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Un jeu du XVIII
e
siècle, ancêtre du Loto
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Jeu de cavagnole.
Paris, Aufrère, marchand tabletier rue Planche Mibrai au bout du pont N.D., sans date
[vers 1770-1780].
Coffret en bois (noyer?) avec serrure et poignée en fer, complet de la clef, contenant 14 cartons ornés de gravures coloriées (17
x 15 cm), un sac de soie verte avec dôme en ivoire ajouré fixé au bout à l’aide d’un disque de bois, 68 pions en bois creux sous
forme d’olives, contenant des languettes de parchemin roulées et, enfin, un stylet en ivoire.
Exceptionnel jeu de cavagnole, dérivé du biribi : il a été édité à Paris par Aufrère vers 1760-1780.
Le cavagnole, “arrivé en France au début du XVIII
e
siècle, connut un énorme succès à la cour, chez la reine. Mme du Châtelet
s’y adonne passionnément et perd des sommes considérables” (Elizabeth Badinter,
Madame du Châtelet, la femme des Lumières,
2006, nº 50). Voltaire composa un quatrain satirique qui témoigne de la vogue du jeu :
On croirait que le jeu console
Mais l’ennui vient à pas comptés
À la table d’un cavagnole
S’asseoir entre deux Majestés
Conservé dans une boîte en bois brun dotée, sur le couvercle, d’une poignée en fer ainsi que d’une serrure (la clef est conservée),
il se compose de 14 cartons doublés, au verso, de papier dominoté doré et portant, au recto, une gravure en cinq parties
numérotées, coloriée à l’époque. La numérotation va ainsi, de cinq en cinq, jusqu’à 70 sans interruption. A ces cartes, on joint
un sac en soie verte fermé par un dôme en ivoire ajouré monté sur un cercle de bois. Ce dôme est divisé en deux parties montées
sur une charnière et doté d’un système de fermeture. Avec, on trouve un jeu de 68 pions en buis creux contenant, roulée à
l’intérieur, une languette de parchemin portant un numéro manuscrit. Enfin, le jeu est complet du stylet en ivoire qui permet
de retirer les parchemins des “pions olives”. Le numéro sélectionné était annoncé et le joueur ayant misé sur le bon numéro
obtenait sa mise multipliée par 36 ou par 64.
L’illustration gravée des cartons est très amusante : on y voit des scènes de la vie quotidienne, mais aussi
nombre de petits métiers et des jeux.
La revendeuse, Marchande de serises
[sic],
Le timpanon, Le charpentier, Le tabellion, La tondeuse de mouton, La rempailleuse,
Allemanach
[sic]
nouveaux, La crémière, La longue pauline
[sorte de tennis],
Le cabaret, Le présent du chasseur, La curiosité,
Marchande de pommes, Le port de mer, Le Diable boiteux, Le singe postillon, Belle rencontre, Le jeu de Siam, Le banquier, Tant
va la cruche,
etc.
Une planche est utilisée deux fois avec des numéros différents. Le numéro 53 montre cinq personnes attablées jouant au
cavagnole et le numéro 28, montrant
les trois frères,
donne le nom et l’adresse de l’éditeur.
Très beau et rare ensemble, complet pour l’essentiel. Il n’y manque que deux pions olives et cinq des parchemins qu’ils
contiennent sont factices.
(Bibliothèque nationale de France,
Jeux de princes, jeux de vilains,
2009, nº 97 : pour un jeu édité par le même Aufrère, presque
identique à celui-ci. Boîte, pions, sachet de soie et gravures sont les mêmes, sauf certaines, dont les numéros diffèrent. Le
jeu exposé compte 24 cartons et sous le couvercle est fixée l’étiquette de l’éditeur Aufrère. En revanche, leur exemplaire est
incomplet du stylet en ivoire qui permet de pousser les parchemins hors des pions. Les rédacteurs du catalogue datent le jeu
vers 1780).
5 000 / 6 000