Lot n° 169

Jacques MALLET DU PAN (1749-1800) journaliste politique suisse et agent royaliste. L.A.S., Genève 3 mai 1782, à Élie-Salomon-François Reverdil, assesseur baillival à Nyon ; 1 page et demie in-4, adresse. Belle lettre politique, parlant de la...

Estimation : 300 / 400
Adjudication : 450 €
Description
révolution à Genève, de la pratique de la torture, et du juriste et philosophe Servan. « Les scènes anarchiques qui se succèdent ici depuis trois semaines, en m’enlevant la liberté d’esprit, m’ont privé de l’honneur de vous répondre. […] Le suffrage des hommes de vôtre mérite est un encouragement, et une ressource contre le dégoût inséparable d’un travail de ce genre, fait au milieu de toutes les impertinences populaires de la démocratie. On manque ici d’émulation et de secours. Il faut de la force pour écrire l’histoire de l’Europe au milieu de gens absorbés dans le tracas des brochures, et passant leur vie à faire ou à essuyer alternativement des libelles et des prises d’armes »... Il remercie des éclaircissements et des exemples que Reverdil lui a fournis : ceux qu’il a interrogés dans le pays de Vaud lui ont représenté la torture comme « totalement inusitée. Sans doute il vaudrait mieux qu’on l’abolît ; mais la douceur de vôtre justice criminelle corrige puissamment les vices de vôtre jurisprudence ; et l’esprit du gouvernement plutôt faible que cruel est un préservatif »... Servan a exagéré à ce propos. « Plein d’estime pour les talens de ce Magistrat, sa philosophie me donne de l’humeur. Nos réformateurs à sentence, ont fait, à mon avis, un mal affreux, en effrayant les gouvernemens par des systèmes excessifs, et en les fesant adopter par l’opinion. Les Français surtout, toujours mécontens du dégré de liberté qu’ils voyent ailleurs, écrivent sur la Législation par entousiasme ; et sont persuadés qu’avec de l’esprit on ferait fort bien une paire de souliers. Leurs livres ont naturalisé dans toutes les têtes une effervescence, que n’a pas peu contribué à nos malheurs. Leurs Auteurs egarés d’abord par des idées de perfection, et par toutes les chimères de la liberté des Philosophes, ont rempli tous les esprits de leurs sophismes ; après quoi, ils n’ont pas eu grand’peine à remplir tous les cœurs de leurs passions »... Il félicite Reverdil d’habiter un pays où personne n’a le droit de compromettre impunément la sûreté publique. « Il règne ici un degré de perversité politique si profond, que je désespère d’aucune guérison »...
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