24.
SARTRE Jean-Paul
Ensemble de 9 pages autographes dont 1 signée. «
Chansons pour une demoiselle
»,
dédicacées à Michelle Vian. Sans date ; sur pages in-4° quadrillé.
— «
Je me lave, morceau par morceau
Sans que mes doigts touchent ma peau
Et sans ôter ma chemise de nuit
C’est un peu long, voilà l’ennui
Mais quand on se complaît à voir sa nudité
Maman m’a dit qu’on est frappé de cécité.
»
— «
Il faut que je prenne garde
Des mots de corps de garde
Quand et où, je ne sais
Dans ma tête se sont glissés
Ils étaient si sales et si laids
que j’ai compris, c’est le pire,
toute seule ce qu’ils voulaient
Je les emporte où que j’aille
Ils vont sortir si je baille.
»
— «
Je ne prends pas de bain de mer
L’eau de mer est bien trop amère
Elle vous remplit d’amertume
D’une vieille sagesse aux cheveux blancs
d’écume
J’ai vingt ans et ne veux pas être sage
Ce n’est pas encore de mon âge.
»
— «
Dans la cervelle d’une pieuvre?
Imaginez ce cauchemar
Si mes jambes allaient exciter un homard !
On devrait interdire aux chiens
De regarder les évêques : ça n’est pas bien
Aux vaches de regarder les trains
On devrait défendre aux crustacés
Et à toutes les bêtes hargneuses
De regarder passer la baigneuse.
»
— «
Je ne pense jamais si je peux l’empêcher
Les pensées, où va-t-on les pêcher ?
D’abord ce sont des péchers ?
Elles frétillent dans l’eau profonde
Cetits poissons si mignons
Qu’on leur donnerait le bon Dieu sans
confession
Mais ça vous trompe son monde
Quelquefois quand vous les attrapez elles
fondent
Cetit poisson fond en eau sous vos yeux.
»
— «
Que j’aimais Papa et Maman
Mais je m’apercevais brusquement
Que ma pensée se transformait
Sans que j’en fusse informé
Et que tout en pensant que je pensais à ça
Je me trouvais,
En train, sans y penser, de penser le
contraire.
»
— «
Je ne suis jamais seule dans la rue
Maman me l’a défendu
Savez-vous que des messieurs chauves à
moustaches
Vident sur vous des encriers
[…]
Et ricanent si vous criez
D’autres, statues pales des ruelles
De noir vêtus, silencieux et raides
Vous regardent passer de leurs yeux sans
prunelle
».
— «
J’étais à mon balcon un soir
Un monsieur me guettait du trottoir
En écartant sa pelerine
Il cria : regarde gamine
Et tu verras comment que c’est fait un bel
homme
[…]
Il prend sa canne et vous couche en joue
En criant : feu sur le joli lapin
Puis il s’agenouille dans le crottin
Et vous dit qu’il est un petit oiseau, un ange.
»
3000/4000 €
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