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beaux-arts
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GAUGUIN PAUL (1848-1903).
L.A. (minute), [2 ? avril 1903], à Léonce BRAULT ; 2 pages
in-fol. (33 x 20,5 cm) au crayon sur un feuillet arraché
d’un grand cahier (quelques petits défauts).
8 000 / 9 000 €
Gauguin vient d’être condamné et expose l’affaire à son avocat et
ami, en vue de sa défense, moins d’un mois avant sa mort
.
[Gauguin avait dénoncé à l’administrateur des Marquises le gendarme
Guichenay de Tahuata qui touchait des pots-de-vin des baleiniers
américains ; ce dernier chargea son collègue d’Ivaoa de poursuivre
Gauguin pour « diffamation d’un gendarme dans l’exercice de ses
fonctions » ; Gauguin fut condamné le 31 mars 1903 à trois mois de
prison et 55 francs d’amende, en application de la loi sur la presse;
il charge aussitôt son ami l’avocat tahitien Léonce Brault (1858-1933)
de sa défense, mais il meurt le 8 mai.]
« Au commencement de février j’avais envoyé à M
r
l’adm[inistrateu]r
des Marquises une lettre lui demandant de faire une enquête sur les
marchandises débarquées par le gendarme de Tavata des navires
baleiniers afin de savoir si elles étaient en règle, sinon ce serait une
conduite scandaleuse
. Tout le monde sait ici les capitaines baleiniers
ayant débarqué
un très
grand nombre de marchandises disant que le
gendarme avait eu suffisament la patte graissée. […] Ce que je voulais
c’était comme c’est mon droit exiger une enquête d’autant plus que
des indigènes ont été condamnés pour avoir reçu au lieu d’argent
savon etc. voir même en paiement de prostitution ». L’administrateur,
au lieu de faire l’enquête, a demandé au gendarme de se mettre en
règle ; et Gauguin a alors récrit à l’administrateur, « déclarant que
l’enquête n’ayant pas été ordonnée et faite je tenais le gendarme
pour un parfait honnête homme », et retirant sa plainte… « Sur ce dans
le courant de février le brigadier un grossier personnage vint à me
menacer de beaucoup de choses entre autres de me poursuivre pour
diffamation de la gendarmerie ». Il a informé l’administrateur de ces
menaces, mais a été poursuivi : « j’ai été condamné. Je fais appel » ;
il envoie les pièces du dossier à Brault, pour cette « affaire que vous
avez à examiner attentivement pour la défendre quand le moment
sera venu. […] Vous lirez un dossier des plus curieux ». Il souligne que
la loi de juillet 1881 « invoquée par le juge et la citation est une loi de
presse. Une lettre adressée à un administrateur au gouverneur est elle
considérée comme un imprimé ou paroles diffamant publiquement ? »
En marge, une colonne de petites notes à l’encre, faisant la liste de
14 tableaux : natures mortes, « philosophe », « 2 femmes », « femme
enfant », « 2 chevaux », « Adam Eve », « grande toile », « Mataia
paysage », « religieuse », « Mataia avec cheval », « Vahine matava ».
exposition
Les amitiés du peintre Georges-Daniel de Monfreid et ses reliques
de Gauguin
(Jean Loize, 1951, n° 349).