Lot n° 81

[ROMAN NOIR]. [SALVERTE (Eusèbe de)]. Un pot sans couvercle, et rien dedans, ou les Mystères du souterrain de la rue de la lune, histoire merveilleuse et véritable, traduite du français en langue vulgaire; par Louis Randol. Paris, B. Logerot et...

Estimation : 600 - 800 €
Adjudication : 2 757 €
Description
chez les marchands de nouveautés, an VII.

In-8 de 1 frontispice, VIII, 160 pp.: veau fauve moucheté, dos lisse orné, pièce de titre de maroquin vert, triple filet doré encadrant les plats, coupes filetées or, tranches marbrées (reliure de l' époque).
Édition originale rare.
Elle est illustrée d'un curieux frontispice gravé sur cuivre directement inspiré du frontispice du tome III de l'édition française de L'Italien d'Ann Radcliffe (cf. nº 79).
Piquante parodie de la vogue du roman noir, singulièrement des “radcliffades”.
“L'histoire merveilleuse et véritable traduite du français en langue vulgaire” est bâtie à l'aide de matériaux empruntés aux récits d'Ann Radcliffe: l'auteur, Eusèbe de Salverte alias Louis Randol, rend hommage à la romancière anglaise en préface, non sans perfidie: “Heureuse Anne Radcliffe! [...] Puisse, pour prix de tes rians travaux, ton ame doucereuse errer éternellement dans ces asyles si chers à ton génie! Puisse-t-elle éternellement y mêler ses délicieux hurlemens aux cris lamentables des oiseaux de nuit, aux gémissemens des captifs, aux râlemens des mourans, aux sifflemens aigus des vents, au sombre bruissement des vagues, aux sourds roulemens du tonnerre, aux éclatans craquemens de la foudre, aux échos lugubres et prolongés des cavernes retentissantes! ” (pp. 11-12).

Auteur de romans, de tragédies, d'un Éloge de Denis Diderot et d'un Tableau littéraire de la France au XVIIIe siècle, condamné à mort pour sa participation aux insurrections du 13 vendémiaire, Eusèbe de Salverte (1771- 1839) fut acquitté. Dans Un pot sans couvercle, “il parodie le roman noir à l'aide des procédés traditionnels de l'anti-roman: manuscrit illisible par endroits, interventions du lecteur dans l'histoire, préface incorporée au récit, comme dans Tristam Shandy et le Voyage sentimental, le tout agrémenté de polissonneries dans le style shandéen. Il est d'autant plus piquant de constater que le Tableau littéraire de Salverte contient une condamnation sévère de Sterne, que l'auteur avait pourtant copieusement imité dans Un pot sans couvercle” (Recueil de préfaces de romans du XVIIIe siècle, II, p. 391).

Plaisant exemplaire en reliure du temps. Accidents aux coiffes et aux coins.
(•Lévy, Le Roman gothique anglais, pp. 476 et 512.
• Monglond IV, 1133: le seul exemplaire cité est celui de la bibliothèque de Bagnères-de-Bigorre.).
Partager