Lot n° 156

VOLTAIRE (1694-1778) - L.S. «V» avec date et 3 lignes autographes, «a Ferney par Geneve» 12 novembre [1760], au Comte de TRESSAN ; la lettre est écrite par son secrétaire Jean-Louis WAGNIÈRE ; 3 pages in-4.

Estimation : 1 500 / 2 000
Adjudication : Invendu
Description
Signed letter, signed «V», date and 3 autograph lines, «A Ferney par Geneve», 12 November [1760], addressed to the Count ofTRESSAN ; the letter is written by his secretary Jean-Louis WAGNIÈRE ;
3 pages in-4.

Belle lettre au nouveau gouverneur de Bitche, parlant de ses ouvrages historiques.
«Respectable et aimable gouverneur de la Lorraine allemande, et de mes sentiments ; mon coeur a bien des choses à vous dire ; mais permettez qu'une autre main que la mienne les écrive, parce que je suis un peu malingre. Premièrement, ne convenez vous pas qu'il vaut mieux être gouverneur de Bitch, que de présider à une Académie quelconque ? Ne convenez vous pas aussi qu'il vaut mieux être honnête homme et aimable, qu'hipocrite et insolent ?
[...] Je m'imagine pour mon bonheur que vous êtes très heureux, [...] loin des sots, des fripons, et des cabales. Vous ne trouverez peut être pas à Bitch beaucoup de philosophes, [...] mais en récompense, vous aurez tout le temps de cultiver votre beau genie» ; il partagera son temps entreLunéville, Bitche, et Toul, et pourra faire venir près de lui «des artistes et des gens de mérite qui contribueront aux agréments de votre vie»...
Il a su par Frère SAINT-LAMBERT que «le Roy STANISLAS n'était pas trop content, que je préférasse le Législateur Pierre au grand soldat Charles [après l'Histoire de Charles XII, Roi de Suede, Voltaire a publié l'Histoire de l'empire de Russie sous Pierre le Grand] : j'ai fait réponse, que je ne pouvais m'empêcher en conscience de préférer celui qui bâtit des villes à celui qui les détruit, et que ce n'est pas ma faute si S.M. Polonaise elle même a fait plus de bien à la Lorraine par sa bienfaisance, que Charles 12 n'a fait de mal àSuède par son opiniatreté. Les Russes donnant des loix dans Berlin, et empêchant que les Autrichiens ne fissent du désordre, prouvent ce que valait Pierre»...Il a joué «le Vieillard sur notre petit théâtre, avec notre petite troupe, et je l'ai fait d'après nature. Je suis enchaîné d'ailleurs au char de Cérès, comme à celui d'Apollon ; je suis masson, laboureur, vigneron, jardinier. [...] je n'ai pas un moment à moi, et je ne croirais pas vivre, si je vivais autrement ; ce n'est qu'en s'occupant qu'on existe»...Il termine en ajoutant de sa main :

«Recevez le tendre et respectueux témoignage de tous les sentiments qui m'attachent à vous pour toutte ma vie ; le Suisse V.»Correspondance (Pléiade), t. VI, p. 81.
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