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208

les collections aristophil

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VOLTAIRE (1694-1778)

L.A.S. «V», Cirey 21 octobre [1736], au comte de TRESSAN;

3 pages et demie in-4.

Signed autograph letter, signed «V», Cirey 21 October [1736],

addressed to the Count of TRESSAN, 3 pages and a half, in-4.

8 000 /10 000 €

Belle lettre précédée d’un poème

.

La lettre commence par un poème de quatre sizains, faisant l’éloge

de Tressan tout en raillant Jean-Baptiste ROUSSEAU.

«Tandis qu’aux fanges du parnasse

d’une main criminelle et lasse,

Roussau va cherchant des poisons,

ta main delicate et legere

cueille aux campagnes de citere

des fleurs dignes de tes chansons. […]

Loin ce rimeur atrabilaire

ce cinique, ce plagiaire

qui dans ses efforts odieux

fait servir à la calomnie

à la rage, à l’ignominie

le langage sacré des dieux.

Sans doute les premiers poetes

Inspirez ainsi que vous l’êtes

étoient des dieux ou des amants.

Tout a changé tout degenere

et dans l’art d’écrire, et de plaire

mais vous êtes des premiers temps.

Ah monsieur votre charmante epitre, vos vers qui comme vous res-

pirent les graces meritoient une autre reponse. Mais s’il falloit vous

envoyer des vers dignes de vous, je ne vous repondrais jamais. Vous

me donnez en tout des exemples que je suis bien loin de suivre. Je

fais mes efforts. Mais malheur à qui fait des efforts.

Votre souvenir votre amitié pour moy, enchantent mon cœur autant

que vos vers eveilleroient mon imagination. J’ose compter sur votre

amitié. Il ny a point de bonheur qui n’augmente par votre commerce.

Pourquoy faut il que je sois privé de ce commerce delicieux. Ah si

votre muse daignoit avoir pour moy autant de bienveillance que de

coqueterie, si vous daigniez m’écrire quelquefois, me parler de vos

plaisirs, de vos succes dans le monde, de tout ce qui vous interesse,

que je défierois les Rousseau et les Desfontaines de troubler ma

félicité».

Il lui envoie son poème

Le Mondain

: «c’étoit à vous à le faire. J’y

decris une petite vie assez jolie. Mais que celle qu’on mene avec

vous est au dessus !»…

Correspondance

(Pléiade), t. I, p. 858.