Lot n° 225

Charles MAURRAS. 35 L.A.S., [1929-1930, à sa maîtresse Marie-Reine Debrand] ; 110 pages in-12 (transcriptions jointes). {CR} Correspondance à sa maîtresse, secrétaire d’Anatole de Monzie. {CR} Les deux amants s’écrivent très...

Estimation : 700 / 800
Adjudication : 1 000 €
Description
régulièrement, parfois plusieurs fois par semaine, si bien que leurs courriers souvent se croisent. Mme Debrand semble reprocher le manque de visites, le peu de nouvelles et les « cachotteries » d’un Maurras « débordé de dossiers », submergé par une « incroyable accumulation de besognes », qui trouve tout juste le temps de rendre ses articles dans les délais.… Envahie de doutes, il doit fréquemment la rassurer. Ainsi, en mars 1929, lui répond-il : « Je vous en prie, n’ayez pas d’inquiétudes, cela ne vaut pas mieux que le doute. Ni l’un ni l’autre ne me rendront furieux, mais je l’avoue j’en suis attristé profondément, et ralenti, et payez-moi de mots, aggravé, alourdi, de ce poids d’une dure vie ! Donc, ni fureur ni rien qui y ressemble » … La plupart des lettres fixent ou décalent leurs rendez-vous amoureux. Maurras lui-même déplore que ses missives ne soient que « des chiffres, des heures, des questions précises […]. Pardon (je devrais vous demander un pardon général, une espèce d’indulgence plénière papale) pardon pour le passé cela va sans dire, mais voyez quant au présent et à l’avenir ce tremblement qui n’est que trop naturel ! »… Les deux amants s’inquiètent beaucoup respectivement pour la santé l’un de l’autre. En août 1929 : « La semaine dernière votre silence m’avait tout à fait démoralisé, et ce n’est pas absolument de ma faute si je vous avais fait ainsi une si triste figure ! Pardonnez-le moi avec quantité d’autres choses dont je ne suis pas très fier, et je vous en prie, continuez à me donner des nouvelles régulières »… Puis, en septembre 1929 : « Les humidités de la Vézère ne sont pas aussi favorables à votre physique qu’à votre moral, et cela m’a inquiété beaucoup. Beaucoup plus que ne mériterait de vous inquiéter la petite différence entre un pas et un plus dénichée dans ma lettre »… En octobre 1929, il lui rappelle : « Ne croyez pas que j’aie une baguette miraculeuse qui rende extensible le temps matériel ! »… Il est d’ailleurs si occupé qu’il travaille le soir de Noël : « Hier soir tout le monde réveillonnait autour de moi, étant presque seul à l’imprimerie »… « Il n’y a aucun moyen d’être libre ce soir. J’ai conseil tout l’après-midi, la page littéraire à revoir, une liste d’audiences et de visites à n’en plus finir, et je ne sais même pas s’il me sera possible de répondre à une invitation à dîner ! C’est un jour de bourrage fou »… Les deux amants échangent également des documents, des notes et quelques propos politiques : « Ce n’est pas pour vous influencer, mais il faut lire le journal ce matin, à cause du monstrueux présent des dieux ! Vous avez raison, ils ne peuvent pas discuter sur ce terrain-là, ils sont obligés de l’éviter ou de s’y faire toucher à chaque reprise ! ça, c’est ce que seuls, nous pouvons dire parce que seuls, nous pouvons le faire. J’ai tort de dire nous pour aller plus vite ; car, si j’avais le malheur d’être républicain, je serais aussi ridiculement impuissant que les camarades. C’est le principe, la position qui fait tout, dans cette affaire. Ça ne dispense pas d’activité ni d’énergie mais ça les fertilise »… « Soyez sûre que je ne vous crois en aucune façon, illusionnée ! Ce qui m’effraie le plus c’est combien le plan où se tiennent les acteurs qui nous mènent est éloigné du plan du réel. Ils raisonnent par rapport à eux-mêmes, à des situations qui elles-mêmes sont un mensonge, une trahison de la vérité et de l’intérêt public. Mais je comprends aussi qu’il faut accepter cette triste domination si l’on veut agir sur elle, comme vous agissez ! »…
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