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les collections aristophil
littérature
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GRIMOD DE LA REYNIÈRE ALEXANDRE-BALTHAZAR-
LAURENT (1758-1838).
4 L.A.S. « Grimod De la Reyniere » puis « GDLR », Béziers
1790-1791, à Adélaïde-Thérèse FEUCHÈRE, à Lyon ; 3
pages in-4 chaque avec adresse, remplies d’une écriture
très serrée, numérotées 18, 38, 44, 49, adresses (petites
déchirures par bris de cachet).
1 500 / 2 000 €
Belles lettres d’amour et d’érotisme du célèbre écrivain gastro-
nome à sa maîtresse.
[Grimod a fait connaissance en 1790 à Lyon, où il avait ouvert un
magasin d’alimentation et d’étoffes, d’une charmante comédienne,
Adélaïde-Thérèse FEUCHÈRE (1764-1845), qui deviendra vite sa
maîtresse et lui donnera une fille (morte en 1793) ; il l’épousera en
1812. Il lui écrit ces longues et savoureuses lettres dans son étonnant
graphisme dû à la malformation de sa main.]
17 septembre 1790
. Il restera encore à Béziers chez sa tante, mais il
assure n’être « arreté par aucune séduction, illusion, ou plaisir », et il
tiendra parole de rentrer à Lyon pour les couches de sa « charmante
amie ». Il lui donne le détail de ses voyages… « Qui m’obligeoit à te
dire que je voulois être non le parrain, mais le père légal de ton
enfant, tandis que toi-même n’osois m’en prier ? Connois mieux un
cœur qui ne respire que pour toi, qui ne vit que pour t’aimer, et qui
s’ouvre délicieusement à tous les sentimens de la nature. Ce que
je desirois le plus au monde c’etoit d’avoir un enfant d’une femme
que j’aimai. Tu as rempli ce vœu. C’est maintenant à moi à remplir
tous les devoirs qu’il m’impose. […] Je les remplirai avec amour,
avec exactitude, dans toute leur étendue, en adoptant cet enfant,
en m’en déclarant le père »… Ne voulant point porter « les chaînes
du mariage », il ne peut mieux faire que de vénérer celles que lui
impose la « créature angélique » qu’il idolâtre : « ô ma Feuchere !
Rends enfin justice à ton amant ! Connois le mieux, et crois qu’il
t’aime de toutes les forces de son ame, et de toute l’energie de ses
sens. Brulante ivresse qui s’empare de moi chaque fois que je repose
mon ame sur le souvenir de ma bien aimée, soyez garante de mon
amour. Daignés y croire enfin, petite mignone ; que ne puis-je en ce
moment te serrer dans mes bras, confondre mon existence avec la
tienne, m’inonder d’un torrent de delices sur ton sein palpitant de
plaisir et d’amour, et mourir de l’excès de volupté puisé dans ton
cœur et dans tes sens »… Ayant baisé le « gage chéri » qu’elle a joint
à sa lettre, il s’enflamme : « Combien ma bouche ivre de plaisir et
haletante des feux du désir, s’est desalterée delicieusement à cette
fontaine de cristal, qui coule entre vos trumeaux enlacés. Que ma
lampe tremblante aimoit à s’insinuer jusqu’au fond de cette source
adorable, à en pomper l’eau divine, à en provoquer l’écoulement ;
et alors dans quels vases de voluptés tout mon être se plongeoit.
Delicieuses sensations qui redoubloient en moi le prix de l’existence
n’allez vous pas bientôt renaître pour me faire encore mille fois mourir
de plaisir, et me ranimer pour mourir encore »… Il l’entretient enfin
du choix d’un parrain, M. Bonnet, et d’une marraine, Mme Colletta…
Il va lui envoyer d’excellents raisins muscats, des fromages, du miel…
8 avril 1791
. Il la gronde tendrement au sujet de sa santé ; il attache le
plus grand prix à ce que leur enfant conserve sa petite maman. « Quant
à l’accroissement de ma famille, je le desire loin de le redouter, et
malgré la dureté des tems je trouverai toujours moyen d’avoir bien
soin de mes enfans et de ne les laisser manquer de rien. Comme je
ne [me] marierai jamais je les regarde comme ma véritable famille,
et ma bien aimée descendance. Vous me reprochez d’aimer la chre-
tienne encore plus que le créateur. D’abord je n’aime que vous, et
je ne crois pas que vous meritiez trop ce nom. Car vous n’entendez
pas plus de messe qu’un Juif, et vous ne fréquentez pas plus les
sacrements qu’un turc. Vous savez bien que c’est toujours là notre
querelle. Passe qu’on offense Dieu, (légèrement) par un petit coin, ce
n’est pas une raison de l’offenser par tous les bouts ; et il vaut mieux
donner quelques petites entorses au 6
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commandement avec un seul
homme, qu’on doit considerer comme son époux, que de pêcher par
une inconduite je dirois même un atheisme désespérant pour vos amis.
Ensuite pour en revenir à moi je crois que c’est honorer le créateur
que de l’admirer dans l’une des plus parfaites de ses créations. J’en
prends volontiers sur moi tout le péché »… Il termine de façon fort
libre : « j’embrasse tendrement ton joli petit cul, tes charmans petits
tétons, ton delicieux petit moulin, enfin tout ce qu’on peut embrasser
depuis la plante des pieds jusqu’au sommet de la tête »…
2 mai 1791
. Sur sa fille, dont Julien lui dit « qu’elle a beaucoup de
jugement pour son age. J’ai peine à croire que ce soit par là quelle
brille le plus, mais j’apprends avec bien du plaisir qu’elle se porte à
merveille, qu’elle grandit et se fortifie tous les jours. Je suis cependant
faché que son teint noircisse, parce que tu m’as accoutumé à ne rien
trouver de plus joli qu’une peau bien blanche. Il me semble qu’on
pourroit facilement lui couvrir la tête lorsqu’on la promene au soleil.
Je me fais une grande fête de revoir cette chere petite à laquelle je
sens que je m’attache chaque jour davantage »… Il termine : « Adieu,
ma bonne amie […] je te mets dans l’habit des graces, et ainsi vetue je
t’embrasse de toutes mes forces, succe ta jolie langue, tes charmantes
pommes d’apis, tes charmantes pommes de reinette, tes grosses et
fraiches pommes de tambour, puis me fixant dans le centre même de
la volupté par excellence, j’y reste tout à fait, et c’est de la que je me
dis le plus soumis de vos serviteurs et le plus tendre de vos amis ».
22 mai 1791
. Sur les événements : « Je ne crois pas la contre-révolution
plus prochaine à Lyon qu’ailleurs, et les choses sont trop avancées pour
que nous ayions l’esperance de les voir reculer. Si cela etoit il faudroit
s’en rejouir bien plutôt que s’en afliger. Et les personnes connues
pour bien penser seroient alors bien plus en sûreté que les autres.
D’ailleurs en se tenant tranquille chez soi on evite tous les dangers,
et ce ne sont guere que ceux qui les cherchent qu’ils atteignent »...
Un décret ayant autorisé tous les cultes, il n’est plus embarrassé pour
entendre la messe, et « à l’abri de cette
douce
tolérance je pourrai
faire au moins le devoir de l’honneur et de la conscience »... Mais tout
ce qu’ils voient depuis deux ans, prouve le contraire de la maxime de
Pangloss… Il la remercie de sa confirmation de la charmante promesse
faite le 10 mai 1789, « un de mes titres les plus assurés au bonheur.
Je voudrois seulement qu’en me confirmant cette chere parole tu
n’y misses pas une espece de restriction en ajoutant tant qu’il sera
en mon pouvoir de la tenir. Entendrois-tu donc par là te menager un
jour un faux fuyant, une excuse ? Assurément il sera toujours en ton
pouvoir de m’aimer et de m’etre fidele, et moi je te jure à mon tour
et pour la vie l’amour le plus tendre, et une fidelité à toute épreuve.
Je ne suis ni parjure ni volage tu peux m’en croire, et tu sais bien
que mes sentimens pour toi ne font que croître chaque jour bien loin
de diminuer »… Il regrette qu’elle n’aime les « descriptions
plus que
tendres
» de ses lettres : « « En ce cas il faudroit n’être pas si jolie » ;
et il la déshabille pour « glisser ma main dans ton sein, t’asseoir sur
mes genoux, glisser l’autre entre les tiens, introduire un doigt amou-
reux dans le sanctuaire des vrais plaisirs, te procurer des titillations
voluptueuses, exciter en toi les plus douces sensations, charmans
avancoureurs d’un plaisir plus solide, te retourner ensuite, […] m’extasier
à la vue de ces deux globes delicieux qui resusciteroient un mort, […]
y administrer une flagellation préparatoire, […] entrouvir légèrement
le centre des voluptés », etc.
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GRIMOD DE LA REYNIÈRE ALEXANDRE-BALTHAZAR-
LAURENT (1758-1838).
L.A.S. « Grimod ngt », Paris 12 septembre 1794/26 fructidor
2 soir, à la citoyenne FORTIA [Baptistine-Marie-Thérèse de
Cabre de Roquevaire, comtesse FORTIA DE PILES], à L’Isle
par Avignon [L’Isle-sur-la-Sorgue] ; 2 pages in-4 remplies
d’une petite écriture serrée, adresse (petite déchirure par
bris de cachet avec perte de quelques lettres à la fin de 4
lignes).
400 / 500 €
Belle lettre écrite en pleine réaction thermidorienne, à la femme
de son ami le littérateur émigré.
Il reçoit sa lettre comme une faveur inattendue, car il se repentait de
s’être exprimé avec trop de franchise, et trop peu de ménagement,
sans connaître les circonstances où se trouvait le citoyen Fortia, pour
les affaires duquel il n’épargne pas son zèle : « c’est moi qui me suis
chargé seul de toutes les affaires du C. Fortia. Je leur consacre la
majeure partie de mes soins, de mon tems, de mon zèle, et de mes
courses ; et s’il faut en croire ses remerciemens je m’en acquitte à
son entière satisfaction »… Cependant Fortia l’a laissé ignorer la perte
qu’avait faite sa femme [la mort d’un enfant né en 1793]. « Je crains
bien d’y trouver la confirmation de mon système sur l’allaitement, et
je n’ai point à me reprocher d’avoir dissimulé mes craintes au Pere
lors de la naissance de ce malheureux enfant. Il est des mères d’une
complexion si vive, et d’un sang si inflammable, que leur nourriture
est un aliment de mort, et celles là doivent s’interdire par tendresse
maternelle le plus doux des devoirs de la maternité »… Qu’elle ne se
blâme pas de l’insuccès de ses démarches pour adoucir le sort de
Fortia : « N’en accusez que les circonstances, qui jusqu’au 10 Ther-
midor s’opposoient au succès de nos vœux, et mettoient même en
danger les jours de votre ami, quoiqu’absolument innocent, et même
exempt de la plus legère imprudence. Aujourd’hui les choses ont bien
changé. La Justice est à l’ordre du jour, et les mesures de rigueur ne
sont plus que pour les coupables. Livrez vous donc à l’espérance »…
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