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Hugo,Victor (1802 -1885), célèbre poète et écrivain

L. a. s. à T.[imoléon] Pasqualini, Londres 5 mai.

2 p. in-12°, adresse au dos. Mouillure claire qui n’affecte pas la lecture. Très belle lettre,

porteuse d’une telle émotion que nous ne résistons pas au plaisir de vous en livrer l’intégralité.

Il vient de lire

vos deux articles sur les Travailleurs de la mer.

Être compris, c’est là le but du penseur, c’est là mon ambition. Vous me comprenez, vous faites

plus et mieux encore, vous m’aimez. Je vous remercie.

Cette male affection des âmes fortes est le point d’appui de ceux qui, comme moi, sont dans la

mêlée pour la justice, la vérité et le progrès. Je suis un travailleur et un combattant, travailleur je

puis me passer d’outils, j’ai mes bras, combattant je puis me passer d’armes, j’ai mon courage.

Mais je ne puis me passer de ceci : être aimé. Être aimé de ce cœur immense qu’on appelle le

genre humain. C’est de cet amour-là qu’a besoin le philosophe combattant, sinon, comme Gilliat

[marin, personnage dans les Travailleurs de la mer],

il regarde fuir l’espérance et meurt. Cette

sympathie nécessaire au penseur, vous me la donnez, d’autres généreux esprits me la donnent.

Vous êtes un des plus nobles. Vous avez le talent robuste comme la conscience. Votre style a la

dignité de la conviction. Vos deux articles, indignés quand il le faut, sont élevés, éloquents émus.

Vous m’avez habitué à ces belles pages, mais elles me charment et me touchent toujours de plus

en plus. Votre ami.

Charles Timoléon Pasqualini, (1840-1866) était chirurgien de la marine et célèbre poète de

langue française.

600 - 800 €