Lot n° 150
Sélection Bibliorare

VOLTAIRE (1694-1778) - L.A.S. «V», Cirey 21 octobre [1736], au Comte de TRESSAN ; 3 pages et demie in-4.

Estimation : 8 000 / 10 000
Adjudication : 10 400 €
Description
Signed autograph letter, signed «V», Cirey 21 October [1736], addressed to the Count of TRESSAN,
3 pages and a half, in-4.

Belle lettre précédée d'un poème.
La lettre commence par un poème de quatre sizains, faisant l'éloge de Tressan tout en raillant Jean-Baptiste ROUSSEAU.

«Tandis qu'aux fanges du parnasse
d'une main criminelle et lasse,
Roussau va cherchant des poisons,
ta main dlicate et légère
cueille aux campagnes de citere
des fleurs dignes de tes chansons. [...]

Loin ce rimeur atrabilaire
ce cinique, ce plagiaire
qui dans ses efforts odieux
fait servir à la calomnie
à la rage, à l'ignominie
le langage sacré des dieux.

Sans doute les premiers poetes
Inspirez ainsi que vous l'êtes
étoient des dieux ou des amants.
Tout a changé tout degenere
et dans l'art d'écrire, et de plaire
mais vous êtes des premiers temps.

Ah monsieur votre charmante epitre, vos vers qui comme vous respirent les graces meritoient une autre reponse.
Mais s'il falloit vous envoyer des vers dignes de vous, je ne vous repondrais jamais.
Vous me donnez en tout des exemples que je suis bien loin de suivre. Je fais mes efforts. Mais malheur à qui fait des efforts.
Votre souvenir votre amitié pour moy, enchantent mon coeur autant que vos vers eveilleroient mon imagination. J'ose compter sur votre amitié. Il ny a point de bonheur qui n'augmente par votre commerce.
Pourquoy faut il que je sois privé de ce commerce delicieux.
Ah si votre muse daignoit avoir pour moy autant de bienveillance que de coqueterie, si vous daigniez m'écrire quelquefois, me parler de vos plaisirs, de vos succes dans le monde, de tout ce qui vous interesse, que je défierois les Rousseau et les Desfontaines de troubler ma félicité».
Il lui envoie son poème Le Mondain :
«c'étoit à vous à le faire. J'y decris une petite vie assez jolie. Mais que celle qu'on mene avec vous est au dessus !»...

Correspondance (Pléiade), t. I, p. 858.
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