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19

«

P

ARDONNEZ

-

MOI

SI

JE N

'

AI

PAS

EU

L

'

AIR DU

BONHEUR

QUE

J

'

ÉPROUVE

TOUJOURS QUAND

JE

SUIS AUPRÈS DE

VOUS

...

»

«

Mon petit Albu, 1° Pour les

Nouveautés.

Vous vous rappelez

qu'on vous a dit que ce théâtre était tout

petit et qu'il était impossible de rien

avoir. J'ai demandé à 7 h. à

R

EYNADO

[H

AHN

]

, à 11 h. à

L

UCIEN

[D

AUDET

]

.

Le 1

er

n'a aucun aboutissant, le frère

du 2

d

n'est plus au

Soleil

, je n'y avais

pas pensé, et n'a donc plus de places,

ne faisant plus de critique. La seule

personne à qui je pourrais demander (à

moins que vous ne me disiez le nom de

la pièce et que je ne me trouve connaître

l'auteur) est Bernstein

[l'auteur

dramatique Henry Bernstein]

. Mais

cela ne vous ennuie-t-il pas ?... Si vous allez demain chez les Castellane, parlez-en comme de vous à

Lucien, peut-être pourra-t-il tout de même vous avoir q

[uel]

q

[ue]

chose.

Pour l'Odéon

. Je ne me rappelle pas ce que vous avez décidé et vous ne me le rappelez pas dans votre

lettre. Dois-je attendre le retour d'H.

[l'écrivain, critique et traducteur Robert d'Humières]

ou lui

écrire tout de suite ?

V

OUS

SERIEZ

BIEN

GENTIL

DE

ME

DIRE

SI

DÉFINITIVEMENT

VOUS

ME

PLAQUEZ

POUR

LA

"

RUE

R

OYALE

"

[allusion au Cercle de la rue Royale, célèbre club masculin mondain]

. Voici pourquoi. Je ne suis

pas comme vous.

J

E

NE

TROUVE

PAS

LES

GENS

IMMONDES

PARCE

QU

'

ILS

VOUS

LÂCHENT

POUR

UNE

CHOSE

QU

'

ILS

ONT

PROPOSÉE

ET

JE

TROUVE

CELA

AU

CONTRAIRE

TRÈS

NATUREL

,

CAR

CELA

ARRIVE

SI

SOUVENT

.

S

EULEMENT

ENCORE

FAUT

-

IL

LE

DIRE

et ne pas vous laisser indéfiniment le bec dans l'eau. Parce que si

vous me le dites carrément, je ne vous en parlerai pas et nous serons plus contents tous les deux. Tandis

que sans cela, je vous agacerai en vous en parlant toujours, vous vous en agacerez en ne m'en parlant

jamais et il vaut mieux que nous ne nous agacions jamais...

Pour Larue

[célèbre restaurant parisien]

j'ai été

désolé

, mais j'étais très fatigué (ce n'était pas du

tout à cause de Loche

[Léon Radziwill, dit Loche]

que je n'avais pas ce soir, ni Guiche

[Armand de

Gramont, duc de Guiche]

...), de plus

VOUS

FAITES

CELA

PAR GENTILLESSE

POUR MOI

ET

JE

VOUS

EN

SAIS

GRAND GRÉ

CAR

CES

SOUPERS ME

FONT

LE

PLUS GRAND

PLAISIR

(j'aimerais aussi q

[uel]

q

[ues]

fois

dîner

)

mais je sens que cela vous assomme. Aussi toutes les dernières fois ai-je décliné cet honneur. J'aurais

voulu que vous fussiez prévenu plus tôt mais vous ne m'avez pas dit où vous répondre, où vous serez...

H

IER

SOIR

JE

SENTAIS QUE

JE

PRENAIS

FROID

DANS

LA

SALLE

À MANGER

,

LE

FEU

ÉTAIT

ÉTEINT

,

je n'étais pas

capable de le refaire, les domestiques étaient couchés, maman seule pouvait me refaire du feu mais ne

pouvait entrer devant vous, tant déshabillée. C'est pourquoi vous m'avez trouvé l'air distrait et ne

vous retenant pas assez. C'est que je prévoyais comme cela me rendrait souffrant aujourd'hui.

A

USSI

,

PARDONNEZ

-

MOI

SI

JE

N

'

AI

PAS

EU

L

'

AIR

DU

BONHEUR QUE

J

'

ÉPROUVE

TOUJOURS QUAND

JE

SUIS

AUPRÈS

DE

VOUS

.

Au revoir, cher Albu, j'aurais encore mille choses à vous dire, les unes très gentilles, les autres

moins, mais je suis fatigué d'écrire, vous de me lire ; votre lettre était écrite d'une façon charmante, je

vous en félicite et vous remercie...

»

11

PROUST

(Marcel). Lettre autographe

signée «

votre ami Marcel Proust

». S.l., [date

de réception du 10 mai 1904].

800/1.000

10 pp. in-12, sur papier fin à liseré de deuil ; apostille autographe

du destinataire datant la réception en 3 endroits ; légères

transparences.