15
22 HEURES DE PIERRE SOPPITE ET MARIE DESCHEVERT
Livre d’heures à l’usage de Rome (Heures de la Vierge et Office des morts)
France, Paris, vers 1400-1410
En latin, manuscrit enluminé sur parchemin, 151 ff.
250 000/350 000 €
Reliure de maroquin rouge du XVII
e
siècle, dos à 6 nerfs, décor de filets dorés sur les nerfs et dans les entre-nerfs,
encadrement de triple filet doré sur les plats, tranches dorées, trace d’attaches (lacunaires). Dimensions des feuillets :
155 x 205 mm ; dimensions de la reliure : 160 x 215 mm.
S
UPERBE
LIVRE
D
’
HEURES
PEINT
À
L
’
ÉPOQUE
DU
DUC
DE
B
ERRY
,
ÂGE
D
’
OR
DE
L
’
ENLUMINURE
FRANÇAISE
,
AVEC
TREIZE
MINIATURES CHATOYANTES
ET D
’
UNE GRANDE DÉLICATESSE
.
L
ES MINIATURES SONT ATTRIBUABLES AU MAÎTRE DE
L
UÇON
(
MAÎTRE D
’E
TIENNE
L
OYPEAU
)
ACTIF À
P
ARIS DE
1390
À
1415/1417.
Le Maître de Luçon ou Maître d’Étienne Loypeau est un artiste actif à Paris entre 1390 et 1415/1417.
Il doit son
nom au Pontifical-missel commandé par Étienne Loypeau, évêque de Luçon à l’attention de son protecteur Jean I
er
de
Berry (Paris, BnF, lat. 8886) peint vers 1405, mais avant 1407. Il fut étudié tout d’abord par Millard Meiss, puis par
Charles Sterling qui le renomme Maître d’Etienne Loypeau, évêque de Luçon. L’atelier du Maître de Luçon s’est
spécialisé dans les livres d’heures dont on compte au moins une vingtaine de manuscrits conservés dans les collections
publiques. A partir de 1406, sa production se diversifie lorsqu’il commence à travailler pour des familles aristocrates
(Berry, Bourgogne) : il réalise la décoration de traités de morale, mais aussi des textes profanes. Il est associé à plusieurs
manuscrits réalisés pour des membres de la famille du duc de Berry. Par exemple, le Maître d’Etienne Loypeau illustre
un recueil de traités d’édification pour Marie de Berry (Paris, BnF, fr. 926) avec des bordures et baguettes ornées
semblables aux présentes Heures ; son Pontifical-Missel réalisé pour Etienne Loypeau, évêque de Luçon fut commandité
pour être offert à Jean de Berry (Paris, BnF, lat. 8886) ; un manuscrit du
Livre des bonnes mœurs
de Jacques Legrand,
peint en association avec le Maître du bréviaire de Jean sans Peur, est destiné à Jean de Berry (Paris, BnF, lat. 1023).
Le Maître d’Etienne Loypeau reste longtemps attaché à des formules héritées du XIV
e
siècle, avec une grande
sobriété dans les compositions, des fonds traditionnels mosaïqués ou losangés et des sols nus.
Les personnages
sont revêtus de couleurs sobres mais aux drapés bien définis. Il affectionne les rochers escarpés en arrière-plan. C’est
un artiste qui s’associe volontiers à d’autres enlumineurs, par exemple dans des Heures à l’usage de Rome pour une
dame inconnue, en collaboration avec le Pseudo-Jacquemart et le Maître de la Mazarine, vers 1400 (Quimper,
Bibliothèque municipale, Ms. 42) ; ou encore dans un livre d’heures à l’usage de Paris (1407/1408 ; Oxford, Bodleian
Library, Douce, MS 144) où il peint les miniatures du calendrier et s’associe aux Maîtres de Boucicaut et Bedford.
Notons que ce manuscrit présente des éléments communs avec les Heures Soppite-Deschevert. Ou encore dans un Livre
d’heures à l’usage de Bourges pour un commanditaire proche du duc de Berry, vers 1405-1410 où le Maître d’Etienne
Loypeau travaille en collaboration avec le Pseudo-Jacquemart pour l’office de la Vierge (Londres, British Library, Yates
Thompson 37).
Le cycle des miniatures des Heures Soppite-Deschevert est d’une grande régularité, reflet de l’âge d’or de
l’enluminure française au temps du duc de Berry
.
L’Annonciation se démarque quelque peu des autres miniatures : l’artiste a traité la robe de la Vierge, les anges et le
dais en semi-grisaille, les bordures sont habitées de drôleries composées d’enfants nus coiffés d’un chapeau s’attaquant
avec des lances à un bestiaire varié (licorne, ours, lion, salamandre, dragon, oiseau). Un livre d’heures à l’usage de
Bourges (Londres, British Library, Yates Thompson 37) contient des miniatures que se sont partagées une kyrielle
d’artistes tels le Pseudo-Jacquemart et son atelier, le Maître des Madones d’humilité (Master of the Madonnas of
Humility), le Maître de la Trinité et le Maître de Luçon. On y trouve quelques comparaisons, notamment dans les
bordures habitées d’anges, d’oiseaux et de papillons, entre le feuillet d’Annonciation des Heures Soppite-Deschevert et
l’Annonciation des Heures Yates Thompson 37 (voir Paris 1400, no. 170) ; les Heures d’Oxford (Douce MS. 144) ont
également des bordures parsemées de personnages chimériques, d’enfants nus et d’un bestiaire semblables, peints dans
des tons pastels et semi-grisaille.
La première miniature du cycle des Heures Soppite-Deschevert reste tout à fait
originale dans le corpus connu des œuvres du Maître d’Etienne Loypeau
et mérite une étude plus poussée : les
drôleries des marges du feuillet pourraient être d’une autre main, peut-être celle des drôleries des Heures Douce 144 ?
TEXTE
ff. 1-12v, Calendrier, en latin, à l’encre bleue, rouge et or, avec les saints suivants : Octave saint Etienne ; Hilaire, évêque
(13 janvier, en rouge) ; Vincent (22 janvier, en or) ; Valentin, prêtre (14 février) ; Ambroise, évêque (4 avril, en bleu) ;