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3.
HOBBES Thomas.
Leviathan
or the Matter, Forme, & Power of a Common-Wealth Ecclesiastical and
Civill.
London, Printed for Andrew Crooke, 1651.
In-4 [278 x 190 mm], de [6]-[394] pages (signatures : A-Z4 ; Aa-Zz4 ; Aaa-Ddd4, avec des
erreurs : après la page 248, la numérotation reprend de 247 à 256, puis de 261 à 396), un
titre-frontispice et un tableau dépliant. Veau brun, dos à cinq nerfs, muet. Reliure de l’époque.
Édition originale de cet ouvrage majeur de la théorie politique.
Exemplaire de « premier tirage », reconnaissable à la vignette du titre figurant une tête ailée dans
un cartouche à volutes et à pampilles. Les deux autres émissions connues sont des retirages, aussi
datés de 1651, sans doute réalisés d’intelligence avec l’éditeur Crooke qui fournit la planche
originale, l’un probablement imprimé à Amsterdam dans les années 1670, reconnaissable à la
vignette à l’ours ; l’autre portant une marque d’éditeur abstraite, se caractérise surtout par l’usure
de la planche originale.
Thomas Hobbes (1588-1679) rédige le
Léviathan
lors de son exil à Paris. La conception radicale-
ment pessimiste de la nature humaine : « every man is enemy to every man » conduit pour Hobbes
à la nécessité d’un État autoritaire et fort. Le célèbre frontispice au géant explicite visuellement
sa pensée : le Léviathan couronné, le corps composé d’une multitude d’êtres humains, surgit des
collines une épée dans la main droite et une crosse d’évêque dans la gauche. La partie supérieure
de l’estampe est occupée par le verset tiré de Job (41-24) décrivant l’apparition effroyable :
Non
est potestas super terram quae comparetur
(Il n’y a pas de puissance sur terre qui puisse lui être
comparée). La partie inférieure de la gravure se compose de vignettes placées de part et d’autre
d’un rideau central portant le titre : les symboles du pouvoir temporel figurés à gauche font face
aux symboles du pouvoir ecclésiastique figurés à droite : le château fait face à l’église, la cou-
ronne à la mitre, le canon aux foudres de l’excommunication, les armes de la guerre aux armes
de la théologie, la bataille à l’enseignement scolastique. Par cette image, Hobbes signifie que le
gouvernement qu’il prône a pour mission d’administrer aussi bien le domaine séculier que le
domaine sacré, et que sa puissance inspire la crainte nécessaire à cet exercice.
L’œuvre, non signée, est attribuée à Abraham Bosse par une tradition qui remonte à l’abbé Michel
de Marolles. Outre les données stylistiques et biographiques - il est plus que probable que Hobbes
ait fait appel à un graveur parisien pour l’élaboration de son frontispice - il y a lieu de noter les
affinités intellectuelles qui lient le philosophe et l’artiste : Abraham Bosse s’était démarqué du
milieu artistique de son temps par sa vision très mathématique de la perspective, contrevenant
en cela aux théories de Charles Le Brun. Pour Hobbes, qui fut le professeur de mathématiques
du futur Charles II, cette conception géométrique du monde avait sans doute de quoi plaire.
Précieux exemplaire, dans sa première reliure, ayant appartenu à l’un des membres de la famille
du dédicataire. Il porte en tête l’ex-libris manuscrit de W. Godolphin ; William Godolphin
(vers1640-1710) fils aîné de sir Francis Godolphin, «my most honored Friend », auquel Thomas
Hobbes dédie son ouvrage (?). Quelques annotations anciennes sur les gardes.
Mors restaurés, bords un peu dentelés sur les premiers feuillets.
Macdonald &Hargreaves,
Thomas Hobbes, a bibliography
, n°42. Bredekamp,
Stratégies visuelles de
Thomas Hobbes
.
Abraham Bosse, savant graveur
, Paris et Tours, 2004, n°268. Burke,
Genealogical
an Heraldic History of the Extinct and Dormant Baronetcies of England
, 220.
18000 euros