Lot n° 452

LAFORGUE, Jules. Les Complaintes. Paris, Léon Vanier, 1885.

Estimation : 30 000 / 40 000 €
Adjudication : 37 596 €
Description
In-12 (186 x 116 mm) de 145 pp., (1) f. : cartonnage japonisant à la Bradel orné d’un décor de feuillages au pochoir, pièce de titre noire coupée en “lame de guillotine” (reliure de l’époque).

Édition originale, tirée à 511 exemplaires aux frais de l’auteur (pas de grand papier).

Premier recueil de Jules Laforgue (1860-1887).

“La critique contemporaine accueillit plutôt ironiquement ce produit bizarre de l’école décadente.
Mais le recueil devait prendre sa revanche à l’étranger d’abord, où il fut le maître incontesté du mouvement poétique ‘crépusculaire’ italien vers 1900, et l’inspirateur de deux des plus grands poètes anglo-saxons du XXe siècle, T.S. Eliot et Ezra Pound” (En français dans le texte, n° 313 : notice de Pierre-Olivier Walzer).

Envoi autographe signé, le plus beau connu pour cet ouvrage :
à M. Joris Karl Huÿsmans
Permettez-moi, Monsieur, de
vous envoyer ce volume –
(“A qui essayer de l’envoyer, sinon
“à lui ?” - comme aurait pu
se dire, en son orgueil et misanthropie
apocalyptiques, Rusbroek
l’Admirable.)
Jules Laforgue

Correction autographe page 53 : le mot Angle a été remplacé par Ange.
Lecteur auprès de l’Impératrice à la cour d’Allemagne, Jules Laforgue
réclama à l’éditeur Vanier une douzaine d’exemplaires pour ses
envois personnalisés.
Il avait admiré En ménage et l’envoi fait allusion à la citation du mystique
flamand figurant sur la couverture d’À rebours. Jean-Jacques Lefrère cite la lettre de remerciement de Huysmans : “Oui, je voulais vous dire que ce livre des Complaintes m’a très insidieusement requis, avec ses horizons fuyant dans des brumes, ses épithètes suggestives ouvrant des échappées sur lesquelles on rêve, ses verbes fabriqués curieusement, ses vers bizarrement rimés où les pluriels
baisent le singulier.

Il y a des pièces […] qui sont véritablement de bonnes berceuses d’aux-delà [sic], de subtiles musiciennes qui vous hantent, une fois le livre fermé. Et je n’ai pas parlé de la pièce en prose, – le véritable impressionnisme du poème en prose, - pleine de trouvailles.” (Lefrère, Jules Laforgue, 2005, pp. 383-384.)
On observera que si l’admirateur savait tourner le compliment épistolaire, il n’en fut pas moins “très insidieusement requis” par une écriture d’orfèvre jusqu’à l’outrance qui n’est jamais que celle de sa plume.

CHARMANT EXEMPLAIRE RELIÉ POUR HUYMANS relié pour Huysmans à la mode japonisante du temps.

Le romancier fit exécuter à la même époque pour lui-même trois autres spécimens décorés de manière identique, chacun recouvrant des exemplaires de dilection : les éditions originales des Poèmes saturniens et de La Bonne Chanson de Verlaine, ainsi que l’exemplaire de L’Eve future que lui avait offert Villiers de L’Isle-Adam. Elles furent exécutées en 1886 ou peu après. (Le premier et le troisième ont figuré dans la bibliothèque de Marie-Hélène et Eric Buffetaud ; le deuxième était dans la collection de Renaud Gillet).

Provenance : Joris-Karl Huysmans, avec envoi.- Docteur Lucien-Graux, avec ex-libris (cat. III, 1957, n° 35).

Clouzot, p. 175 : “Rare en reliure d’époque de bonne qualité.”
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