Description
chiffrés de 1 à 143 pour le Cahier noir] :
maroquin janséniste aubergine, dos à nerfs, coupes filetées or, doublures de maroquin vert ornées, en
encadrement, d'un filet doré et de deux listels mosaïqués de maroquin émeraude, gardes de soie
verte, tranches dorées (Vermorel).
Précieux manuscrit autographe complet du premier livre d'André Gide.
Bien que dépourvu de titre, il offre l'intégralité du texte des Cahiers d'André Walter, prêt pour
l'impression, tel qu'il fut établi par Gide à l'intention de l'imprimeur Deslis, à Tours.
Le manuscrit présente plusieurs passages rayés et quelques corrections. Le principal personnage
féminin de cette autobiographie déguisée, Emmanuèle, porte encore ici le prénom de la future épouse
d'André Gide, Madeleine : le nouveau prénom a cependant été indiqué au crayon noir, en surcharge,
sur quelques feuillets.
On a relié au début du volume le manuscrit autographe de Pierre Louÿs, signé des initiales P.C.
(Pierre Chrysis), de la fameuse Notice imprimée en tête de l'édition originale (3 feuillets in-4,
repliés, à l'encre violette).
“Quand Gide, à l'âge de vingt et un ans, écrivit ses Cahiers d'André Walter, ses relations avec Pierre
Louÿs étaient encore assez bonnes pour qu'il lui demandât de se prêter à une petite comédie.
Gide voulait faire passer André Walter pour un jeune romantique dont la raison avait sombré et
qui était mort avant d'avoir pu publier ses Cahiers. Pierre Louÿs (…) se chargea donc de présenter
cette pseudo-oeuvre posthume au public. Mais cette préface ne fut maintenue qu'en tête de la
première édition, publiée par la Librairie Perrin. Par la suite, elle fut supprimée” (Bibliothèque
nationale, André Gide, 1970, n° 123.- Voir aussi la longue notice de Pascal de Sadeleer sur un autre
manuscrit de la Notice, in Bibliothèque littéraire R. Moureau et M. de Bellefroid , 9 et 10 décembre 2004,
Pierre Bergé & Associés, n° 794).
On trouve à la fin du volume trois grandes enveloppes de papier bleu, avec marques postales,
portant trois adresses soigneusement calligraphiées par Pierre Louÿs : celle de l'improbable André
Walter, “chez Mr André Gide, à la Roque-Beynard [sic], par Cambremer (Calvados)” ; celle de Gide
(“Uzès, Gard”) ; et enfin celle de Maurice Quillot, à Paris, arborant, à la manière d'un testament,
quatre grands sceaux à la cire rouge et noire. Ces trois enveloppes, qui contenaient peut-être le
manuscrit des Cahiers et de la Notice, étaient sans doute destinées à rendre plus crédible la petite
supercherie littéraire.
Les Cahiers d'André Walter furent mis en vente le 27 février 1891. L'édition Perrin déplut à Gide, qui
la jugeait incorrecte et en fit envoyer l'essentiel au pilon. Quelques dizaines d'exemplaires de
presse échappèrent à la destruction, mais ils furent le plus souvent négligés en raison de l'absence
de notoriété de l'auteur. Quant au tirage de tête, il n'en subsiste qu'un exemplaire sur papier de
Chine et deux sur Japon. Un exemplaire de cette édition originale, découvert par hasard, séduisit
Maurice Barrès qui fit faire à Gide son entrée dans le monde littéraire, le présentant notamment à
Mallarmé. Une édition dite “de luxe” annoncée dans l'originale fut effectivement publiée, mais à la
Librairie de l'Art indépendant, à qui Gide avait parallèlement confié la publication des Cahiers.
Manuscrit exceptionnel, d'un grand intérêt littéraire : il marque les débuts d'André Gide,
le futur “Contemporain capital”.
Dos de la reliure uniformément passé.