Lot n° 178

STEVENSON ROBERT LOUIS (1850-1894). L.A.S. « Robert Louis Stevenson » et « R.L.S. », Sydney (New South Wales) [février 1891 ou mars 1893 (?)], à Francis Marion CRAWFORD ; 2 pages in-8 (rousseurs) ; en anglais.

Estimation : 4 000 - 5 000 €
Adjudication : 7 150 €
Description

Belle lettre d’admiration au romancier gothique américain.

[Francis Marion CRAWFORD (1854-1909), romancier américain, célèbre pour ses romans d’épouvante ; il a beaucoup vécu en Italie, et a séjourné en Inde.]

Il retourne dans une quarantaine heures aux îles [Samoa], où il est maintenant plus chez lui que dans le monde auquel il appartenait jadis ; il est pressé par mille affaires ; il ne connaît pas Crawford ; il est probable qu’ils ne se rencontreront jamais, et il n’est pas improbable que sa littérature paraisse abominable aux yeux de son correspondant. Et pourtant, il sacrifie quelques-uns de ses derniers moments pour lui adresser ses salutations et ses remerciements. Il y a des années, il a lu Mr Isaacs [1882], et ne l’a pas aimé – il était sans doute sot ; et il n’a plus rien lu de lui, jusqu’à l’autre jour où il est devenu la proie de Greifenstein [1889], et maintenant il est entouré de ses œuvres, et au milieu de With the Immortals [1888]. Cela le revivifie de savoir qu’il a un contemporain de sa force, bien qu’il imagine qu’il est plus jeune que lui ; il espère qu’il s’élancera encore plus haut et plus loin que son admirateur, Robert Louis Stevenson.

Il ajoute au verso un long post-scriptum. Il n’attend pas de réponse ; c’est son défaut de se précipiter avec sa gratitude encombrante quand ça lui plaît ; mais l’acte suffit. Au reste, il n’a pas d’adresse : le navire qui l’emportera fait voile avec des ordres cachetés, et il ignore lui-même sa destination. Quelques-uns des livres de Crawford – les pauvres ! – prendront le même chemin, les yeux bandés ; ils seront lus dans un climat meilleur et dans des endroits plus solitaires que leur auteur n’en rêve, sans oublier l’Italie… Il ajoute encore : Pas de traductions de prose en musique ? Une symphonie rendue pour le piano : un air pour la Reine de la Nuit joué au piccolo, et on oublie qu’il y a des langues étrangères même en musique : la musique indienne, avec ses gammes innombrables, la musique chinoise, Crawford l’a-t-il entendue ? Même sa musique polynésienne, qui l’enchante, mais que la plupart des Européens déclarent n’avoir aucun sens ni beauté… Rien n’a autant l’esprit de clocher que la musique, alors qu’elle a son petit patrimoine de 12 sons choisis parmi un million de possibles…

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