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MUSIQUE
1125
CANTELOUBE JOSEPH (1879-1957).
MANUSCRIT MUSICAL autographe signé,
Le Mas
(1925) ;
2 ff-573-[11] pages in-fol.
20 000 / 25 000 €
Manuscrit complet de l’opéra
Le Mas
, en partition d’orchestre
.
Le Mas
, « Pièce lyrique en trois actes », sur un livret du compositeur
lui-même, connut une longue gestation. Commencé en 1908, et
composé en 1911-1913,
Le Mas
fut ensuite remanié et développé, et
ne fut achevé qu’en 1925 ; il comportait alors un Prologue, 2 actes
et 4 tableaux. L’audition du prologue et du prélude du premier acte
aux Concerts Colonne sous la direction de Gabriel Pierné connut
un grand succès.
Le Mas
remporta en janvier 1926 le prix Heugel,
d’une valeur de cent mille francs, décerné par un jury de personna-
lités musicales (dont Paul Dukas, Maurice Ravel ou Florent Schmitt).
Jacques Rouché, directeur de l’Opéra, accepta de monter l’œuvre,
mais demanda des modifications qui entraînèrent le remaniement
en trois actes, le prologue devenant l’acte I, et les deux tableaux du
dernier acte remaniés en un seul. La création eut lieu à l’Opéra de
Paris le 27 mars 1929, sous la direction de Philippe Gaubert, dans une
mise en scène de Pierre Chéreau, des décors de Georges Mouveau
et des costumes de Victor Fonfreide, avec Edmond Rambaud et
Jeanne Laval dans les principaux rôles de Jan et Marie.
Le Mas
est un opéra écologiste avant l’heure, un hymne à la cam-
pagne et à la terre natale. Canteloube déclarait à un journaliste de
Comœdia
, lors de la création de son opéra : « Ayant habité longtemps
la pleine campagne et participé aux travaux des champs, j’ai depuis
mon enfance l’amour passionné de la campagne, de la vie rurale,
saine et naturelle de la terre. C’est pourquoi les personnages du
Mas
expriment vraiment ce que je pense moi-même ». L’ouvrage célèbre
« la vie simple et calme des champs. La Nature y parle sans cesse
par les voix des pâtres, des moissonneurs, des laboureurs et toutes
les rumeurs lointaines comme celles qui montent des vallées ». Pour
la musique de son opéra, Canteloube a avoué avoir puisé, comme
pour ses célèbres
Chants d’Auvergne
, à la source du chant paysan
de son pays ; sa musique est « imprégnée de chants populaires,
soit que je les ai incorporés, tel ou tel fragment authentique servant
de base à la phrase musicale, soit que j’ai écrit les thèmes dans le
caractère des chansons du pays ».
C’est l’histoire d’un mas du Quercy, dont le maître est un vieillard qui
a perdu ses deux fils, qui ont chacun laissé un enfant. Marie a été
élevée au mas par son grand-père ; Jan est parti à la ville, chez ses
grands-parents maternels. Au premier acte, Jan revient au mas pour
une convalescence ; il a laissé une fiancée à la ville, mais éprouve
une certaine émotion en retrouvant les souvenirs de son enfance.
Le deuxième acte est la fête des moissons, près de la fontaine, dont
le vieux Gabel raconte à Jan la légende : elle unit ceux qui se mirent
dans ses eaux ; avant le départ de Jan pour Paris, Marie l’invite à
se mirer près d’elle à la fontaine ; suit le ballet populaire de la fête
de la Gerbe rousse. Au dernier acte, Marie est prête à se sacrifier à
un riche mariage pour sauver le mas, quand Jan revient, appelé par
l’amour de Marie et surtout par l’appel de la terre natale ; ils chantent
leur amour, qui s’unit au chant de la terre.
Le manuscrit, soigneusement noté à l’encre noire sur papier à 26,
28 ou 30 lignes, porte le témoignage des remaniements de l’œuvre,
avec de nombreuses corrections, des passages biffés et quelques
collettes ; il a servi de conducteur pour la création à l’Opéra, comme
le prouvent des annotations au crayon bleu.
Sur la page de titre, Canteloube a corrigé le découpage en « deux
Actes, un Prologue et quatre Tableaux » en « trois Actes » ; il a noté :
« Paroles et Musique de J. Canteloube (1911-1913) », et inscrit en
exergue ces vers de Bernard de Ventadour, « troubadour du XII
e
siècle » : « Quand le doux vent vient à souffler / Du côté de mon
pays / M’est avis / Que je sens / Une odeur de Paradis ». Au verso,
il a rédigé cette dédicace : « À la mémoire de mes parents. J.C. ».
Un autre feuillet dresse la liste des personnages :
Marie
,
Jan
,
Le
Grand’père
,
Rouzil
, ancienne nourrice de Jan,
Gabel
, vieux serviteur,
maître-valet au Mas ; un vieux mendiant, un vieux moissonneur, une
jeune fille, lieuse de gerbes, [la voix de Jantil
biffé
]. Suit le détail des
chœurs : voix de
bergers
(en coulisse), voix de
moissonneurs
(en
coulisse puis en scène), voix au
loin
(en coulisse), voix de
laboureurs
(en coulisse),
Travailleurs
du Mas (en scène) ; Canteloube précise :
« L’ensemble de ces voix est présenté ainsi pour obéir à l’ordre de
leur apparition dans l’ouvrage, mais il ne nécessite point un nombre
anormal de choristes ; les diverses voix ne se trouvant pas chanter
ensemble. Les bergers, moissonneurs, laboureurs, travailleurs et
voix au loin sont donc chantés par les mêmes choristes ». Il ajoute :
« L’Action se passe [en Quercy
biffé et corrigé
] aux confins de l’Au-
vergne méridionale, de nos jours, dans une famille de vieille souche
terrienne ». Il donne enfin le découpage et le décor : « Acte I (Pro-
logue). La Cour du Mas. Acte II. La Fontaine (aux moissons). Acte III.
La Cour du Mas (aux semailles) » ; ce dernier décor devait être celui
du 1
er
tableau, l’acte III devant comporter un second tableau (« La
Fontaine (aux semailles) » qui a été supprimé. Au verso, il a dressé
la nomenclature des instruments : petite flûte (ou 3
e
grande flûte),
2 grandes flûtes, 2 hautbois, 1 cor anglais, 2 clarinettes, 1 clarinette
basse, 3 bassons, 1 contrebasson, 4 cors, 3 trompettes, 3 trombones,
1 tuba, timbales, timbres (glockenspiel), cymbales, célesta, 2 harpes,
quintette à cordes ; s’y ajoutent une cloche, 5 trompes d’appel, la
trompe de Gabel, la musette (Canteloube indique des instruments
de substitution).
Le manuscrit est ainsi divisé :
Acte I. (Prologue) (p. 1-98).
Acte II ([titre] et p. 99-394), avec cette note à la fin : « Fin du [1
er
] 2
ème
Acte. Malaret-Bagnac (Lot) 5 juillet 1913 J. Canteloube ».
Acte III ([titre] et p. 395-573), avec cette note à la fin : « “Sweet-Home”
St Palais s/mer juillet-août 1925 J. Canteloube ».
Suivent 11 pages numérotées A à K : «
Appendice
. Pour le cas où
l’on ne joue pas la
Fête de la Gerbe Rousse
. Intercaler à la page 273
de la partition ».
Bibliographie
: Jean-Bernard Cahours d’Aspry,
Joseph Canteloube
(Séguier 2000), p. 80-88.