Lot n° 197

George Sand (1804-1876). L.A.S. « George Sand », Paris 22 avril 1848, [à son amie Eliza Ashurst] ; 4 pages in-8 à son petit chiffre gothique (un peu salie à la dernière page). Très belle lettre inédite sur la révolution de 1848 et son...

Estimation : 4000 / 5000
Adjudication : Invendu
Description
journal L ^ ^ [La femme de lettres anglaise Eliza Ashurst (1813-1850) était une amie de Giuseppe Mazzini ; elle traduisit en anglais plusieurs œuvres de George Sand.] Elle envoie son journal à son « amie et sœur », qu’elle remercie de ses « témoignages d’amitié » et « des nouvelles de notre héros italien » [Mazzini]. Quant à La Cause du Peuple : « La crise politique et financière est arrivée à ce point ici, que ma situation personnelle est devenue très pauvre. Cela m’est absolument égal quant à moi, et je n’entends pas, en faisant la Cause du peuple, y trouver le moindre moyen d’existence. Je regrette seulement de n’avoir pas quelques milliers de francs pour la lancer dans le public. Un ami m’a avancé 3000^ qui me servent à faire les frais. 1000f de plus me serviraient à faire les annonces ou à user de quelque autre moyen plus populaire de publicité, et Mazzini m’a dit que vous me les offriez. Mais, avant de les accepter, je veux vous dire la situation de l’affaire. Ce journal ne peut plaire à la bourgeoisie ennemie de la république, et n’aura aucun succès, aucun produit de ce côté-là. Avant qu’il aille au peuple, qui est plongé dans la misère, il faut se résigner à servir le journal à peu près gratis pendant trois mois. Au bout de ce tems, si les clubs s’abonnent l’affaire pourra marcher d’elle-même, faire encore ses frais, ou arriver à des profits. Mais il m’est impossible de prévoir si la situation matérielle de la France me permettra de continuer cette publication, et si les petits sacrifices de mes amis ne seront pas perdus. Je n’ai pas besoin de vous dire que ma volonté est de les rembourser, mais je ne peux pas garantir que cela me sera possible avant un certain tems, car nul de nous en France, parmi ceux qui ont cru de leur devoir de ne rien mettre en réserve pour les mauvais jours, ne peut dire s’il aura de quoi diner le mois prochain. Donc, pour conclure, si vous êtes riche, ou si vous êtes, pour l’offrir votre aide, plusieurs personnes pouvant risquer un sacrifice sans porter atteinte à leur existence, envoyez-moi 1000f Ils serviront du moins à répandre quelques idées que jecrois utiles pour le peuple. Si vous êtes pauvre et si le sacrifice est trop onéreux pour plusieurs personnes, ne le faites pas, car il pourrait être matériellement perdu. Vous devez être étonnée d’apprendre combien la France est pauvre en ce moment-ci. Ne vous en affectez pas, elle est riche d’idées et de sentimens, et cette misère où je me trouve jetée avec le peuple est le tems le plus doux de ma vie. Je n’ai pas à me reprocher de m’être mise d’avance en mesure de m’en préserver. J’ai vécu au jour le jour, gagnant et donnant. Le peuple est gai comme moi. Dans ses fêtes patriotiques, il est à jeun et il chante. Quel peuple ! Mon amie, je voudrais que vous les vissiez ; c’est le plus beau spectacle que l’histoire ait jamais offert. [.] Si je ne puis continuer d’écrire, j’irai causer dans les ateliers et dans les cabarets, car ici il y a autant à apprendre du peuple qu’à lui enseigner »..
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