'y installe chez Gryphe, premier imprimeur de la ville, "réceptacle des gens sçavans" comme l'écrit Du Verdier, ami de Jean de Boyssoné. Dolet, protégé par Gryphe, décide d'y imprimer un livre, un brûlot contre Toulouse.
À Gryphe, Dolet dédie son premier livre des Carmina.
L'imprimeur célèbre semble avoir conservé sa sympathie pour le poète pendant toute sa vie, mais "nul doute qu'il n'ait été vite fâché de son humeur capricieuse, de son intransigeance, de la puissance de son mépris, de ses prétentions à tout connaître" (Longeon, p. xxiv).
Gryphe s'est donc bien gardé de Dolet dès ce premier livre. Il ne met ni son nom ni sa marque typographique. En revanche, la première devise de Dolet fait son apparition à la fin du volume et elle apparaîtra sur "44 ouvrages des 70 portant devise finale" (Longeon, p. liij).
Simon Finet, "l'ami le plus intime de Dolet" selon Copley Christie, prend d'entrée le masque d'éditeur du mince ouvrage comme il écrit dès les premières pages :
"je me suis emparé du manuscrit des deux discours qu'il prononça à Toulouse... J'ai encore dérobé deux livres d'épîtres... j'ai recueilli deux livres de poésies latines" (Copley Christie, p. 176). Masque utile, car Dolet n'y va pas de main morte : "J'entends que les misérables qui ont mis ma vie en péril demeurent marqués du fer rouge de mes justes outrages". Il dénonce la "religion corrompue" et les "superstitions extravagantes" pratiquées dans une ville qui "se voue aux ridicules superstitions des Turcs. De quoi s'agit-il d'autre lorsque, pendant la sécheresse en été, quand on appelle la pluie qui ne vient pas, les troncs pourris de certaines statues sont transportés à travers la ville (...) tandis que des prêtres sacrificateurs marchent au devant en chantant des prières propritiatoires, comme s'ils s'adressaient à Orion et aux dieux".
Ces deux Orationes sont ainsi fort précieux. Ils représentent la seule source éclairant les premiers pas de la vie tumultueuse et dramatique d'Étienne Dolet. La rareté de cette édition et l'importance de son texte ont depuis longtemps su attirer le regard des amateurs de livres, comme celui du XVIIIe siècle, demeuré anonyme, qui a donné à cet exemplaire une élégante reliure de maroquin vert à titraison verticale.
─ RÉFÉRENCES : USTC 146784 - Brunet, II, 796 (qui cite deux exemplaires) - Longeon 1 - Copley Christie p. 491 - Adams D-768 - Baudrier t. VIII, p. 38-39