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SEBOND, Raymond.
La Théologie naturelle. Traduicte nouvellement en françoys par messire Michel,
seigneur de Montaigne, chevalier de l'ordre du roi, & gentil-homme ordinaire de
sa chambre.
Paris, Michel Sonnius, 1581.
In-8 (175 x 110 mm) de 2
ff.n.ch., 496
ff.ch. (mal chiffrés 469), 30
ff.n.ch.(index) ; vélin
ivoire souple à rabats, dos lisse avec titre manuscrit, traces de lacets
(reliure de l'époque).
Seconde édition de la célèbre traduction de Michel de Montaigne. Imprimée par les mêmes
éditeurs que la première – le privilège a été partagé entre Guillaume Chaudière, Gilles Gourbin
et Michel Sonnius – elles est très soigneusement purgée de nombreuses erreurs par Montaigne
qui supprima également le sonnet de François Ambroise.
« Cet ouvrage et sa traduction par Montaigne bénéficient de plusieurs rééditions jusqu’au
milieu du XVII
e
siècle, donnant à l’expression ‘théologie naturelle’ un statut de sous-genre de
la métaphysique d’inspiration éclectique (saint Thomas, saint Augustin, saint Anselme, saint
Bonaventure, Damascène, Raymond Lulle…). On ignore encore quel texte Montaigne a suivi :
peut-être l’édition assez ‘rationaliste’ de Richard Paffroed (ca. 1485), ou un manuscrit inconnu,
autre que celui de Toulouse authentifié par notaire à la mort de l’auteur. Dans sa préface à la
traduction, Montaigne juge que le style en est ‘farouche’ et ‘barbaresque’, et, tout en se disant
soucieux d’amélioration stylistique et de fidélité à l’original, il semble néanmoins lire Sebond
en atténuant son anthropocentrisme, à partir duquel le théologien avait élaboré un système de
lecture du
Livre de la nature
antérieure à celle des
Écritures
, ce qui n’a pas manqué de susciter des
réserves et une mise à l’index du prologue (1564). Il insiste parfois tellement sur les échelles des
êtres qu’on penserait à une traduction ironique, telle que le lecteur moderne pourrait la juger à
la lumière des
Essais
. L’usage des modalisateurs, comme lorsque ‘ergo concluditur’ est remplacé
par ‘il est vraisemblable que’, ou l’introduction de formules ambiguës comme ‘il faut croire que’,
marquent la distance de Montaigne à l’égard de ce texte-source, faisant descendre au niveau du
probable ce que Sebond présentait comme infaillible.
Montaigne livre à l’imagination ce que Sebond
attribuait à l’intellect et donne à la traduction
un tour plus personnel par l’usage du ‘je’ au lieu
de ‘nous’ » (Marie-Luce Demonet, université de
Tours, septembre 2015).
Petit manque (défaut de papier) en marge du
feuillet 266, petit travail de vers en marge blanche
en pied, gardes de la reliure renouvelées.
Bel exemplaire, non lavé, à belles marges.
Provenance : signature ancienne sur le titre à
l'encre brune – Pierre Muguet (ex-libris).
Tchemerzine-Scheler, IV, 914 ; Desan, 3 (note) ; voir Guyot de
Villeneuve, lot 202.
10 000 / 15 000 €