Lot n° 493

MAUPASSANT Guy de (1850-1893). DEUX MANUSCRITS autographes signés « Guy de Maupassant », Hautot père et fils et Le Rendez-vous, [1888-1889] ; 23 et 11 feuillets in-fol. en partie renmargés, le tout relié en un volume in-fol. (31 x 22 cm)...

Estimation : 30 000 - 40 000 €
Adjudication : 35 100 €
Description
maroquin vert, quatre filets d’encadrement sur les plats frappés au centre de l’ex-libris EGOHUGO en lettres dorées, cadre intérieur avec filets, pointillés et dentelle dorée, dos à nerfs orné, tranches dorées (Lortic fils ; le plat inf. légèrement éraflé).

Important recueil de deux nouvelles de La Main gauche.

Ces deux contes ont été écrits, probablement à la fin de 1888, pour le journal L’Écho de Paris qui les publia, le 5 janvier 1889 pour Hautot père et fils, et pour Le Rendez-vous le 23 février 1889, jour même de la parution du recueil La Main gauche (Ollendorff, 1889), où ces deux contes sont repris.

Les manuscrits ont servi pour l’impression et ont été découpés en bandes pour répartir la copie entre les typographes ; ils ont été ensuite soigneusement remontés et fort habilement doublés au dos d’un papier vélin fort, et la plupart renmargés pour être mis au format plus grand des 13 premiers feuillets.

Hautot père et fils s’est d’abord intitulé Le fils Auteau ; le titre originel a été biffé en tête du manuscrit, et remplacé par le titre définitif, et ce n’est qu’à la page 13 que Maupassant opte pour la graphie « Hautot », corrigeant alors dans les douze premières pages de son manuscrit « Auteau » en « Hautot ».

Le manuscrit est écrit à l’encre brune au recto de 23 feuillets de papier chamois, les 13 premiers d’un format 30,5 x 20,5 cm, les suivants un peu plus petits (28,5 x 19,5 cm). Il présente de nombreuses ratures et corrections, ainsi que des additions interlinéaires ou dans les marges.

La nouvelle commence par une brève mais très vivante évocation d’un départ pour la chasse, le jour de l’ouverture, devant un manoir normand. Hautot père est victime d’un accident de chasse ; avant de mourir, il recommande à son fils César une demoiselle à Rouen ; c’est sa maîtresse, dont il a eu un fils, et chez qui il allait déjeuner chaque jeudi. César va apprendre la triste nouvelle à Mlle Donet, découvre la situation… et reviendra chaque jeudi comme son père.

« On observe ici un riche entrecroisement de thèmes obsédants : la religion, la solitude, la famille. On y retrouve des images familières : le lacis des petites rues de Rouen, les chasses dans la campagne normande. De tout ce dont il avait déjà tiré divers contes, Maupassant fait un riche amalgame. Ce vers quoi s’oriente le récit, c’est la puissance irrésistible de la fatalité. Le même sujet sera traité de façon dramatique dans Le Champ d’oliviers. Ici, le ton est celui du scepticisme serein : on oscille entre le drame bourgeois et la comédie larmoyante. Tout ce qu’il y a de profondément grave et sérieux dans le récit est tempéré par un sourire : dès le titre même qui, rétrospectivement, apparaît comme une véritable raison sociale. Cette transmission d’un “bien” du père au fils est marquée par le rôle que joue un objet symbolique : la pipe. Il s’agit bien d’une affaire dans laquelle le fils est appelé à succéder au père, d’un recommencement inéluctable dont la fatalité était inscrite en abyme dans le texte grâce au récit plusieurs fois réitéré par César » (Louis Forestier).

Le manuscrit du Rendez-vous est écrit à l’encre noire au recto de 11 feuillets de papier vélin blanc (28,5 x 19,5 cm). Il présente de nombreuses ratures et corrections, ainsi que des additions interlinéaires ou dans les marges.
Une Parisienne élégante, épouse d’un agent de change, va à un rendez-vous galant chez son bel amant le vicomte de Martelet ; en route, elle réalise qu’elle s’ennuie dans cette liaison répétitive, et elle finit par détester « un homme qui, depuis deux ans, l’avait forcée plus de cent vingt fois à se rhabiller sans femme de chambre » ; elle rencontre alors le charmant baron de Grimbal qui l’invite à voir ses « collections japonaises » ; en route, elle s’arrête pour envoyer un télégramme à Martelet.
On notera qu’une petite correction a modifié le nom de l’héroïne, Mme Haggan s’appelant d’abord Haggin puis Haggen. Une autre montre une hésitation au sujet de l’escalier de Martelet qui paraît à Mme Haggan « haut comme la tour [Eiffel terminée biffé] [Notre-Dame biffé] Saint-Jacques ». Et, quand elle arrive chez Martelet, ce dernier s’agenouille devant elle : « elle croyait voir M. Delaunay jouant pour la cent [quarantième biffé] vingtième fois ce cinquième acte d’une pièce à succès ».

─ Provenance :
• Ancienne collection Georges Victor HUGO avec son ex-libris frappé sur les plats EGOHUGO (le fer du doreur reprenant une inscription de son grand-père).
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