Lot n° 181

LESPINASSE JULIE DE (1732-1776). 2 L.A., [1775 ?], à Jean-Baptiste SUARD ; 2 pages in-4 avec adresse et cachet de cire rouge aux armes, et 1 page in-8 avec adresse.

Estimation : 1 300 - 1 500 €
Adjudication : 1 560 €
Description
Belle lettre où s’épanche son cœur sensible.

• Dimanche au soir.
« J’étois avec Mde GEOFFRIN lorsque j’ai reçu votre lettre. Je n’ai pu vous repondre. Elle ma dit qu’on avoit conté cette plaisanterie à St Ouen et j’en suis fachée, si lon vous en demande la suite dites que vous l’ignorés, il faut que cela reste là ; dites la même chose à Mrs St Arnaud et Morellet ; toute plaisanterie qui sort de la societé où elle a été faite devient ou une platitude, ou une mechanceté, laissons donc là cela, et repetons sans cesse avec Mde Geoffrin, voila qui est bien, mais n’en parlons plus. Je vais écrire un mot à M. de MARMONTEL et à M. de Vaines et puis je ne plaisanterai plus, je ne ferai plus de gayté car en verité c’est forcer nature ». Elle s’inquiète des problèmes de Suard : « Au nom de dieu interessés vous à ce qui vous regarde, je crains que vous n’y apportiés une grande negligence et cette pensée me fait souvent mal ; je vous desirerois du bonheur si je croyois qu’il y en eut dans cette triste vie, mais je me souviens quil peut y avoir du calme et du repos et je voudrois que le vôtre ne fut pas troublé par les inconvenients attaché à la mauvaise fortune. Ce n’est pas pour moi que je crains la pauvreté, elle ne me paroit que la privation d’un avantage et d’un bonheur, mais pour mes amis je la sens comme la douleur et j’ai souvent besoin de me distraire de cette pensée, elle penetre mon ame d’une tristesse qui l’abat, parce que je sens mon impuissance d’agir ; mon dieu à quoi sert donc d’aimer, je vous aime de toute mon ame et cela ne vous sera jamais bon à rien, je ne vous ferai jamais eprouver que le plaisir qu’une ame sensible et honete, comme la votre, goute à adoucir les maux d’une creature souffrante, malheureuse et qui seroit tombée dans le decouragement si votre amitié n’étoit venue à son secours »…

• Ce mardi. « Vous etes bien aimable de repondre a ma pensée. Dans linstant même je donois ordre qu’on allat savoir si vous eties de retour, je ne pouvois pas atendre à diner à m’en assurer ».
TURGOT « s’est conduit a merveille il sest mis a la place de Mr de Vaines et cest que bien peu de gens savent faire. Mais je crois que le cœur de Mr de Vaines reste bien oprimé ».
Elle va aller au Salon, et aimerait y rencontrer Suard. Elle termine par ces mots :
« J’ai souffert ces jours ci et beaucoup ».
Partager