Lot n° 166

LESPINASSE JULIE DE (1732-1776). L.A., samedi [11 décembre 1762], à TURGOT, intendant de Limoges ; 3 pages in-4, adresse avec cachet de cire rouge.

Estimation : 1 200 - 1 500 €
Adjudication : 1 560 €
Description
Belle lettre littéraire et politique.

La pièce de Michel de CHABANON (Éponine) n’a pas été un succès :
« Ses amis l’ont bien mal servi en annonçant sa tragedie avec tant d’emphase ; une grande partie des spectateurs etoient resolu de la trouver mauvaise, tous les petits auteurs avoient formé une cabale, et il a été jugé avec rigueur au point qu’il a cru sa piece tombée et vouloit la retirer ».

Julie de Lespinasse fait la critique détaillée de l’ouvrage.
Chabanon a apporté des retouches, mais il y eut peu de monde à la seconde représentation, et la pièce ne durera pas longtemps.

Après avoir parlé de la nomination de M. de Condom [LOMÉNIE DE BRIENNE] comme Archevêque de Toulouse, elle en vient au discours du Duc de NIVERNOIS au Roi d’Angleterre à l’occasion de la paix (fin de la Guerre de Sept Ans) :
« ses amis vouloient d’abord la vanter comme un chef d’œuvre, mais le public leur a imposé silence en trouvant cette harangue entortillée sans dignité et sans simplicité, quelque gens vont plus loin et trouvent que c’est l’ouvrage d’un ecolier de rhetorique qui ne seroit pas même competent dans sa classe ».

On est mécontent à Versailles, et «M. le Duc de Choiseuil qui ne l’aime pas en est bien aise ». Puis elle cite et commente la lettre de FRÉDÉRIC II de Prusse au Prince Ferdinand au sujet de la paix :
« Hé bien mon cher Prince, voila donc les deux grands monarques qui ont fait la paix ; il n’y a plus que les polissons qui fassent la guerre. Quel polisson que ce Prince là. On dit que toute l’Allemagne tremble actuellement et quil a deja levé des contributions immenses jusqu’en Franconie. M. d’ALEMBERT est enragé contre les Anglois qui a ce quil pretend ont abandoné indescemment les interets du Roi de Prusse, il m’a voulu prouver cela par les preliminaires imprimé, mais je n’y ai rien entendu ».

Elle termine sa lettre en évoquant « un nombre infini de mariages qui je pense ne vous interesseraient point du tout », et en informant que M. de Chabanon a finalement retiré sa pièce.
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