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les collections aristophil
littérature
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BOSSUET JACQUES-BÉNIGNE (1627-1704)
L.A.S. « +JBenigne E de Meaux », Germigny 21 août 1693,
à Madame d’ALBERT ; 3 pages grand in-8.
1 200 / 1 500 €
Lettre de direction à une religieuse de l’abbaye de Jouarre
.
« Je suis bien aise ma fille avant mon depart qui sera sil plaist a
Dieu demain matin de vous accuser la reception de vos paquets »,
notamment les lettres du grand vicaire, et de la sœur Cornuau. Il
veut répondre à deux demandes. « Premierement n’ayez point de
crainte de recevoir l’attrait que vous m’avez expliqué, nonobstant les
pensées qui l’accompaignent ou le suivent. Secondement ne vous
pressez pas de vous ouvrir sur les affaires dont vous m’écrivez : ma
sœur Cornuau attendra bien que je vous aye ecrit plus ample[men]t
ce que je ferai quand j’aurai trouvé le temps de faire mes reflexions.
Au surplus soyez asseurée que je vous entends, que je croy de bonne
foy ce que vous m’exposez sur vos dispositions et que je vous dis
fort sincerement ce que j’en pense, autant qu’il est necessaire. Ainsi
vous n’avez ma fille qu’à suivre sans hesiter ce que je vous marque »…
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BOSSUET JACQUES-BÉNIGNE (1627-1704)
RECUEIL comprenant des MANUSCRITS autographes
et 2 L.A.S. ; 4 pages in-fol. et 32 pages in-4, montées à
fenêtre dans des feuillets in-fol. de papier vélin fort, le tout
relié en un volume in-folio, veau glacé bleu nuit, dentelle
dorée intérieure (
Rivière
) ; boîte demi-maroquin bleu
à coins de Loutrel, étui.
15 000 / 20 000 €
Important ensemble de manuscrits, fragments, notes et lettres
.
*
Exorde et développement d’un panégyrique de Saint Benoît
, com-
posé à Metz vers 1654, et prononcé dans une église de Bénédictins
ou dans l’abbaye des Bénédictines de Sainte-Glossinde, et réputé
perdu ; Bossuet, dans un autre panégyrique de Saint Benoît, composé
à Paris en 1665, renvoie deux fois à ce premier panégyrique (6 pages,
avec de nombreuses ratures et corrections). L’exorde (2 pages in-4
d’un bifeuillet) est écrit au verso de la copie d’un acte concernant les
pouvoirs de Bédacier, évêque d’Auguste, et du chapitre pendant la
vacance du siège de Metz en 1652 : « Encore que les hommes soient
partagés en tant de diverses conditions, toutefois selon l’écriture
il n’y a à proprement parler que deux genres d’hommes dont l’un
connoit le monde et l’autre la cité de Dieu. Cette solennelle division
est venue de ce que l’homme n’a que deux parties principales qui
sont la partie animale et la partie raisonnable »... Les deux feuillets
du développement (paginés 6 et 7, 4 pages in-fol.) commencent
ainsi : « Et pourtant la victoire est à nous. Ayez bon courage dit il
j’ay vaincu le monde. Il habite en nos cœurs par la foy nous dit Son
grand apostre S. Paul […] Il ne se peust que nous ne surmontions le
monde, parceque dit l’apostre S. Jean, et lui qui est en nous est plus
grand que celui qui est dans le monde »… Citons encore ce passage
sur Saint Benoît : « ainsi victorieux du monde il se confirme d’autant
plus dans ses bons desseins. Voila ce me semble si devers la chair
glorieusement surmontée parlerai je ici des richesses ? Mais quest
il necessaire de rien adjouter à ce que je vous disois tout à l’heure ?
Est il rien de plus pauvre que S. Benoist qui ne subsiste que par les
aumosnes, qui ne vit que des restes d’un autre homme aussi pauvre
que lui ? Que vous dirai je du mépris des honneurs ? »… Etc.
*
Second exorde d’un sermon sur la Passion de Jésus-Christ
,
prononcé le 15 avril 1661. Manuscrit de travail, avec de nombreuses
corrections (4 p. in-4). « Dans la riche description que le St Esprit
nous fait en l’exode des habillemens du Pontife, ce que je trouve
de plus remarquable c’est qu’il luy estoit ordonné de ne paroistre
jamais devant Dieu sans porter sur la poitrine la doctrine et la vérité
en cette tunique misterieuse qui est appellée par Moïse le rational
du jugement [...] remarquons avant toute chose que Jesus est a la
Croix comme une victime, qu’il y est comme un Redempteur, qu’il
y est comme un combattant. Comme victime, il se perd luy mesme,
comme Redempteur il sauve les ames, comme combattant, il gaigne
le Ciel »…
*
Notes concernant la préface de Jean MABILLON sur Saint
Augustin
, préface justificative rédigée en 1699 pour l’édition bénédictine
des Œuvres de Saint Augustin, édition qu’on accusait de jansénisme
(6 et 2 p. in-4). Mabillon a soumis son manuscrit à Bossuet qui l’a
annoté (BnF, Ms latin 11665), mais qui a également rédigé ces notes
concernant les sept règles établies par Mabillon pour l’intelligence de
Saint Augustin sur les matières de la grâce (la note sur la 4
e
règle est
conservée à la BnF dans le fonds Rothschild). Bossuet commente ici
longuement la 3
e
règle (correspondant aux pages 39-42 du manuscrit
de Mabillon) : « On sengage ici à prouver deux choses : l’une que la
grace existante de St Augustin est suffisante et qu’elle donne le pouvoir
de bien faire si l’on veut ; l’autre que St Augustin ne luy donne pas ce
nom. […] Cest brouiller toutes les idées de dire qu’on puisse appeller
ou que St Augustin ait peu appeller ou ait jamais appellé du nom de
grace suffisante ou le concours general, ou la possibilité naturelle
au bien. Car pour le premier le concours est de l’ordre naturel, et
tout ce qu’on appelle ou que l’on peut appeler grace suffisante est
entendu estre d’un ordre surnaturel »… Puis sur la 5
e
règle (p. 76 de
Mabillon), qui a deux parties : « l’une que la grace efficace prouve que
les preceptes ne sont pas impossibles puisqu’elle les fait accomplir »…
*
Fragment de la
Lettre d’un docteur en théologie de la faculté
de Paris à l’abbé ***, docteur de la même faculté
(2 p. in-4 avec
ratures et correction), qui fut répandue manuscrite en 1697 avant d’être
éditée dans la
Relation sur le quiétisme
de Phelypeaux, grand vicaire
de Bossuet, en 1732. Bossuet y répond anonymement à une lettre de
FÉNELON, archevêque de Cambrai, sur l’oraison et le parfait amour :
« on voit l’oraison c’est à dire l’ame de la religion non seule[men]t
attaquée mais encore
en peril
et une pratique basse et intéressée
à laquelle les chretiens s’accoutument.
On défend
, adjoustetil,
le
parfait amour
mesme
aux ames les plus avancées
. Qui le pourroit
croire dans l’église de J.C. et qui n’auroit de l’admiration pour un
prelat persecuté pour cette cause? Pendant qu’il attend le juge[men]
t du Pape avec tant d’indifference et de patience, il veut bien pour
se consoler que le monde scache qu’il a sacrifié toutes choses et il
l’écrit à un ami qui a bien sceu repandre dans toute la Cour comme
dans toute la ville en quatre ou cinq jours et faire passer aux provinces
une lettre si concertée et si éloquente »…
*
Corrections portées sur deux devoirs du DAUPHIN
, l’un en fran-
çais, et l’autre en latin (4 et 4 pages in-4 sur 2 ff. doubles très abîmés).
Bossuet, précepteur de Louis de France de 1670 à 1680, récitait à son
élève l’histoire de France, puis lui en faisait rédiger des épisodes en
français et en latin. Ces devoirs sont relatifs au règne de Philippe le
Bel : le premier devoir évoque l’arrestation du pape Boniface VIII par
Guillaume de Nogaret en 1303 et l’élection de Clément V, le second
est relatif aux guerres de Flandre.
*
L.A.S., 12 septembre 1693, à Madame Henriette-Thérèse d’AL-
BERT, bénédictine de l’abbaye de Jouarre
(4 p. in-4).
Belle lettre de
direction
où Bossuet la rassure au sujet des pouvoirs des confesseurs
de l’abbaye et des cas réservés à l’évêque de Meaux ; il lui conseille
de « laisser chacun dans la bonne foy jusqu’a ce que jy aye pourveu.
Vous n’avez point mal fait et vous n’avez point a vous confesser pour
avoir repondu comme vous me l’avez mandé. Continuez vos com-
munions a l’ordinaire. [...] je suis content, et Dieu en moy, de votre
obeissance. [...] Quand Dieu donne plus il faut plus aimer. Vous avez
receu l’absolution de tous vos pechez confessez et non confessez.
Allez en paix et vivez. Enfoncez vous de plus en plus dans ce silence
[...] Le silence interieur et exterieur ; la retraite et l’éloignement de
la creature, c’est ce qui vous delivrera du peché et vous attirera de
particulieres assistences »... Il part lundi voir le Roi et le Dauphin avant
leur départ ; à son retour, il visitera Jouarre...
*
L.A.S., Paris 16 mai 1699, à Mgr. de VALBELLE, évêque de
Saint-Omer
(4 p. in-4). Au sujet du mandement de FÉNELON, après
la condamnation de son livre
Explication des Maximes des Saints
...
« par une visible affectation il tasche d’insinuer que le Roy ne demande
a vostre province que de rendre son mandement commun, par ou
il exclut indirectement la demande inevitable qu’on doit faire au Roy
de la suppression des livres faits en defense. Mais il abuse de ces
paroles et oublie celles ou le Roy desire que les provinces procedent
a ce qui est necessaire a executer ponctuellement et avec uniformité
la constitution : ce qui ne peut subsister sans supprimer ce qui en
fait defense d’un livre condamné par le St Siège et par son auteur ;
d’autant plus que tous ces livres imprimés sans permission et de
la seule autorité privée par eux mesmes sont rejettables selon les
regles de la police. [...] il est de droit de condamner les defenses des
mauvais livres et outre cela Rome condamnant le livre de l’explica-
tion ex connexione sententiarum elle condamne par consequent les
interpretations faites en defense de ce mesme livre ». Il faut que les
évêques ôtent « des mains des peuples les excuses et apologies d’un
livre dont la pratique est pernicieuse et dont la lecture induit a des
erreurs déja condamnées »...
Ces manuscrits et ces lettres sont accompagnés de lettres et savants
commentaires des éditeurs de Bossuet, Eugène Levesque et Joseph
Lebarq, et d’un portrait gravé par Edelinck d’après Hyacinthe Rigault
collé au contreplat.