Previous Page  199 / 224 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 199 / 224 Next Page
Page Background

197

MUSIQUE

1234

STRAUSS RICHARD (1864-1949).

MANUSCRIT MUSICAL autographe pour

Daphne

, [1937 ?] ;

2 pages d’un feuillet oblong in-fol. (26,7 x 34,9 cm) ; au

crayon.

12 000 / 15 000 €

Très beau manuscrit de la version primitive de la scène du baiser

dans l’opéra

Daphne

, une des plus belles pages de la partition

.

Privé de son librettiste Stefan Zweig qui s’est réfugié à Londres,

Richard Strauss se tourna vers Joseph GREGOR (1888-1960) pour

l’écriture des livrets de ses opéras

Friedenstag

et

Daphne

. Le livret

de

Daphne

, inspiré du tableau de Chassériau

Apollon et Daphné

,

fut soumis à Strauss en octobre 1935, mais, fortement critiqué par le

compositeur avec l’avis de Zweig, il fut remanié. Strauss ne se mit

au travail qu’après avoir terminé

Friedenstag

, dans l’été 1936, et il

termina la partition à Taormina le 24 décembre 1937.

Daphne

(opus 82

du compositeur) fut créée au Staatsoper de Dresde par Karl BÖHM,

avec Margarete Teschemacher dans le rôle de Daphne, Torsten Ralf

(Apollo) et Marin Kremer (Leukippos).

La nymphe Daphné refuse l’amour, auquel elle préfère la beauté de

la nature. Elle repousse les avances du berger Leukippos qui, pour

l’approcher au cours d’une fête en l’honneur de Dionysos, se déguise

en femme. Le dieu Apollon, ébloui à son tour par la beauté de Daphné,

cherche à la séduire et tente de l’embrasser. Quand il découvre la

supercherie de Leukippos, il crie au sacrilège et le transperce d’une

flèche. Touché par les remords de Daphné qui se juge responsable

de la mort de Leukippos et jure de lui rester fidèle, Apollon demande

à Zeus de la transformer en arbre pour qu’elle se fonde à jamais dans

la nature et décore de ses feuilles les héros.

Le manuscrit de ce feuillet de la particelle, sur papier oblong à 26 lignes,

est paginé au crayon bleu 23-24. Il est écrit très nettement au crayon

noir. L’orchestre est noté sur 4 portées pour l’introduction orchestrale,

mais plus généralement sur 2 ou 3 portées, avec quelques rares indi-

cations d’instrumentation ; selon donc le nombre de voix intervenant,

les systèmes sont composés de deux à six portées, réunies par une

accolade souvent réduite à un vague trait. Ce feuillet comprend 104

mesures (la dernière incomplète), commençant neuf mesures avant

le

Lento

(correspondant à peu près au numéro 138 de la partition).

Interviennent Daphne (soprano), Apollo (ténor) et le chœur noté à

l’unisson, alternant parfois sur la même portée. Sur certaines mesures,

des phrases instrumentales sont insérées sur les portées des voix. À

trois endroits, les portées ont été prolongées dans les marges de la

feuille, la place étant insuffisante pour la mesure complète.

Ce feuillet donne la

totalité de la scène du baiser

, avec l’introduction

orchestrale où Apollo prend dans ses bras Daphne, l’entoure de son

manteau, tente de l’embrasser, et où Daphne, après avoir lutté, réussit

à s’échapper, et, troublée, chante : « Dieser Kuß, dies Umarmen…

Du nanntest dich : Bruder ! » ; et Apollo lui déclare : « Ich liebe dich,

Daphne ! »… Leur dialogue continue, tandis que le chœur chante en

coulisse : « Gib, Dionysos, Neu erstandener, Gib uns Rausch ! Gib uns

Liebe, Aphrodite ! » ; Daphne avoue son trouble, et Apollo déclare

son désir brûlant, finissant sur la phrase : « Begehre ich dich, verzichte

nicht… » ; suit un bref passage orchestral d’une quinzaine de mesures

(avant l’intervention de Peneios et des bergers).

On relève de nombreuses différences avec la version finale, Strauss

ayant par la suite profondément remanié la scène en insérant de

nouvelles mesures à plusieurs endroits et en modifiant parfois la

partie vocale ; il fera également intervenir plus tôt le chœur en sour-

dine, soutenant les mots de Daphne « Du banntest mich », alors qu’il

n’intervient sur la particelle qu’après la fin de sa réplique.

Provenance

: le ténor Franz Klarwein (1914-1991), interprète et ami

de Richard Strauss ; sa veuve la soprano Sári Barabás (1914-2012).

Discographie

: Hilde Güden et James King, Karl Böhm (Deutsche

Grammophon 1964) ; Renée Fleming et Johan Botha, Semyon Bychkov

(Decca 2005).