Lot n° 331

ERNST (Max). Lettre autographe signée Max, à Joë Bousquet, datée New York. 29 Juin [19]45.

Estimation : 1 000 / 1 500 €
Adjudication : 3 500 €
Description
2 pages in-4, chemise demi-maroquin noir.
Très intéressante lettre d'exil.
Très épris de peinture, Joë Bousquet avait une grande admiration, doublée d'une profonde amitié, pour Max Ernst, dont il possédera, dans sa chambre de Carcassonne, jusqu'à 28 tableaux. En 1937, l'écrivain avait collaboré au numéro spécial des Cahiers d'Art consacré au peintre. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il aida financièrement son ami, qui, sujet allemand, connaissait d'angoissantes difficultés, et fut même un temps interné dans un camp. Cette lettre - qui semble inédite - est précisément la première que Bousquet reçut d'Amérique de son ami, qui s'était exilé à New York en 1941. Elle est importante pour situer Max Ernst pendant sa période américaine, aussi bien dans sa production que dans sa vie privée (mariage avec le peintre surréaliste Dorothea Tanning).

J'ai dû lutter un bon moment avec l'émotion quand, hier matin, j'ai trouvé ta lettre dans la boîte (la première venant de la France depuis 1941) et de la lire d'un trait n'était pas chose facile. Il n'a pas cessé de parler de lui avec ses amis d'exil, dont Yves Tanguy (qui te vénère et qui est le seul, je crois, à te connaître personnellement)… J'apprends par ta lettre que Bellmer est sorti indemne de la bourrasque… Veux-tu dire à Bellmer que Julian Levy est toujours disposé à faire une exposition de ses dessins, gouaches etc. Il précise cependant : Les chances à vendre sont assez bonnes quoique une énorme vague d'abstractivisme déferle avec "this country" en ce moment et une certaine hostilité contre tout ce qui est apparenté au "surréalisme" se fasse sentir. Ceci, bien entendu, à la suite de l'activité louche de Dalí. Il donne ensuite de ses nouvelles : Il est vrai que j'ai pris femme ici, Dorothea Tanning de son nom de jeune fille. Belle, intelligente, calme, douée, très douée pour la peinture, ayant le sens de la grandeur. Tu la rencontreras un jour. Elle viendra avec moi, après un an… Aux Etats-Unis, il travaille beaucoup : Ceci est contraire à la légende qui veut que tout artiste qui arrive ici devienne automatiquement impuissant. J'ai eu des expositions et aussi du "succès". J'ai pas mal voyagé et j'ai été très impressionné par la grandeur des paysages, spécialement de l'Arizona où j'ai passé l'été 1943 avec Dorothea… Il donne l'adresse d'Yves Tanguy, qui serait enchanté si tu voulais lui écrire. Il fait des tableaux magnifiques…, et annonce enfin l'envoi de photos de tableaux.
Partager