Lot n° 363

FLAUBERT, Gustave. Le Candidat. Comédie en quatre actes représentée sur le théâtre du Vaudeville les 11, 12, 13 et 14 mars 1874. Paris, Charpentier et Cie, 1874.

Estimation : 2 000 / 3 000 €
Adjudication : 5 263 €
Description
In-12 (162 x 123 mm) de (3) ff., 165 pp. : demi-veau glacé havane à coins, dos à nerfs orné, pièces de titre de veau marron, couvertures et dos conservés, non rogné (reliure moderne).
Édition originale dont il n’a pas été tiré de grand papier.

Seule pièce que Flaubert fit représenter : elle met en scène un candidat à la députation,
M. Rousselin, prêt à toutes les bassesses pour être élu. Incertain dans ses convictions,
ses amitiés et son programme, l’apprenti politicien critique la Révolution devant
les aristocrates, célèbre ses bienfaits devant les ouvriers et, pour être en vogue et s’assurer la faveur de tous, déverse des chapelets de mots en “-isme”.
Le Candidat fut, au dire de Flaubert lui-même, “le four le plus carabiné” de sa carrière.
La pièce n’eut que quatre représentations au Vaudeville en mars 1874.
Un feuillet monté en tête porte la mention au tampon “Vente Flaubert” ; au verso, ces seuls mots autographes : “Armillus ? / Nom de l’Antéchrist” – sans doute une note destinée à la première Éducation sentimentale (1849). La présence de ce feuillet a fait croire que l’exemplaire était celui de l’écrivain ; rien, cependant, ne le prouve.
André Maurois, qui posséda le volume, fit relier en tête une lettre et deux billets autographes signés de Gustave Flaubert se rapportant aux répétitions du Candidat ; elles furent toutes adressées à son ami Edmond Laporte en 1873-1874.
Chaque lettre porte le cachet avec les initiales du destinataire.

• “Nuit de vendredi” [5 décembre 1873], 1 p. in-8 :
Mon cher ami, tantôt à 7 h. du soir j’ai reçu un télégramme de Carvalho ainsi conçu : “Avez-vous fini ? Venez. Commençons immédiatement répétitions.” Donc, j’ai fait mon paquet en toute hâte et ne pourrai point aller un de ces jours déjeuner chez vous ! [...] Je vous embrasse. A bientôt n’est-ce pas ?
Votre Gve Flaubert”.

• “Lundi soir” [2 mars 1874], 1 p. in-16, non signée :
Mon cher ami, c’est samedi qu’a lieu ma 1ère. La dernière répétition générale est vendredi à 1 h. Je compte vous voir chez moi samedi matin [...].

• [6 mars] 1874, 1 p. in-12 :
Ma 1ère n’a lieu que mercredi 11. La répétition g[énéra]le mardi.
C’est à g[ran]d peine que j’ai pu vous faire inscrire p[ou]r deux strapontins. Je crève de rage. Gve.

Soit trois lettres adressées à un homme politique à l’opposé du candidat Rousselin brocardé par Flaubert. Fils de coiffeur contraint d’abandonner prématurément ses études, directeur d’une manufacture de dentelles à Grand-Couronne, Edmond Laporte (1832-1906) fut élu conseiller municipal ; il démissionna pour ne pas devoir prêter serment à l’empereur Napoléon III.
“Farouchement républicain, il s’enrôle en 1870 dans les francs-tireurs parisiens. Conseiller d’arrondissement puis conseiller général jusqu’en 1898, il s’occupe principalement des questions d’éducation et de santé publique, sur lesquelles il avait des vues progressistes”
(Jean-Benoît Guinot).

Il fit la connaissance de Flaubert en 1865 par l’intermédiaire de Jules Duplan. Ils devaient se brouiller définitivement en 1879, après que Laporte eut refusé d’offrir sa maison en garantie dans les affaires d’Ernest Commanville. Auparavant, il avait joué un rôle très important dans la rédaction de Bouvard et Pécuchet, pour laquelle il effectua des voyages de repérage et fournit de nombreux renseignements, ainsi que pour Trois Contes. Les manuscrits du Dictionnaire des idées reçues, auquel il collabora également, sont en partie de sa main.
En remerciement, Laporte se vit offrir le manuscrit autographe de Trois contes, accompagné d’une superbe dédicace.
Plaisant exemplaire à toutes marges, en dépit de quelques piqûres.

Provenance : André Maurois, avec note autographe indiquant que les trois lettres ont été achetées par lui lors des ventes de la collection Andrieux (Drouot, 7-9 avril 1938 et 9 juin 1947).
- Simone André Maurois (ex-libris).- J. Le Roy, avec ex-libris (pas au catalogue de 1931).

Les trois lettres ont été publiées dans la Correspondance de Flaubert (Pléiade, IV, pp. 750, 774-775 et 776).- Guinot, Dictionnaire
Flaubert, pp. 399-400.
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