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4 décembre. « La foire de Constance nous a apporté quelques mauvais petits peignes. Mme Salvage n’ose te les acheter de peur qu’on
ne les trouve affreux à Paris. […] Mme Salvage en femme économe pour ta bourse ne veut pas acheter ce qu’elle trouve horrible et ce
qu’elle dit courir les boulevards de Paris ». Elle est allée à Constance pour la noce de Mlle Macaire, et elle va y voir ce soir deux vaude-
villes. « Demain le ménage Wurtemberg me donnera une soirée. J’ai donné un dîner de noce. […] J’ai fait le portrait de la Comtesse, je
fais celui du Comte. Tous les deux m’ont beaucoup parlé de toi je te dirai même en passant que la femme m’a dit que son mari vantoit
beaucoup trop tes beaux yeux. […] Ils m’ont pris en grande tendresse et viennent très souvent me voir. C’est un aimable ménage »...
Elle raconte la représentation des vaudevilles : « On s’apprêtait à rire et chacun s’est amusé »…
29 décembre. Vœux de bonne année. « Nous lisons tes petites pièces tous les soirs et cela nous cause un grand plaisir on écoute avec le
plus grand intérêt et voilà enfn ce qui a eu du succès ici »...
178.
HORTENSE DE BEAUHARNAIS
. L.A.S. « Hortense », [Arenenberg] 17 janvier 1835 ; 6 pages in-8 à son chiffre.
600/800
Longue lettre sur ses
M
ÉMOIRES
et sur Madame Campan.
« Lorsque j’ai quitté la France je me croyais morte pour le monde […] mais loin d’en être oubliée, il n’est sorte de publications mal-
veillantes ou sottes dont moi et ma famille nous n’ayons été l’objet, je les ai méprisé c’étoit des libellistes qui écrivoient. J’avois encore
le bonheur de posséder des amis malheureux comme moi et dont la voix tôt ou tard devoit nous défendre, du moins je le pensois, mais
lorsqu’au lieu de trouver des cœurs amis sur lesquels je comptois, un oubli complet a été le résultat de leur réhabilitation sociale, lorsque les
historiens impartiaux qui écrivent déjà notre histoire en puisant les matériaux dans les libelles, seuls documens existants sur nous, j’ai cru
de mon devoir, pour moi comme pour les miens, de rendre publiques toutes les vérités que je pouvois posséder. On avoit eu l’impudence
d’aller jusqu’à composer des lettres de ma mère, j’ai fait paraître les siennes à moi et celles de l’Empereur à elle, on a composé des mémoires
sur moi, malgré mon aversion pour me placer en scène, j’ai fait paroître un volume écrit par moi qui doit arrêter toute autre publication
mensongère, mon but a donc été rempli, et jamais je ne fais attention aux petits détails quand une idée que je crois importante m’occupe
à réaliser, ainsi on aura trouvé les lettres de l’Empereur insignifantes, l’homme qui se montre sensible et bon importoit peu à bien des
gens, on y cherchoit de la politique et l’attente aura été déçue. Mon livre aura été critiqué par tous les partis. Je le sais, je m’y attendois,
peu m’importe, on n’en composera plus sur moi et l’histoire me prendra comme je suis, comme je me montre et non comme des passions
ennemis me fesoient. Madame Campan s’est trouvée absolument dans la même position que moi. Elle étoit essentiellement attaquée pour
avoir trahi Marie-Antoinette. Ses mémoires en avoient fait justice ; mais on l’attaquoit encore pour son peu de moralité, pour n’élever que
des femmes frivoles, sans principes, sans religion et je laisserai même aux libellistes d’ajouter qu’elle les élevoit pour la cour d’un Sultan.
Mme Campan a par ses diverses positions été utile à bien du monde, elle a fait sans doute bien des ingrats car elle si occupée du bonheur
des autres, depuis sa mort, pas une seule voix ne s’est élevée pour la défendre de tant d’indignes accusations. […] Je possédois dans les
lettres de Mme Campan la meilleure défense qu’elle put avoir, je les ai fait paroître, qu’importe pour elle si les conseils qu’elle donnoit
n’ont pas été suivis, si les unions qu’elle prédisoit heureuses ont été malheureuses et que cela fasse sourire quelques agréables de salon,
qu’importe si elle avoit des parents dans l’infortune, nous l’étions tous alors, et sans l’Empereur beaucoup de nous le seroit encore. […]
il reste dans l’opinion de chaque être impartial, justement en voyant tous ces détails insignifants de famille, que ces lettres sont vraies,
que la morale, les purs sentimens, la religion qui s’y trouvent prêchés sont ceux de l’auteur et tant pis pour celles qui n’ont pas suivis ses
préceptes, ils n’en sont pas moins les siens. Chaque fois que je voyois Mme Campan attaquée, je voulois faire paroître ses lettres, la seule
raison qui me retenoit, c’étoit l’affection trop fatteuse qu’elle me montroit, et pour qu’on ne dise pas qu’elle me gâtoit trop, je devenois
craintive à la défendre ». C’est le littérateur Buchon qui a réussi à la persuader à publier ces lettres en réponse aux détracteurs de Mme
Campan. Hortense a cependant supprimé des lettres les détails choquants. Quant à Églé, « la seule de ses nièces dont l’histoire parlera,
elle l’a peint d’habitude douce, spirituelle, sensible et s’élevant dans un moment terrible par son désespoir, par la manière dont elle remplit
ses devoirs d’épouse et de mère à la hauteur de son malheur, certainement il ne restera que cet éloge au public qui s’inquiette peu si l’on
vend une terre ou si on l’a gardé ; mais je le répète les détails inévitables sur une chose insignifante montre la vérité du reste ». Elle n’a pas
cherché le scandale. « La chose marquante des lettres de Madame Campan, c’est la suite d’affection, de conseils, toujours bons, tendres,
moraux, et qui la montrant pendant 25 années de sa vie font juger du temps qui les ont précédés »… Elle ne voulait pas que le public pût
penser qu’on lui cachait des choses scandaleuses : « j’étois bien tenté de faire disparoître les éloges qu’elle me donne ; mais on m’a fait
sentir que la tendresse maternelle qui les dicte se comprend si bien ; et comme, au moment du malheur, ils sont sans restriction, ils lui font
trop d’honneur pour que j’aye pu l’exiger ». Elle aurait cependant voulu supprimer « l’explication d’avarice donnée à la reine Marie-An-
toinette », mais Buchon a refusé cette suppression… Les quelques petits détails de famille n’enlèvent rien « à l’effet avantageux que cette
publication a déjà produite en faveur de Mme Campan »…
Voir la reproduction.
179.
HORTENSE DE BEAUHARNAIS
. 2 L.A., [Arenenberg] février-mars 1835, à « ma Maréchale Ney princesse de la Moskowa » ;
3 pages in-8 chaque, adresses avec cachets postaux.
400/600
12 février
. Le baron de Wessemberg, « homme fort distingué et dont l’opinion en Allemagne a grand un poids », a été très content
des lettres de Mme Campan. Ellke ne renonce pas à son petit voyage, mais l’a retardé à cause du « mal de gorge que Louis a attrapé
en revenant le soir dans mon char à beus après avoir dansé chez M. de Rudi, au lieu de se soigner il est toujours sorti au froid, il s’est
échauffé en patinant, enfn c’étoit devenu comme un mal chronique et les médecins ont dit que cela deviendroit dangereux s’il ne
se guérissoit à l’instant, il est donc établi dans notre couvent de femmes, ne prend pas l’air et se soigne. Enfn cela va déjà mieux,
mais nous ne pourrons voyager que vers la fn du mois »… Elle recommande à Églé de traiter son mal de dents avec « de l’éther et du
quinquina pour que la douleur ne revienne pas, j’ai guéri Mlle Masuyer et le bijoutier qui malgré leurs dents arrachées souffroient le
lendemain d’une autre côté le fait est qu’ils n’ont plus de douleur ; et moi qui n’ai pas dans ce moment une seule dent gâtée, quand je
suis revenu de ma course à Sigmaringen j’avois à la joue, à la tempe des douleurs si vives que mon quinquina a seul entièrement ôté
[…] C’est moi qui fais la lecture le soir pendant une heure, on m’écoute très bien, ainsi c’est beaucoup et mes yeux n’en sont pas trop
fatigués jusqu’à présent »… Puis à propos d’une lettre insérée dans les journaux et controversée : « ce n’est pas moi qu’on trompe sur
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