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du 1
er
février 1897 : « M. Francis Jammes – ses amis assurent qu’il a du génie, et qu’il n’est pas fou ». Il compte 9 quatrains, et
est accompagné de l’enveloppe d’envoi à son ami Raymond Bonheur à Magny-les-Hameaux, avec cachet postal d’Orthez le 8
février 1897.
« On m’éreinte dans le
Musée des Familles
,
moi qui chante les anciens
magazines
et les rires charmants des jeunes filles
qui le lisaient à l’ombre des charmilles »...
120.
Francis JAMMES
. 12 L.A.S., 1898-1912, à son ami Raymond Bonheur à Magny-les-Hameaux ; 10 pages in-fol.
et 21 pages in-8, la plupart avec enveloppe (une lettre incomplète de la fin, 3 enveloppes supplémentaires).
1.800/2.000
Très belle correspondance amicale et littéraire adressée au musicien-poète Raymond Bonheur (1856-1934), l’ami
d’Albert Samain qui mourut chez lui à Magny-les-Hameaux près de Chevreuse.
[Orthez 6 mai 1898]
. Il apprend par Van Bever que son livre [
De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir
] vient de paraître
mais il ne l’a lui-même pas encore reçu. « J’écris à Samain pour mettre encore à contribution son inépuisable bonté ». Il prie
Bonheur de passer au Mercure retirer les exemplaires qui doivent revenir à Eugène Carrière, Octave Mirbeau ainsi qu’à
lui…
[2 novembre 1900].
Il a été contacté par le jeune Bocquet de Lille au sujet d’une souscription pour un buste en mémoire
d’Albert Samain. Il engage Bonheur à venir à Orthez : « la douceur d’automne, ici, conviendrait à la convalescence d’âme où
vous entrerez bientôt. La mort des plus aimés se fait sentit peu à peu moins cruellement, en ce sens que c’est comme si nous
pressentions qu’il a gagné le milieu de la forêt »…
[24] février 1901
. Il le remercie pour sa lettre : « Combien vous pénétrez
dans mon âme. Pour moi votre opinion prime toutes les autres. Il y a dans la sympathie que vous me donnez, une chose plus
haute et qui m’est plus sensible que l’admiration qui l’accompagne – il y a une amitié que vous inspire la compréhension de
mon être intime »… Il évoque le titre de son prochain recueil qu’il annonce comme
Poésie
en tête du
Deuil des Primevères
, et
le conseil de Bonheur de revenir à l’ancien titre :
Et c’est ça qui s’appelle la vie
, qu’il se décide à utiliser comme épigraphe [ce
sera finalement
Le Triomphe de la vie
] ; l’Élégie à Samain va ouvrira le recueil…
1
er
juin 1901
. « Quel sacré métier que celui de
poète ! Me voici, depuis des jours, à ce sujet, dans une angoisse qu’il faut bien que je confie à quelqu’un. Et c’est à vous. Je suis
tordu par l’indécision où je suis de publier
Poésie
ou pas », dont la parution est programmée pour octobre. Ce n’est pas l’audace
qui lui fait défaut : « Voici le mois de l’année où je produis le plus et le mieux car, il est vraiment bizarre que je mûrisse comme
les plantes, à une époque déterminée : un peu avant la semaille du maïs jusqu’à sa récolte. Or, je fais en ce moment une œuvre si
belle, si étendue, si pure, si parfaite que je juge en tremblant toute l’imperfection de
Poésie
. Vous en lirez le début à
L’Ermitage
[
Jean de Noarrieu
]. Me voici donc troublé, angoissé. Et mon angoisse s’augmente, mon trouble s’augmente de la sérénité de
l’œuvre nouvelle que je sens peser en moi. Je souffre »… Il a hésité à se confier à lui : « Vous du moins, vous accepterez sans
observations, sans récriminations, sensible à d’analogues scrupules, la détermination que je vais prendre. Il ne faut point que
Poésie
paraisse ». Il charge Bonheur de l’annoncer à Vallette, de récupérer son manuscrit au Mercure, et d’expliquer à ses amis
(dont Gide) cette décision « dont je ne veux point qu’ils me parlent » […] Je ne veux pas une remarque à ce sujet, ni un regret,
ni même une approbation »…
18 octobre 1904
. Il a été plongé dans la neurasthénie… « Je travaille. […] j’ai fait un très important poème
Le Poète et
sa femme
». Il vient d’écrire une préface pour le prochain livre de Colette Willy [
Dialogues de bêtes
], et un article intitulé
Vieille France
. Je reprendrai aussi mes notes philosophiques (titre provisoire) que vous aimez. Gide aime passionnément »...
[28 août 1905]
. « Que je pense à vous durant ce jour où j’écris une œuvre qui plus qu’aucune, et au-delà de tout ce que vous
avez lu de moi, fera frémir votre cœur. Mon ami, mon cher ami, c’est à
vous
que je songeais pour entendre les 4 premières
pages. C’est Claudel qui les a entendues. Il dit qu’il n’est point d’expression pour dire leur beauté, que ce n’est plus du ressort
de la critique »…
30 mars 1906
. Il a appris la mort d’Eugène Carrière, et déplore que certaines personnes malveillantes aient
profité « des angoisses où la situation précaire des siens devait tenir Carrière pour le “gagner”. Les pions qui l’ont entouré
vont se servir de ce génie et le brandir comme un épouvantail dans les champs de la maçonnerie. Carrière était catholique
d’instinct […] J’écris des choses si belles depuis peu de jours qu’il me semble que je vais renaître »…
5 avril 1906
. Il ne peut
répondre à sa dernière lettre, trop cruelle ; il avait une grande affection pour lui. Il lui renouvelle malgré tout l’expression de
son respect « puisque vous ne croyez plus à ma tendresse »… Il lui fait promettre de ne pas avoir de paroles amères à son sujet
« quand
le monde
apprendra que c’est fini entre nous » et s’engage à faire de même. Cette nouvelle épreuve lui confirme que
« la mort possède de belles et calmes contrées ». Bonheur le rend responsable de ce qui l’a ému : « Je crois encore que Carrière
a subi des influences qui, peu à peu, et parce qu’elles lui furent dévouées, l’ont séduit. Ces influences, à peu d’exception près,
ne représentent qu’un seul état d’esprit, terrible à mon sens parce qu’il proclame l’arrêt de la Vie. Je crois encore que Carrière,
servi par un autre milieu et d’autres circonstances se fût différemment et plus naturellement développé. Ce m’est une chose
pénible que des hommes comme lui meurent ainsi et qu’ils ne laissent à certains, autour d’eux, que l’espoir d’une survivance
diffuse »…
Burgos 22 mai 1907
. Il pense à lui : « Si j’avais à choisir ici un compagnon, ce serait vous. Gide fut trop intelligent un jour
que je lui écrivais avoir voyagé avec un jeune homme qui lui ressemblait. Cela le vexa. Pour vous, mon ami, ma grande joie a été
hier, dans un très misérable monastère, de faire connaissance avec un franciscain expulsé qui vous ressemblait »…Il n’a confié
à personne qu’il écrivait
Soledad
: « Il y a des années que je la rêve. Il semble qu’elle vienne aujourd’hui »…
Orthez 13 mai
1911
. Il travaille beaucoup. « Ma
sorte de gloire
fait assez de tumulte autour des
Géorgiques
». Il annonce la parution prochaine
des 3
e
et 4
e
chants… Il entend parler de la musique de son ami en des termes élogieux : « Il y a là le symptôme d’une gloire
dont jusqu’ici l’on a été pour vous trop avare »…
27 décembre 1911
. Vœux pour la nouvelle année. Il continue à travailler à ses
chants : « Il y a beaucoup de mauvais vouloir à mon endroit de la part de quelques-uns – mais combien la compréhension de
… /…