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les collections aristophil

littérature

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DESCARTES RENÉ (1596-1650).

L.A.S. « Descartes », Leyde 5 octobre 1640, à Joachim de

WICQUEFORT à Amsterdam ; 1 page in-4, adresse avec

petit cachet de cire rouge (brisé).

25 000 / 30 000 €

Rare et belle lettre concernant

Les Météores

, un des « essais »

du

Discours de la Méthode

, et les objections portées par ses

adversaires

.

« Monsieur

Je suis marri d’avoir redemandé mes armes au tems que celuy que

vous nommez mon Antagoniste s’estoit mis en campaigne, mais

pource qu’on n’a point coustume d’attendre plus d’une heure, ou deux,

ou un jour tout au plus, sur le pré, pour les combats ordinaires : Je

pensois que ce fust assez d’avoir attendu un an entier pour cetuy-cy,

outre que je n’avois point encore appris que M

r

Barlæus se fust

mis en campagne ny mesme qu’il voulust estre mon Antagoniste.

Et puisque je l’apprens par la lettre que vous avez pris la peine de

m’escrire, si tant est que la version de mes Meteores luy puisse servir

a ce dessein, je n’en ay icy affaire que pour deux ou trois semaines,

apres lesquelles je m’offre de la luy renvoyer, si tost que je scauray

qu’il le desire. Et je seray tousjours

Monsieur

Vostre tres humble et tres obeissant serviteur Descartes »

[La lettre est adressée au diplomate Joachim de WICQUEFORT (1600-

1670), diplomate, représentant de Hesse aux États Généraux, membre

du Muiderkring (ou cercle du château de Muiden), ami, entre autres,

des savants Grotius, Huygens et Barlæus (dont il est ici question) ; en

août 1640, Descartes lui avait demandé un manuscrit de Huygens.

Descartes avait envoyé à l’automne 1639 le manuscrit des

Meteora

, la

traduction latine de ses

Météores

(un des « essais » de la Méthode),

à Caspar van BAERLE ou BARLÆUS (1584-1648), professeur de phi-

losophie à l’Athenæum d’Amsterdam, qui maîtrisait mal le français ;

il avait en projet de publier la traduction latine du

Discours

et de ses

Essais

, accompagnée d’objections et de ses réponses aux objections,

et attendait donc les objections de Barlæus.

Dans une lettre précédente à Wicquefort du 2 octobre 1640 (Staats-

bibliothek zu Berlin, Preussischer Kulturbesitz, coll. Darmstädter ;

publ. par Erik-Jan Bos et Corinna Vermeulen, « An Unknown Auto-

graph Letter of Descartes to Joachim de Wicquefort »,

Studia

Lebnitiana

, Band XXXIV/1, 2002, p.100-109), Descartes réclamait le

retour du manuscrit de ses

Météores

« 

qui sont entre les mains de

M

r

Barlaeus, et desquelles j’ay expressement afaire a present […] Je

craindrois aussy qu’il ne semblast que ce fust par poltronnerie, et

affin d’eviter le combat, que je redemande les armes que j’avois cy

devant envoyées a mon adversaire pour les employer contre moy ;

sinon que je suis assuré qu’il a desja eu assez de tems pour s’en

servir, et que la courtoisie avec laquelle il a tesmoigné me vouloir

traiter m’empesche de le pouvoir apprehender »… Trois jours plus

tard, il accuse donc réception du manuscrit des

Météores

que lui a

transmis Wicquefort, tout en raillant le retard pris par son antagoniste

pour lui envoyer ses objections.

Descartes attendait également des objections officielles des Jésuites

contre le

Discours

et ses « essais », notamment sur les

Météores

.

C’est probablement pour cela qu’il réclamait son manuscrit, et pour

empêcher une édition clandestine de la traduction latine de son

ouvrage, qu’il donnera lui-même en 1644 chez L. Elzevier sous le titre

Specimina philosophiæ seu Dissertatio de Methodo recte regendæ

rationis, & veritatis in scientiis invetigandæ : Dioptrice, et Meteora

.

Il avait alors abandonné le projet d’y ajouter des objections et ses

réponses. Il écrivait à Huygens, le 29 juillet 1641 : « Mais pour M

r

Barlæus, j’aurois tort de rien attendre de son costé, sçachant comme

il a cy devant traité mes Meteores, desquelles il a dit en bonne com-

pagnie, apres les avoir gardées pres d’un an, qu’il n’avoit pas trouvé

un mot qu’il approuvast, ny auquel il n’eust à contredire, et toutefois

je n’ay sceu depuis obtenir de luy un seul mot de ses contradictions,

quoy qu’on luy ait assez tiré l’oreille pour le convier à les produire ».]

Correspondance

, éd. C. Adam & G. Milhaud, vol. VIII (1963), p. 317 ;

Œuvres,

éd. Adam & Tannery (1964-1976), t. III, p. 735.