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jours, sans pouvoir me décider à courir le plus petit risque de te faire de la peine. Je sens bien que si tu

me demandais de te tirer une goutte de sang avec une épingle, j'aurais si peur de te faire mal que je ne

pourrais pas me décider à l'enfoncer. Je n'ai pourtant pas voulu que tu l'apprennes par d'autres. Je voulais

au moins te le dire avant-hier. Ta mère n'a pas voulu. Alors je te l'écris aujourd'hui en pleine confiance

dans ta gentillesse pour que tu comprennes assez tous mes soucis pour ne pas m'en donner un de plus

en t'attristant de cela. Ma tendre crainte de te le dire depuis si longtemps m'évite peut-être, par toute la

tristesse qu'elle m'a causée, que tu me donnes aujourd'hui l'apaisement de ne pas te voir affligée et que tu

ne sois pas au-dessous de ce que j'attends de toi".

M

AIS

C

'

EST

PEUT

-

ÊTRE UN

PEU

TROP

ET

EN

VOYANT QUE

TU

EN

FAIS UNE

TELLE AFFAIRE

,

CELA

LUI

FERA

PEUT

-

ÊTRE

SE GROSSIR À ELLE

-

MÊME

SON ÉTAT NERVEUX

.

Tâche de diminuer l'importance de la lettre. La dernière

phrase surtout ne me paraît pas fameuse. –

S'il te plaît, ne dis pas à tes deux invités que j'avais demandé que tu les invites, ne parle pas de moi.

Si au contraire tu le leur as déjà dit, c'est très bien, cela ne fait rien. Si tu ne l'as pas dit, ne le dit

pas. Je reçois ton télégr

[amme]

qui me désole

[Louis d'Albufera annonçait à Proust la mort de

la duchesse de Gramont, mère de leur ami le duc de Guiche]

.

M

A

TRISTESSE

EST

TRIPLE

(

POUR

LA

DUCHESSE

DE

G

RAMONT QUI M

'

EST

EXCESSIVEMENT

SYMPATHIQUE

,

POUR

G

UICHE QUE

J

'

AIME

BEAUCOUP

ET

POUR

QUI

CE

SERAIT

UN

IMMENSE MALHEUR

,

JEUNE

COMME

IL

EST

,

ENTOURÉ

DE

TOUS

LES

CONSEILS

LES

PLUS

STUPIDES

sauf cette femme de cœur et de sens. Et aussi de remords car j'ai été mal pour Guiche ces

temps-ci (ne lui dis pas que tu le sais, d'ailleurs tu ne le sais pas) et si j'avais pu supposer qu'il était

tourmenté, j'aurais agi tout autrement. D'ailleurs, je lui écris pour lui demander des nouvelles et lui

demander pardon et je lui dis que je l'ai appris parce que tu lui avais fait téléphoner de chez moi (je

n'ai pas dit que c'était pour un dîner...) Maman m'a encore entretenu jusqu'à 2 heures du matin de tes

immenses qualités, de ta figure tellement loyale, tellement sympathique, etc.

»

2. –

S.l., [date de réception du 26 juillet 1905] : «

Je suis

ravi

, mon petit Louis.

T

U VOIS BIEN QUE TU ES

PLUS

FORT QUE PERSONNE ET QUE TU NE DEMANDES CONSEIL À TES AMIS QUE POUR LES

FLATTER

.

Tout à toi...

»

«

C

HEZ MADAME

S

TRAUS

...

»

«

Mon cher Louis, nos lettres se sont

croisées, j'espère que tu as reçu ma

demande de pardon et que tu l'as

agréée. Je me sens mieux ce soir,

malheureusement cela peut ne durer que

q

[uel]

q

[ues]

heures ! J'ai bien réfléchi

à la question déplacements, tant réfléchi

que par énervement il est possible que

je parte pour n'importe où pour ne plus

être agité !

S

I

MÊME

JE

ME

DÉCIDAIS

À

PARTIR

,

ET

À

PARTIR

POUR

T

ROUVILLE

,

endroit auquel

j'ai trouvé à la réflexion de g

[ran]

ds

inconvénients, je ne pourrais pas, en

dehors de t

[out]

es autres considérations,

habiter à la villa

S[ain]t

-Jean, à cause

des parfums, chose à quoi je n'avais pas

30

PROUST

(Marcel). Lettre autographe

signée «

Marcel

». S.l., [date de réception du

20 août 1905].

800/1.000

4 pp. in-8, liseré de deuil ; date de réception au composteur,

apostille autographe du destinataire, «

répondu

».