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histoire
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SCHOELCHER Victor
(1804-1893)
homme politique, auteur du décret
d’abolition de l’esclavage.
L.A.S. « V Sch », [Londres] Jeudi [fin
1853 ou début 1854, à Victor HUGO] ;
4 pages in-12 remplies d’une petite
écriture serrée, sur papier bleu à
son chiffre VS en médaillon (quelques
petites taches).
800 / 1 000 €
Beau dialogue de proscrits entre Victor
Schoelcher et Victor Hugo, sur l’exil, la
politique et le combat contre la peine de
mort.
[Depuis le coup d’État du 2 décembre 1851,
Victor Hugo et Victor Schoelcher vivaient
en exil, le premier dans les îles anglo-
normandes, le second à Londres.]
Schoelcher remercie Hugo de ses
commentaires favorables sur une lettre
destinée à Mr. Richards, se désolant :
« Malheureusement cela ne servira à rien ou
pas à gd chose. Le parti des anglais même les
plus libéraux est bien pris sur notre compte.
C’est encore une chose triste ». Puis il dit
son indignation à propos d’un article paru
dans le journal
L’Homme
dirigé par Charles
Ribeyrolles : « l’article de Mr COLFAVRU fait
le plus détestable effet, en dehors même
de l’antipathie qu’inspire le nom. Ouvriers
bourgeois, enragés, modérés de tous ceux
que je vois il n’en est
pas un seul
qui ne blâme
cette insertion. [...] Si Ribeyrolles, pour ne pas
faire de la
Censure
admet beaucoup de telles
choses, il verra bientôt ce précieux instrument
qu’il crée se briser entre ses mains. Cela sera
d’autant plus regrettable que nous n’ans pas
de journal et que les articles de Rib. sont
d’une éblouissante beauté de forme avec les
vrais principes au fond ». [Réfugié à Jersey,
Charles RIBEYROLLES (1812-1860) dirigea
un hebdomadaire,
L’Homme
, avant d’être à
son tour forcé de quitter l’île pour se réfugier
à Londres en octobre 1855.] Schoelcher
demande à Hugo d’intervenir auprès de
Ribeyrolles. « Je sais bien ce que nous avons
à combattre partout, je sais bien que si l’on
a peur de nous, que si les habits ont laissé
faire le 2 X
bre
et le supportent en disant : si
laid que ce soit, ça vaut encore mieux que
les rouges, je sais bien dis-je que le mal tient
précisément à ces discours et à ces écrits
dont le moindre défaut est d’être inutiles. Je
viens de lire dans l’
Almanach des femmes
le discours que Mr Dejacques a prononcé
derrière vous et il m’a révolté. Quant à moi
j’irais plutôt mourir en Cochinchine que de
vivre sous la République de ces messieurs là
et je comprends que ceux qui ne partagent
pas nos idées aient encore moins le goût de
tâter d’une démocratie à laquelle on prête
d’avance ces couleurs ».
Puis il évoque un projet de lettre de Victor
Hugo au
Morning Advertiser
: « Je n’y
avais songé que comme un moyen de faire
entendre votre voix au peuple anglais, je
voudrais que les hommes vaillants de notre
parti essayassent de le convertir parce que en
dehors de la haine nationale qui est profonde,
il a contre nous autres les mêmes absurdes
préjugés que notre bourgeoisie. Je donne
d’ailleurs les mains avec tout mon cœur
et toute mon âme à votre projet contre la
potence de Guernesey [combat de V. Hugo
pour demander la grâce de John Tapner,
condamné à mort, et qui sera pendu le 10
février 1854 ; ce fut la dernière exécution
capitale à Guernesey]. Ne craignez pas d’aller
jusqu’à conseiller les meetings, les meetings
sont trop dans les mœurs angl[aises] pour que
l’on puisse voir dans ce conseil aucune idée
anarchique, aucune provocation blâmable,
d’ailleurs ce danger ne pourrait venir que de
la forme et sur ce point mon excellent ami
je crois pouvoir vous dire sans vous casser
le nez que vous êtes passé maître. Ce serait
superbe en vérité qu’un rouge proscrit sauvât
une tête. Je verrais là une gloire de plus que
la démocratie devrait à votre plume et à votre
cœur. Ainsi, plus je vais et plus je vous aime.
J’ai deux amis véritables [...] Au milieu de
la tristesse qui m’accable lorsque je rentre
dans le silence, je trouve une consolation à
sentir que nos idées et notre correspondance
m’amènent à voir en vous un troisième ami
et je souhaite ardemment que le temps nous
resserrera davantage. Et puis ce serait une
grande force au milieu des luttes et des périls
de l’avenir de marcher indissolublement unis
avec un second soi-même »…
provenance
Bibliothèque Dominique de VILLEPIN,
Feux &
Flammes
, I
Les Voleurs de feu
(28 novembre
2013, n° 54).