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ACADÉMIE FRANÇAISE

qui se confirment dans le crime en disant, la relligion cretienne est

fausse donc il ny a point de Dieu. Gouju rendrait service au genre

humain s’il confondoit les coquins qui font ce mauvais raisonnement ».

Il cite sa pièce

Zulime

 : « Mais vraiment ouy. Dieu

qui savez punir

qu’Atide

me haisse

, est une assez jolie priere a Jesus Christ. Mais je

ne me souviens plus des vers qui précèdent. Je les chercherai quand

je retournerai aux Délices ». Puis il parle de sa tragédie

Tancrède

et de Mademoiselle CLAIRON : « Jetais desesperé, je jurais quand

mademoiselle Clairon disait

On croit qu’a Solamir mon cœur se sacrifie

Eh pauvre femme. Il sagit bien icy de ton cœur, il sagit de n’etre pas

pendue ! Pourquoy parles tu de Solamir ? […] Enfin, il y a mille raisons

qui doivent faire réprouver ce destestable vers qui commence par ces

mots comiques

on croit

. Qu’on ait la bonté de me faire appercevoir

de mes défauts, je remercie a genoux, mais qu’on gâte ma piece par

des vers qui me donnent la fievre ! je vous avoue que j’en mourrais

de chagrin ». Il faut empêcher Mlle Clairon de dire ce vers…

Puis il parle de son travail sur Pierre CORNEILLE. « Je travaille sur

Pierre. Je commente, je suis lourd. Cest une terrible entreprise de com-

menter trente deux pieces dont vingt deux ne sont pas supportables,

et ne méritent pas detre lües. Les estampes étaient commencées.

Les Crammer les veulent. Je ne me méleray que de commenter, et

d’avoir raison si je peux. Dieu me garde seulement de permettre qu’ils

donnent une annonce avant qu’on puisse imprimer. Je veux qu’on

ne promette rien au public, et qu’on luy donne beaucoup a la fois ».

Et il conclut : « Mes anges j’ay le cœur serré du triste etat ou je vois la

France. Je ne ferai jamais de tragédie si platte que notre situation. Je

me console comme je peux. Qu’importe un Picardet ? ou Rigardet ?

Il faut que je rie pour me distraire du chagrin que me donnent les

sottises de ma patrie. Je vous aime, mes divins anges, et c’est la ma

plus chere consolation. Je baise le bout de vos ailes »...

Correspondance

(Pléiade), t. VI, p. 593.

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