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bénéÀcier elle-même de la générosité de Madame GeoͿrin, celle-ci l’a\ant aidée à installer son propre salon après sa
rupture avec la marquise du DeͿand.
D’A
LEMBERT VANTA
LES MÉRITES DE CE
BRILLANT MORCEAU D
IMITATION
,
dans une lettre à Jean-Baptiste Suard, le trouvant
« charmant et meilleur que beaucoup de ceux que M. de La Fresna\ a traduits » (la première version française du
Voyage sentimental
, par Joseph-Pierre Frenais, avait paru en 1769).
Deux chapitres du
Supplément
de mademoiselle de Lespinasse, dont celui-ci, Àrent l’objet d’une publication, d’abord
dans les
Œuvres posthumes
de d’Alembert (1799, volume II, o ils sont numérotés ;V et ;VI), puis dans l’édition
originale des
Lettres
de mademoiselle de Lespinasse (1809, volume II).
M
ANUSCRIT
PORTANT
PLUSIEURS
PASSAGES CORRIGÉS DE
LA MAIN DE D
’A
LEMBERT
:
celui-ci propose des solutions simpliÀées
et élégantes à des formulations parfois embrouillées, et apporte des corrections de langage et de st\le. Dans la
transcription ci-dessous, sont indiqués en italiques les passages de la main de mademoiselle de Lespinasse, et en
romains ceux de la main de d’Alembert :
«
... – Tu as raison, mon cher Trim, je laisserai parler d’amusement mon frère Shandi et je me contenterai d’avoir du plaisir à
sentir mon âme
émue des maux de nos amis.
– Oui, reprit Trim, ce sont tous les malheureux et nous et nous n’en manquerons jamais...
Ô mon cher oncle Tobi, je n’ai
pas l’âme aussi bonne, aussi douce que toi ; cependant, je l’avouerai
, je n’écoute avec intérêt que ce qui parle à mon âme ;
je ne louai jamais un trait d’esprit, mais j’ai toujours une larme à donner au récit d’une bonne action, ou a un mouvement de
sensibilité,
ce sont
les seules touches qui répondent à mon
cœur
...
Hé, qu’il fut doucement et délicieusement émut par ce qui se passa après dvner...
...
Je dirai à tous mes compatriotes, allés en France, allés voir Mde G... vous verrés la bienfaisance, la bonté, vous verrés ces
vertus dans leur perfection, parce que vous les trouverés acompagnées d’une délicatesse qui ne peut venir que d’une âme dont
la
sensibilité a été perfectionnée par
l’habitude de la vertu. Ho, l’excellente femme que vous connavtrés, allés, mes amis, faites
le voyage de Paris, et à votre retour si vous m’aprenés que vous avés
vu
ou que vous avés connu cette respectable dame, je ne
m’informerai plus si vous avés eu du plaisir à Paris, si vous êtes bien aises d’avoir été en France ; pour moi je n’y ai connu le
bonheur que d’aujourd’hui... »
P
ERSONNALITÉ
ÉMINENTE
DU
P
ARIS
INTELLECTUEL
DU
S
IÈCLE
DES
L
UMIÈRES
,
MADEMOISELLE
DE
L
ESPINASSE
(1732-1776)
fut
d’abord la protégée de Madame Du DeͿand, et tint elle-même ensuite un des plus célèbres salons de son temps,
fréquenté par ses amis d’Alembert, Condorcet, Condillac, Marmontel ou Turgot. Personnalité ardente, elle fut
l’amante malheureuse du marquis de Mora et du comte de Guibert, et leur adressa des lettres pathétiques et
enÁammées dignes des
Lettres portugaises
ou de
La Nouvelle Héloïse
. Diderot l’évoqua dans
Le Rêve de d’Alembert.