1
De Bellmer à Vuillard, selon l’ordre alphabétique, de Delacroix à
Lucien Freud selon la chronologie, c’est tout un monde de l’histoire
artistique des deux derniers siècles qui revit à travers ce beau
florilège de lettre et d’écrits de peintres.
Comme une ouverture à la vente qui va suivre de tableaux et
dessins, défile un bel ensemble de lettres illustrées : Degas, Gauguin,
Toulouse-Lautrec, Friesz, Matisse, Calder, Villon, Picabia, Léger,
Magritte, Dali, Chaissac ou Cocteau ; sans oublier quelques beaux
livres illustrés par Buffet, Dali, Dubuffet et Lanskoy.
Dans la sphère intime ou familiale, on remarque les belles lettres de
Monet au travail sur le motif à sa chère compagne puis femme Alice,
celles de Pissarro à sa femme et ses enfants, celles amusantes de
Toulouse-Lautrec à sa mère ou ses grand-mères, et l’extraordinaire
lettre du Douanier Rousseau à la « bien-aimée ».
Les fructueux échanges entre artistes revivent à travers les
correspondants de Monet : Bazille, Manet, Pissarro, Morisot,
Renoir, Sisley ; à travers les lettres de Gauguin à Pissarro, ou de
Kandinsky à Jawlensky… Ce sont aussi des amitiés avec les écrivains :
Baudelaire (Manet), Cendrars (Léger), Cocteau (Bellmer, Matisse),
Joe Bousquet (Ernst), Prévert (Calder).
Le rôle important du marchand est retracé, entre autres, à travers le
bel échange de Durand-Ruel avec Monet, ou les correspondances
adressées au galeriste newyorkais Julien Levy par Bellmer, Calder,
Duchamp ou Man Ray ; on relève aussi des lettres adressées aux
amateurs et collectionneurs : Delacroix à Daniel Wilson, Gauguin
à Gustave Fayet, Monet à Georges de Bellio…
Les peintres prennent aussi la plume, non seulement pour écrire
des lettres, mais aussi rédiger des textes, des écrits de peintres.
Otto Magnus von Stackelberg décrit les paysages de la Grèce qu’il
découvre et parcourt dans les années 1820 ; Georges Rouault et
Francis Picabia composent des poèmes en prose ; Maurice Utrillo
raconte avec verve l’Histoire de ma jeunesse, autobiographie que
son ami Tiret-Bognet illustre d’amusantes aquarelles.
Fleurons des écrits de peintres, et combien précieux, les deux
manifestes de Van Gogh et de Seurat. Le 9 ou 10 février 1890, à
Saint-Rémy-de-Provence, Vincent Van Gogh écrit au jeune critique
Albert Aurier, qui le premier a reconnu son art et salué son génie,
une lettre capitale (et quasi testamentaire, il mourra le 29 juillet)
sur son œuvre, sur Gauguin, sur ses tableaux de Tournesols et de
Cyprès. Un mois après la mort terrible de Vincent, qu’il évoque,
Seurat rédige pour Maurice Beaubourg un véritable credo esthétique
et technique, en même temps qu’il dresse un bilan de son œuvre :
« L’art c’est l’Harmonie ».
Thierry Bodin
CATALOGUE N°15
ÉCRITS & CORRESPONDANCES
DE PEINTRES
DE BELLMER À VUILLARD