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GIONO (Jean).
Lettre de défense adressée
à Camoin.
Sans lieu
[Manosque]
, 1
er
septembre 44.
Lettre autographe signée “Jean Giono”, 5 pages in-folio sur 3 ff. de
papier jaune.
Jean Giono face aux accusations de collaboration : plaidoyer
avant l’arrestation.
Ancien combattant de 14, Jean Giono devint pacifiste ; ce qui lui
valut d’être arrêté en septembre 1939 avant d’être relâché. Dégagé
de ses obligations militaires, il continua de publier sous l’Occupation
notamment
Deux cavaliers de l’orage
parus en 1942-1943 dans
La
Gerbe
, journal pétainiste, ce qui lui sera reproché, comme le reportage
que lui consacra le magazine national-socialiste
Signal.
Arrêté en
septembre 1944, accusé de collaboration, il fut emprisonné et ne
fut libéré qu’au mois de janvier 1945, sans avoir été inculpé. Mis sur
la liste noire du Comité national des Écrivains, il ne fut autorisé à
publier que deux ans plus tard grâce à l’intervention de Jean Paulhan.
La lettre qu’il adresse le 1
er
septembre 1944 expose dans le détail la
défense de l’écrivain, qui rappelle ses faits de résistance, son aide à
des persécutés...
“
Je n’ai jamais collaboré ni avec les Allemands, ni avec Vichy. Ceci est fort
clair : eusse je écrit une seule phrase en faveur de l’un ou de l’autre, qu’il est
certain que l’un et l’autre se seraient empressés d’en faire état et personne
n’a vu quoi que ce soit de semblable.
[...]
pour tout ce qui était traqué
par les nazis, j’ai été le refuge et la Providence. «Le Franciste» m’avait
attaqué dans un article où il m’appelait le Consul juif de Manosque. Si
mes adversaires ne se trompaient pas, ce serait drôle de voir mes amis se
tromper.
[...]
Bien de ceux qui maintenant crient les plus forts n’ont pas
un tableau d’actions si nettement caractérisé.”
La lettre s’adresse à Camoin, président du Comité de libération
départemental, qui avait prévenu son ami des risques d’arrestation.
Une note manuscrite au verso du dernier feuillet précise qu’elle a été
transmise au Comité d’épuration de Nîmes.
Giono “estime qu’on veut lui faire payer son individualisme et que
les nouveaux maîtres se refuseront à tenir compte de sa « résistance
individuelle » au nazisme [...].
C’est pourquoi en août 1944, il ne songe pas à quitter sa ville, bien
qu’on lui ait répété que le commissaire de la République pour le
sud-ouest, Raymond Aubrac, ait dit dès son arrivée dans la région :
« Comment, vous n’avez pas encore arrêté Giono ? » Il se sent
personnellement rassuré par la présence de son ami Camoin à la tête
du comité départemental de Libération. Pourtant, Camoin l’avait
prévenu des risques d’arrestation. En vain” (Assouline,
L’Épuration
des intellectuels
, pp. 28-29).
L’écrivain fut arrêté sept jours plus tard, le 8 septembre 1944, et
incarcéré pendant plus de cinq mois.
Précieux document.
2 000 / 3 000
€
“
Je n’ai jamais collaboré ni avec les Allemands, ni avec Vichy
”