Lot n° 132

Maurice de GUÉRIN (1810-1839). L.A.S. « M. Guérin du Cayla », au Cayla 6 août 1837, à la baronne de Maistre, au château des Cocques par La Charité (Nièvre) ; 3 pages et demie in-4 à son chiffre couronné, adresse (petit bris de cachet et...

Estimation : 800 / 1 000
Adjudication : Invendu
Description
qqs légères fentes aux plis réparés).
Belle et longue lettre. Il profite d’un moment de calme pour prendre la plume : « Tout le monde est à la messe à Andillac, notre paroisse, à une demi lieue d’ici. Moi seul, par le privilège de ma santé, je suis exempt de la pieuse fatigue et je puis régner, du moins pendant quelques heures, sur un empire muet. Voilà sans doute une royauté qui me va ».. Mais il consacre ce temps à la causerie, « sans autre bruit, il est vrai, que le bruissement léger de la plume courant sur le papier »… Puis, en réponse à l’oraison de sa correspondante, il fait l’éloge d’une vache qui vient de mourir, « cette pauvre blanche digne vraiment de l’âge d’or par les ruisseaux de lait qu’elle faisait couler. [...] Comment ouvrir sa journée d’une façon plus douce et plus sage qu’en répandant en soi ce breuvage dont la vue seule fait naître des pensées de calme et de douceur ? Cite-t-on un homme qui ait commis une action sanglante après avoir vidé une coupe de lait ? La sensation du réveil si souvent triste et désolante, qui vous replace au milieu des songes favorables et souhaités vis-à-vis de la réalité qui blesse ou qui trompe, quel remède lui apporterez-vous plus efficace que cette liqueur qui, par la qualité suave de sa couleur et de son goût, paraît comme l’antidote naturel de l’amertume ? [...] Buvez du lait avant même votre première pensée, et votre humeur contractant la vertu de ce breuvage philosophique se montrera conciliante et aimante toute la journée »... Il évoque alors son récent voyage dans le sud-est de la France : l’amphithéâtre de Nîmes, et la Maison carrée, « joli petit et frêle bijou d’architecture grecque » ; il dénigre cette campagne chantée par des « poètes menteurs », avec ses murailles de pierre grise et les oliviers, « arbre charmant dans les pastorales mais si austère et si rude aux yeux que l’imagination ne peut vraiment placer sous son ombrage que la scène d’une agonie ». Il a, dans son voyage, contracté le germe d’une maladie : « Le traitement de la nouvelle maladie contrarie un peu celui de l’ancienne […] Ce pêle mêle de souffrances et de remèdes et le long malaise qui a précédé l’apparition des accès, n’ont pas peu ajouté au poids naturel d’une vie de campagne, isolée et monotone comme la notre. Toutes mes distractions consistent dans quelques promenades au petit pas de mon cheval. Mais dans la pensée que mes sœurs m’entourent de mille soins et qu’on doit se rétablir vite au milieu de tant d’affection, je trouve ce qui me console et m’encourage »...
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