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Livres et Manuscrits

RTCURIAL

14 juin 2017 14h. Paris

André Malraux

et ses «Dyables»

Au moment où, à travers ces lignes

fluides, brisées, enlacées, on voit, ou

plus exactement on devine ou suppose

le chat, l’écureuil, l’araignée, le paon, il

s’est déjà esquivé, transformé en autre

chose. Il est devenu un dyable.

Ces esquisses sont davantage des

arabesques que des dessins, ce qui

ne les empêche pas d’être évocatrices

et d’une formidable force expressive.

Elles peuvent, selon le moment,

parfois légendées. Plutôt ponctuées

d’une phrase, ourlées d’une image,

par André Malraux lui-même. Ses

commentaires relèvent de l’humour,

de l’ironie, de la satire, de la raillerie

souvent. Certains sont franchement

hilarants tels le «dyable (volant) de la

respectabilité chez les cormorans» ou le

«dyable de la fidélité chez les phoques».

Curieux, étranges, intrigants, ces bouts

de phrases tiennent de la devinette

l’inspiration, l’élan, se rapprocher de

l’idéogramme ou de la calligraphie

arabe. Ou, de graphiques ou spirales

qu’elles sont, évoluer, se transformer,

puis se dissiper en fumées, suggérant

un univers essentiellement instable et

en constantes métamorphoses.

Vaticinations, explorations,

élucubrations nées d’un sourire, d’une

exaspération, d’un songe, d’un ennui

ou d’une souffrance, ces vignettes sont

spirituelle, si bien que de la promenade

constante entre figure fantasque et

légende fantaisiste vient moins éclairer

ou prolonger le croquis, qu’en obscurcir

encore le sens.

Marie-Josèphe Guers dir.,

L’Univers

farfelu d’André Malraux, 2009,

p. 6-7