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“Giono est tiraillé, note Robert Ricatte, entre le baroquisme – qu'il
dit shakespearien – de son inspiration et un désir de nudité qui lui
vient du modèle grec” (Giono,
Œuvres romanesques complètes IV
,
Bibliothèque de la Pléiade, p. 849).
Si l'été 1939 fut consacré au roman, l'arrestation du romancier en
septembre et l'éclatement de la guerre y mirent une fin provisoire. Le
manuscrit totalisait alors 180 pages, selon une lettre adressée par Élise
Giono à Jean Paulhan le 6 novembre 1939, ce qui porte à croire qu'il
s'agit du présent ensemble.
Sollicité par Alphonse de Chateaubriant, directeur de l'hebdomadaire
pétainiste
La Gerbe,
Giono se remit au travail : son récit parut en
feuilleton entre décembre 1942 et mars 1943.
En dépit de cette la publication, insatisfait, Giono retravailla son
roman durant les dernières années de la guerre. Son arrestation,
l'interdiction de publication par le CNÉ, puis la parution du cycle du
Hussard
et des
Chroniques
le tinrent éloigné du roman. Il ne le reprit
qu'en 1964 et la première édition en volume vit le jour en 1965 chez
Gallimard, mettant un terme à 25 ans de tergiversations, inhabituelles
chez Giono.
“Plusieurs ouvrages de Giono sont restés à l'état de projets ou de
fragments [...] : comment expliquer, au contraire, tant de retours
obstinés à un récit dont on aurait pu croire, à la fin, que l'affabulation
et, partiellement, l'écriture appartenaient au passé ? Il faut bien croire
qu'il recélait une vérité enracinée dans le moi profond de Giono”
(Ibid., p. 861).
Le manuscrit comporte de nombreux passages raturés et variantes
inédites. Les pages bis offrent toutes des variantes. A partir du feuillet
155, le manuscrit diffère entièrement des versions publiées.
Il représente l'unique manuscrit qui nous soit parvenu de cette
œuvre charnière précédant le
Hussard sur le toit
.
Les éditeurs de la Pléiade disposaient seulement d'un manuscrit du
dernier chapitre, dans son état définitif, et d'une copie dactylographiée
de 1950.
10 000 / 15 000